L'Humanité
Salah Hamouri : les mensonges
de l’ambassade d’Israël en France
Pierre Barbancey
Salah
Hamouri à Ramallah, en 2011. AFP
Samedi 2 septembre 2017
Un diplomate israélien a écrit
officiellement, le 30 août, à des
députés français pour leur donner la
version de Tel Aviv sur l’emprisonnement
du jeune Franco-palestinien. Une lettre
bourrée de fausses informations et de
reprises de faits contredits par la
justice française elle-même en son
temps. Visiblement la mobilisation pour
la libération de Salah Hamouri gêne Tel
Aviv, malgré le silence d’Emmanuel
Macron et de son ministre des Affaires
étrangères, Jean-Yves Le Drian.
La mobilisation
pour la libération de Salah Hamouri se
poursuit et s’amplifie. Après un premier
rassemblement devant le ministère des
Affaires étrangères, jeudi soir, à
Paris, d’autres se sont tenus, notamment
à Martigues (Bouche-du-Rhône) et à
Mitry-Mory (Seine-et-Marne). Une
délégation a été reçue, jeudi, par au
ministère des Affaires étrangères, mais,
visiblement les autorités françaises
refusent de prendre la mesure de ce qui
se passe: un citoyen français est placé
en détention administrative sur la base
d’un dossier secret, donc illégalement
au regard du droit international. C’est
d’ailleurs le ministre israélien de la
Défense, Avigdor Liberman, connu pour
ses déclarations racistes, anti-arabes
et anti-palestiniennes, opposé à tout
accord avec les Palestiniens, qui a
lui-même signé l'ordre de mise en
détention administrative de Salah
Hamouri. Jean-Yves Le Drian, ministre
français, n’a pas jugé utile de recevoir
lui-même la délégation, ni même envoyer
un membre de son cabinet, qui aurait
traduit son souci politique. Un
haut-fonctionnaire a écouté les
arguments de Bertrand Heilbronn,
président de l’Association France
Palestine Solidarité (AFPS) et de
Patrick Le Hyaric, député européen. Mais
on se doute bien, quelles que soient ses
compétences, qu’il n’avait aucune
latitude pour répondre. Le site du
magazine l’Express cite le ministère des
Affaires étrangères qui a exprimé sa
« préoccupation face au recours extensif
à la détention administrative » et
« appelle, par ailleurs, les
autorités israéliennes à permettre à son
épouse française et à leur enfant de lui
rendre visite ». Etonnant! D’abord
parce que l’épouse française de Salah
Hamouri a été refoulé la dernière fois
qu’elle a voulu, avec leur bébé,
rejoindre son mari, dont elle se trouve
séparée de fait. De plus, il ne s’agit
pas de lui rendre visite mais d’obtenir
sa libération !
A l’Elysée, c’est
pire, on ne daigne même pas répondre aux
courriers des députés et sénateurs
communistes qui ont interpellé, dès le
premier jour, le président de la
République. Est-ce par ce silence qu’il
faut comprendre l’assertion d’Emmanuel
Macron lors de son discours devant les
Ambassadeurs, prononcé le 29 août et
dans lequel il affirme: « Il est
fondamental que la France continue à
peser sur la question
israélo-palestinienne » ? Est-ce par
ce silence qu’il entend retrouver la
« la voie d’une France reprenant son
rang parmi les Nations en Europe,
répondant aux défis du monde actuel et
faisant entendre clairement son point de
vue » ?
C’est dans ce
contexte qu’advient le plus révoltant.
Une lettre de l’Ambassade d’Israël en
France, datée du 30 août, reçue par
le député socialiste de la Loire, Régis
Juanico, qui, contacté par l’AFPS de ce
département au même titre que tous les
parlementaires, est intervenu auprès du
gouvernement français pour obtenir des
explications sur le sort de Salah
Hamouri. En aucun cas il n’a contacté
l’Ambassade d’Israël. Celle-ci semble
donc sur la défensive et tente de
s’adresser directement à la
représentation française pour éviter
toute mobilisation en faveur de Salah
Hamouri, et particulièrement de la part
des parlementaires.
Marc Attali,
ministre plénipotentiaire de l’Ambassade
israélienne, a pris la plume et aligne
contrevérité sur contrevérité, mensonge
sur mensonge. Il mélange ainsi les
raisons de son arrestation (« son
appartenance à une organisation
terroriste illégale », « son rôle de
leader au sein de cette organisation »
et « sa participation dans le complot
destiné à assassiner le rabbin Ovadia
Yossef ») le 13 mars 2005 avec la
condamnation in fine qui ne concerne que
le troisième point et n’a de toute
manière aucune valeur puisque Salah
Hamouri n’a plaidé coupable que pour
éviter une peine de 14 ans de prison.
Jean-Claude Lefort,
député honoraire et ancien président du
comité de soutien à Salah Hamouri, qui a
publié une « mise au point au sujet
des mensonges » de l’Ambassade
d’Israël, rappelle que dans une lettre
en date du 31 mars 2011, Alain Juppé,
alors ministre des Affaires étrangères,
écrivait: « Je déplore que les autorités
israéliennes n’aient pas pris de
décision de remise de peine, d’autant
que les aveux faits à l’audience n’ont
été corroborés par aucun élément de
preuve. » Plus grave encore, le «
ministre plénipotentiaire » affirme que
dans une « interview pour l’agence
Reuters », Salah Hamouri « a confirmé
son implication dans le projet
d’attentat, affirmant que lui et ses
complices avaient « tous les droits
d’assassiner le grand rabbin » ». On ne
fera pas l’insulte à ce diplomate de
croire qu’il n’est au courant de rien.
En revanche, on peut penser qu’il tente
d’induire en erreur les députés français
par des mensonges.
Là encore,
Jean-Claude démontre l’entreprise de
désinformation de l’Ambassade. « Ces
propos de Salah n’existent tout
simplement pas et le Ministre serait
bien en peine d’apporter la preuve de
leur existence! », écrit-il. « Nous le
mettons au défi de le faire. Ce qui est
exact, par contre, c’est que l’agence
Reuters avait publiée une dépêche
affirmant que Salah avait dit que « le
rabbin méritait de mourir ». Mais là
encore, il s’agissait d’un faux. Non
seulement Salah Hamouri démentait sur le
champ ces propos mais l’agence Reuters,
bandes sonores à l’appui, faisaient
aussi un démenti. Mieux encore : la
famille de Salah enclenchait un procès
contre Reuters. Le tribunal rendit son
jugement le 10 juin 2013 dans lequel
l’agence admettait son « erreur » et le
fait que « Salah Hamouri n’a jamais tenu
» les propos incriminés. » C’est dire si
les manipulations se situent au coeur
même de l’information.
Passons sur le fait
que le diplomate israélien, pour montrer
la « dangerosité » de Salah Hamouri,
s’appuie sur le fait qu’il « a été
interdit d’accès (par les services de
sécurité israéliens, ndlr) à la région
de la Judée-Samarie en 2015/2016 ». La
Judée-Samarie n’existe que dans la
Bible. Il s’agit en fait de la
Cisjordanie, territoire palestinien
occupé. Jean-Claude Lefort se gausse: «
On notera l’absurdité des propos du
Ministre puisqu’au nom de la sécurité
d’Israël Salah Hamouri était interdit
d’entrer en… Palestine ! »
Voilà, selon
l’ambassade d’Israël en France, ce qui
expliquerait la détention administrative
de Salah Hamouri ! Cette Ambassade
aurait-elle eu accès à un dossier que
même les avocats du Franco-palestinien
ne peuvent consulter? Pour Jean-Claude
Lefort, « le Ministre invente une
raison, assis derrière son bureau de
Paris, « Salah Hamouri serait membre du
FPLP ». Outre que cette accusation
remonte déjà à plus de 10 ans en
arrière, on se demande bien pourquoi
brutalement elle ressortirait ! Mais
surtout elle est tout simplement fausse
! »
Document à
télécharger:
lettre_ambassade_disrael_concernant_salah.pdf
© Journal
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Publié le 4 septembre 2017 avec l'aimable
autorisation de
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