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Olivier Mukuna
Jeudi 21 novembre 2019
Les révélations de l’Express concernant
les productions racistes et
négationnistes de Yann Moix,
intitulées « Ushoahia » (1989-1990),
interrogent à plus d’un titre. D’un
traitement médiatique différencié à
l’état actuel de la lutte contre toutes
les formes de racisme. Invité à deux
reprises à la télévision (France 2,
le 31 août ; C8, le 7 novembre)
pour « s’expliquer », l’écrivain
âgé de 51 ans affirme regretter une
faute de jeunesse et promet « d’attaquer
en justice quiconque [l’]accusera
d’antisémitisme ». Rideau ?
Non, car il reste quelques gros
problèmes...
Par concision superficielle, réflexe
politiquement correct ou copinage
médiatique, la majorité des médias a
survolé voire invisibilisé les
véritables enjeux de l’affaire Moix.
Jusque là, rien de très inhabituel.
Ensuite - après deux mois de silence -,
Yann Moix s’est vu réhabilité en
télévision et a décroché un poste de
chroniqueur sur la chaîne privée C8. Une
première inquiétante. Après l’exhumation
de ses productions d’une virulence
raciste et négationniste inouïes, Yann
Moix est donc la première personnalité
controversée à se voir non seulement
vite « pardonnée » mais
aussi récompensée par l’octroi d’un job
très lucratif de chroniqueur-télé.
Ce deux poids deux mesures - qui ne
défrise personne au sein des médias
français et belges comme chez les
associations antiracistes - a pourtant
déclenché l’activisme d’un chercheur
universitaire franco-israélien en
Israël. Pour Nissim Amzallag, « l’affaire
Yann Moix » ou « l’affaire Ushoahia » ne
peut en rester là car celle-ci recèle « un
danger énorme ». Dans une
double perspective - d’intérêt public et
journalistique -, il nous a donc semblé
pertinent d’interviewer ce chercheur
afin qu’il réponde à nos questions et
nous livre son analyse. Détonante et à
contre-courant, cette dernière est
également... interdite de médiatisation
francophone.
Oui, interdite. Puisque depuis une
semaine, soit depuis le 12 novembre
2019, cet entretien a été proposé pour
publication à 15 médias français et
belges. Cinq d’entre-eux l’ont refusé
officiellement (sans même le lire)
tandis qu’une dizaine d’autres ont
laissé, jusqu’à ce jour, notre
sollicitation sans réponse (ce qui, en
journalisme, est la façon impolie de
refuser une contribution extérieure).
.
Pourtant, sur le fond, il s’agit moins
des impostures nauséabondes de Yann Moix
que de la réaction complaisante d’un
milieu parisien face à l’expression
antisémite, négrophobe et négationniste
de l’un des siens. Ouvrant la porte à un
inquiétant précédent : l’apparition d’un
racisme-négationnisme «pardonnable» du
moment que celui-ci provient d’une
personnalité qui a fait contrition
télévisée et continue de s’afficher
comme un soutien inconditionnel de
l’Etat d’Israël.
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