Opinion
Chasse aux sorcières et
hystérie antiterroriste
Nicolas Bourgoin
Lundi 26 janvier 2015
La liberté d’expression vit sans
doute ses dernières heures. Comme on
pouvait le craindre, le gouvernement a
récupéré sans vergogne l’émotion
collective suscitée par la fusillade de
Charlie Hebdo pour mettre en place un
véritable régime d’exception comparable
au Patriot Act étasunien. Ce tour de vis
sécuritaire survient dans un contexte
déjà marqué par de nombreuses atteintes
aux libertés publiques avec la
dissolution de mouvements nationalistes,
la jurisprudence Dieudonné et deux lois
antiterroristes.
Cette véritable chasse aux
sorcières a d’ores et déjà fait de
nombreuses victimes en particulier parmi
les enfants. Nous publions ci-après une
série de témoignages édifiants qui en
disent long sur l’état actuel des
libertés.
Depuis les attentats du 7 janvier, un
vent de folie collective s’abat sur la
France. Le ministère de l’injustice,
recense plus de 100 procédures ouvertes
pour « apologie du terrorisme », soit
environ 10 par jour si on laisse le
dimanche aux procureurs pour compter
leurs scores respectifs dans cette
nouvelle course aux chiffres
surréaliste. 30 personnes ont déjà été
condamnées, soit plus qu’au cours des 20
dernières années.
Amnesty International, Human Rights
Watch et le syndicat de la magistrature
dénoncent cette dérive totalitaire. Ils
sont bien les seuls.
Le Patriot
Act à la française avait été voté juste
avant les attentats
C’est la loi du 13 novembre 2014 qui
permet à notre grande démocratie
d’arrêter, d’enfermer et de condamner en
comparution immédiate tous ceux qui ont
le malheur de dire quelques mots de
trop, à commencer par les enfants.
Dans son article 421-4-5, cette loi
instaure
un délit pénal d’apologie du
terrorisme qui est puni de 5 ans
d’emprisonnement et 75 000 € d’amende.
(1) L’utilisation d’Internet est
considérée comme une circonstance
aggravante punie de 7 ans de prison et
100 000 euros d’amende.
Le 12 janvier, Christiane Taubira
s’est empressée d’envoyer une circulaire
appelant les procureurs à une « grande
fermeté » pour toutes les infractions
commises à la suite des attentats.
PPour ceux qui avaient encore un doute
sur l’indépendance de la justice, ils
sont levés. Les procureurs représentent
bien le bras armé du pouvoir politique
socialiste, plus personne ne peut en
douter.
Les enfants
particulièrement ciblés
Outre une série impressionnante de
condamnations allant jusqu’à de la
prison ferme pour des personnes en état
d’ébriété, un déficient mental, un
chauffard, une mère de famille, des
employés municipaux, les enfants sont
devenus la cible privilégiée de nos
dirigeants bien décidés à terroriser
tout le pays.
Nantes. Une jeune fille prend le
tramway avec ses sœurs et une amie. Des
contrôleurs se présentent et demandent
leur titre de transport. Après une
altercation verbale, la plus jeune leur
lance « On est les sœurs ouachi, on va
sortir les kalachnikovs ». Les
contrôleurs appellent la police, elle
est mise en garde-à-vue puis présentée à
un juge en comparution immédiate qui la
met en examen pour apologie du
terrorisme. Elle a 14 ans…
Toujours à Nantes. Décidément… Un
lycéen publie sur son mur Facebook une
caricature qu’il trouve particulièrement
« marrante » selon ses propres termes.
En juillet 2013, Charlie Hebdo sort une
couverture qui montre un Egyptien se
faire trouer de balles malgré un Coran
tenu devant lui avec la légende « Le
Coran, c’est de la merde, ça n’arrête
pas les balles ». Le lycéen trouve sur
Internet une parodie de cette caricature
qu’il publie. Elle montre un journaliste
tenant ce même exemplaire de Charlie
Hebdo, troué de balles, avec la légende
« Charlie Hebdo, c’est de la merde, ça
n’arrête pas les balles ».
QQuelques jours plus tard, il est
interpellé par la police chez lui et
placé en garde-à-vue puis déféré le
lendemain. Le parquet, requiert son
placement en liberté surveillé et sa
mise en examen pour apologie du
terrorisme. Il a 16 ans…
Quand des
enseignants deviennent des auxiliaires
de police
La palme de l’hystérie collective
revient incontestablement à ce chef
d’établissement qui se reconnaîtra.
L’histoire est racontée par une
éducatrice chargée de recevoir les
mineurs déférés en comparution
immédiate.
Jeudi 8 janvier. Un collégien fait
une minute de silence avec sa classe en
hommage aux victimes des attentats.
Vendredi, le professeur de français
propose à ses élèves un débat sur ce qui
vient de se passer. N’ayant pas bien
compris qu’il s’agissait autant d’un
piège que d’une réelle volonté de
débattre avec les élèves, l’enfant lève
la main et dit « ils ont eu raison ».
Au lieu de demander des explications,
d’écouter, puis d’expliquer comme tout
bon professeur aurait dû le faire, le
censeur lui ordonne immédiatement : « si
tu penses ça, sors de ma classe ».
La suite est hallucinante.
L’élève se rend chez la Conseillère
Principale d’Education qui lui explique
pourquoi il était interdit de penser que
les terroristes « ont eu raison ».
Dimanche, l’enfant va à son match de
foot. Il fait une minute de silence avec
ses camarades. « C’était bien, on était
tous en rond, on se tenait par le cou »,
raconte-t-il.
Lundi matin à l’école, il est
convoqué chez le principal. Mardi matin,
il est re-convoqué. L’enfant s’excuse et
exprime ses regrets.
Mardi, le principal le convoque à
nouveau, avec ses parents cette fois. Il
leur apprend que leur enfant est exclu
pour une semaine, « une mesure
conservatoire »… En attendant le conseil
de discipline où il risque une exclusion
définitive.
Mercredi, le principal, grand
pédagogue devant l’éternel va porter
plainte contre l’enfant au commissariat.
Jeudi, l’enfant et ses parents se
rendent à la convocation de la police «
pour être entendu ».
L’enfant est alors arrêté et placé en
garde-à-vue.
Il va passer 24 heures dans les
geôles de la république nationale
socialiste.
Vendredi matin, menotté, il est
présenté au juge pour une mise en examen
d’apologie du terrorisme.
A 14 ans, l’âge où les adolescents
sont en pleine puberté, où ils sont en
train de construire leur repères, où ils
pensent plus aux filles qu’à la
politique ou à leur avenir. A 14 ans,
cet enfant aura connu l’enfermement dans
une cellule, la garde-à-vue, les
menottes, l’audition devant un juge…
Pour 4 mots…
4 mots de trop qui vont probablement
lui valoir une condamnation qui le
suivra tout au long de son existence. 4
mots qui lui vaudront d’être fiché parmi
les auteurs d’infractions à caractère
terroriste. 4 mots qui vont foutre toute
sa vie en l’air.
Ce qui est particulièrement révoltant
dans cette histoire, outre le caractère
totalement disproportionné de la
procédure compte tenu de l’âge du
présumé futur terroriste, c’est le
véritable piège tendu par l’école aux
enfants qu’elle pourtant est censée
éduquer et protéger.
Cet enfant ne demandait rien à
personne. Il ne s’est pas exprimé dans
la rue, ou même sur Internet. Il a
simplement répondu à une question de son
professeur.
AAlors que l’école devrait être un
lieu de pédagogie, d’explications, de
dialogues, nos gouvernants socialistes,
bien aidés en cela par certains
fonctionnaires zélés, sont en train de
la transformer en lieu de délation et de
répression, bientôt en un vaste camp de
ré-éducation pour 12 millions d’enfants.
Le plus
grand hold-up de l’histoire après celui
du 11 septembre
Au nom de la préservation de la
liberté d’expression, l’Etat Socialiste
est en train de réaliser le plus grand
hold-up de l’histoire sur nos libertés
fondamentales. Juste après celui de Bush
le 11 septembre 2001.
Le raisonnement est le suivant : les
terroristes ont voulu faire taire
Charlie Hebdo donc la liberté
d’expression. Ceux qui ne condamnent pas
les terroristes sont par conséquent
contre la liberté d’expression. Ils
doivent être jugés, enfermés et privés
de liberté, notamment d’expression.
C’est logique ? Non, c’est totalitaire,
stupide et totalement incohérent, bref,
socialiste./p>
DDeux poids de mesures ? Oui,
parfaitement, c’est exactement cela.
Qu’un enfant dise 4 mots de trop, il est
broyé, détruit, marqué à vie au fer
rouge. Pendant ce temps, Charlie Hebdo
publie une nouvelle caricature qui
provoque des dizaines de morts, des
émeutes dans plusieurs pays, des
drapeaux français brûlés à travers le
monde, ça s’appelle la « liberté
d’expression ».
Ils n’ont
pas tué Charlie
Charlie Hebdo n’est pas mort. Avec
plus de 7 millions d’exemplaires à 3 €,
ils sont en train de ramasser
l’équivalent de plusieurs années de
chiffre d’affaires avec un seul numéro.
C’est la liberté qui est morte ce 7
janvier 2014. Valls, futur candidat à la
primaire socialiste pour les prochaines
présidentielles
a prévenu les enfants : « votre
génération doit s’habituer à vivre avec
ce danger pendant un certain nombre
d’années » (3). Tirant profit des
attentats, le gouvernement socialiste
est en train de mettre en place la
politique la plus répressive jamais
appliquée depuis le régime de Vichy.
Leur but est simple. Après avoir
imposé au pays une minute de silence,
ils vont nous imposer 2 ans et demi de
silence, le temps d’arriver aux
prochaines présidentielles. Je ne vous
fais pas de dessin, C’est devenu trop
dangereux de dessiner. Soit vous tombez
sous les balles de terroristes, soit
vous tombez dans les geôles de la
république socialiste laïque.
La dictature c’est maintenant.
Source :
Nouvelles de France
Pour aller plus loin : voir
ici un entretien au sujet de mon
dernier livre La République contre
les libertés. Le virage autoritaire de
la gauche libérale (L’Harmattan,
2015).
Publié le 30 janvier 2015 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
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