Opinion
La lutte contre le racisme et
l’antisémitisme, arme de destruction
massive des libertés publiques
Nicolas Bourgoin
Photo:
D.R.
Vendredi 20 février 2015
Droite du travail, gauche des valeurs.
La politique du gouvernement Hollande
semble se résumer à deux axes en
apparence opposés mais en réalité
convergents : mise aux normes
mondialistes de l’économie française,
pénalisation toujours plus forte du
« racisme et de l’antisémitisme » sous
couvert de lutte contre le djihadisme.
Pendant que le gouvernement Hollande
s’active à dépouiller les travailleurs
français de leurs dernières protections
face à la violence de l’économie de
marché, il fait mine de protéger les
personnes supposées vulnérables à la
discrimination ethnique ou religieuse
par une législation toujours plus
stricte. Dans les deux cas, la méthode
est similaire : passage en force et
autoritarisme. Le but également : cette
compassion victimaire (d’ailleurs à
géométrie variable) sert le projet
mondialiste en disqualifiant les
oppositions à sa politique.
Il y a des hasards de calendrier qui
en disent long. Cette semaine a vu
le passage en force de la loi Macron,
sans doute la réforme
la plus libérale votée sous la 5ème
République, ainsi que l’annonce par la
Garde des Sceaux d’un
énième projet de loi contre le racisme
et l’antisémitisme.
La mécanique est bien rodée : surfer
sur l’émotion collective provoquée par
un événement dramatique pour faire
passer une nouvelle loi liberticide. La
dernière en date ne fait pas exception.
La
profanation d’un cimetière juif de
Sarre-Union par cinq mineurs qui ont
saccagé 250 tombes ainsi que les
agissements de certains supporters de
Chelsea qui ont
empêché un homme noir de monter dans
le métro ont servi de prétexte à un
énième durcissement pénal. Le nouveau
projet de loi de Christiane Taubira fait
des actes racistes et antisémites des
circonstances aggravantes dans de
multiples infractions. Il crée en outre
une plateforme dédiée aux personnes
victimes de ces actes et donne la
possibilité à celles-ci de se regrouper
et d’agir ensemble. La lutte contre le
racisme et l’antisémitisme, décrétée par
François Hollande « grande cause
nationale » après les attentats du mois
de janvier, faisait déjà l’objet d’une
priorité expresse : par
sa circulaire du 12 janvier 2015,
Christiane Taubira avait demandé aux
procureurs de la République de « faire
preuve d’une extrême réactivité dans la
conduite de l’action publique envers les
auteurs d’infractions racistes ou
antisémites » en insistant pour qu’une
réponse pénale « systématique, adaptée
et individualisée » soit apportée à
chacun de ces actes. En clair :
tolérance zéro pour ce type
d’infraction, attitude qui contraste
singulièrement avec le traitement
réservé à la délinquance classique,
un champ largement délaissé par le
gouvernement.
Si l’intention est louable, on peut
s’interroger sur sa finalité. Et sur
cette question, les dérives de la lutte
antidjihadiste sont riches
d’enseignement : pour simplement avoir
refusé la minute de silence après les
attentats de Charlie Hebdo ou avoir
posté un message provocateur sur les
réseaux sociaux, de nombreuses personnes
– parfois des collégiens –
ont été inculpées d' »apologie du
terrorisme », innovation juridique
de la loi Cazeneuve votée en novembre
dernier, passible de 7 années
d’emprisonnement et 100.000 euros
d’amende. Ces excès
ont suscité l’inquiétude des
associations de défense des droits de
l’Homme. Et pour cause : nul futur
terroriste derrière les barreaux mais de
simples citoyens déclarés coupables
d’avoir déserté la mobilisation générale
pour la « guerre contre le terrorisme ».
De façon similaire, l’accusation
d’antisémitisme sert surtout à
disqualifier, et parfois même à
criminaliser, les oppositions à la
politique israélienne ou à la soumission
de la France au lobby pro-israélien.
Sous les tirs croisés de ces deux armes
juridiques Yvan Benedetti, ancien
dirigeant de L’Œuvre française,
se voit poursuivi pour « apologie du
terrorisme » et « antisémitisme » à
cause de simples messages postés sur le
réseau social twitter. Il faisait déjà
l’objet
d’une mise en examen depuis novembre
dernier pour reconstitution d’une
organisation dissoute.
L’antisémitisme deviendrait-il
synonyme de contestation de l’ordre
dominant ? Il est en tout cas
assimilable à la critique d’Israël
selon Manuel Valls pour qui la
« haine du juif » se nourrit de
l’antisionisme.
Dominique Reynié, politologue
assermenté au micro de France-Inter
identifiait même le Front de Gauche à un
« foyer d’expression de
l’antisémitisme ». Les électeurs de
Marine Le Pen et les Français musulmans,
victimes de la politique mondialiste du
gouvernement socialiste, étaient pour
l’occasion mis dans le même sac. Et sans
surprise, la réponse consistant une fois
de plus à museler Internet, en
particulier les réseaux sociaux et les
plateformes de partage de vidéos où « se
retrouvent ces publics-là ».
Outre une réduction drastique de la
liberté d’expression publique, cette
chasse aux sorcières aura pour
conséquence de banaliser l’antisémitisme
en l’assimilant de facto à une
simple critique du système dominant.
Dénoncer la main-mise de la finance
internationale sur l’économie française,
contester le pouvoir des banques, ou
encore défendre la cause des peuples
opprimés par l’impérialisme sioniste ou
étasunien vaut excommunication. Le vrai
antisémitisme est très minoritaire en
France comme
le montrent les études d’opinion
mais il pourrait bien se développer à la
faveur de ces campagnes à répétition qui
visent à criminaliser l’expression
d’opinions ou d’analyse dissidentes et
qui finiront à force de durcissements
par ne laisser au citoyen que deux
options : se soumettre ou devenir un
délinquant d’opinion.
Voir également : un
entretien à propos de mon dernier
ouvrage « La
République contre les libertés »
Publié le 25 février 2015 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
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