Syrie
Syrie : Le hurlement des loups…
Bassam Abou-Abdallah
Lundi 24 juillet 2017
Dans la région, nous n’entendons
plus que le hurlement des loups : le
Qatari accuse le Saoudien de comploter
pour renverser le régime des Al-Thani,
le Saoudien accuse le Qatari de
comploter pour renverser le régime des
Al-Saoud et déstabiliser le royaume,
l’Émirati accuse le même Qatari de
travailler à saper sa propre stabilité…
Tous
complotent contre tous, au point où vous
ne pouvez même plus distinguer les loups
qui hurlent le plus.
Ainsi,
Ibrahim Karagül se demande dans un
article du quotidien « Yeni Safak »,
porte-parole du parti au pouvoir en
Turquie, quelle serait la relation entre
la crise qatarie et le coup d'État
manqué du 15 Juillet 2016 visant à
renverser le président turc Recep Tayyip
Erdogan, tout en accusant Mohammed ben
Zayed, le prince héritier d’Abou Dabi,
d’avoir financé cette « sale
tentative » via l’homme d’affaires
Mohammed Dahlane décrit comme un agent
du Mossad et de la CIA.
Soutenant que
les Émirats ont transmis 3 milliards de
dollars au groupe de Fethullah Gülen
pour mener à bien le coup d’État,
Ibrahim Karagül insiste sur leur
responsabilité dans cette affaire et sur
le droit des Turcs de poursuivre en
justice tous ceux qui ont financé et
soutenu cette tentative menée par
collaboration entre les Émirats arabes
unis et les services secrets égyptien et
israélien, lesquels planifieraient des
opérations terroristes contre la Turquie
par l’intermédiaire de l’organisation
terroriste Daech. Il conclut en
décrétant, d’ores et déjà, leur pleine
responsabilité pour toutes les « sales
opérations terroristes » qui se
produiraient à l’avenir dans n’importe
quelle ville turque !
Qui suit les
médias des États agresseurs de la Syrie
reste stupéfait et circonspect devant
l’inimaginable prose de ceux-là qui, de
l’aveu même de l’ex-ministre qatari des
Affaires étrangères, Hamad bin Jassem,
collaboraient dans une même cellule
d’opérations au nord et au sud de la
Syrie pour tenter, avec la coopération
d’Israël, de la détruire, de détruire
son rôle régional et de mettre fin à son
rôle de pivot au sein de l’Axe de la
Résistance.
Ce qui est
tout aussi curieux est de constater
qu’Israël coopère avec le Qatar contre
l'Arabie saoudite et les Émirats arabes
unis, et coopère avec l’Arabie saoudite
et les Émirats contre le Qatar et la
Turquie ; soutient Barzani dans son
projet séparatiste de partition de
l’Irak, et soutient les organisations
terroristes armées en Syrie. Il est le
Joker qui les utilise tous en fonction
de ses intérêts, sans jamais se soucier
de qui conspire contre qui. Bien au
contraire, il aide chaque partie contre
l’autre selon le célèbre principe :
« diviser pour régner ».
Le seul
bénéficiaire de ce qui s’est passé et de
ce qui se passe actuellement dans notre
région est l’entité israélienne,
laquelle ne dissimule plus son
acharnement à judaïser Jérusalem,
détruire la mosquée d’Al-Aqsa, liquider
la question palestinienne devenue pour
les loups de la région un fardeau dont
il faudrait se débarrasser par n’importe
quel moyen, afin que la situation leur
devienne propice pour affronter de
nouveaux ennemis imaginaires, se battre
contre des moulins à vent, et comploter
les uns contre les autres.
Le plus paradoxal est que pendant qu’Al-Aqsa subit les violations israéliennes, le Serviteur des deux Lieux saints de l’Islam se comporte en sourd-muet, imité en cela par la Fédération mondiale des oulémas musulmans dirigée par Yusuf al-Qaradawi, trop occupé par l’agression saoudienne portant préjudice à l'indépendance et aux politiques régionale et internationale du Qatar ; alors, qu’en Syrie, les différentes organisations islamisées pour la forme et « israélisées » dans le fond, sont occupées à se liquider les unes les autres.
Il est
indubitable que les peuples de notre
région passent d'une catastrophe à une
autre et subissent les effets de crises
profondes, notamment celle qui résulte
de l’instrumentalisation de l’Islam par
les forces ennemies cherchant à dominer
la région en le transformant en une
sorte de bagage personnel de tel ou tel
dirigeant, de tel ou tel régime
politique. C’est ainsi
que l’Arabie saoudite cherche à cacher
ses crimes dans la région sous le
couvert de l’Islam ; exige de ses sujets
qu’ils se taisent sur les injustices
socio-économiques au nom de l’Islam ;
détruit le Yémen sous le slogan que les
résistants sont des renégats de
l’Islam ; attaque le Qatar sous le
prétexte que les Al-Thani ne sont pas
des descendants des wahhabites
[pourtant, le Qatar est un État
incontestablement wahhabite ; NdT] et
que son alliée, la Turquie, n’est pas
une référence islamique comparable à la
sienne ; attend de tous les Musulmans
qu’ils s’agenouillent devant Netanyahou,
juste parce que telle est la vision de
la sagesse politique dudit Serviteur des
deux Lieux saints de l’Islam, tout comme
la vision de son héritier Mohammed bin
Salmane pour l’an 2030 est purement liée
à l’Islam…
La vérité est
que le conflit s’est transformé en une
lutte entre deux axes pour la direction
du monde musulman : l’axe wahhabite et
l’axe des Frères Musulmans regroupant le
Qatar et la Turquie. Un monde musulman
éreinté par les guerres, détruit, loin
du développement et du progrès.
Reste à
savoir si la résilience des Syriens,
leur patience, le sang de leurs martyrs
et les douleurs de leurs blessés auront
raison des illusions et de l’arrogance
de ceux-là qui n’ont fait que comploter.
Oui, dans la
région, nous n’entendons plus que le
hurlement des loups qataris, saoudiens,
turcs, émiratis, et surtout israéliens.
Des hurlements qui suggèrent la fin
d’une étape et le début d’une autre :
celle de la victoire historique de la
Syrie et de ses alliés.
Une victoire
qui nous mettra face à d’énormes défis
comparables à ceux que nous avons
affrontés tout au long de l’agression.
Défis qui exigent des responsables
dévoués au service du peuple et de la
nation, du travail, de la créativité, de
l’excellence, en sachant que notre
effort principal doit porter sur
l’intérieur du pays, lequel constitue le
pilier de toute nouvelle politique
étrangère tenant compte de toutes les
variables et nécessaires modifications.
En effet,
l’essentiel est à l'intérieur, parce que
comme l’a dit le président Al-Assad :
« Si l’enceinte de notre maison avait
été solide, forte, solidaire, et que la
corruption et la trahison n’avaient pas
frappé certains de ses recoins, les
choses ne seraient pas arrivées là où
elles sont ».
Par
conséquent, quand nous commencerons à
entendre les hurlements des loups de
l'intérieur, nous saurons que nous
avançons dans la bonne direction.
Voici venu,
le temps du hurlement des loups…
Bassam
Abou Abdallah
Professeur de
relations internationales à l'Université
de Damas
20/07/2017
Texte
traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Source : Al-watan
(Syrie)
http://alwatan.sy/archives/112088
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