Interview
Étienne Chouard : «Les Gilets Jaunes
constituants lancent un appel à toute
l’humanité.»
Mohsen Abdelmoumen

Etienne Chouard. DR.
Mercredi 9 janvier 2019 English version here
Mohsen
Abdelmoumen : Dans votre
livre manifeste très percutant « Nous
ne sommes pas en démocratie ! »,
vous faites un constat pertinent.
N’est-ce pas plutôt une ploutocratie ?
Etienne Chouard :
Oui, tout-à-fait. Nous sommes en
ploutocratie et cela depuis deux cents
ans, depuis les révolutions anglaise,
américaine, française, depuis
l’avènement du gouvernement
représentatif qui désigne les acteurs
politiques par la procédure de
l’élection parmi des candidats qu’on
peut aider. Cette procédure, puisqu’on
peut aider, donne tout le pouvoir – car
quand on a gagné les élections on exerce
tout le pouvoir pendant le mandat – à
ceux qui ont le plus les moyens d’aider,
c’est-à-dire les plus riches.
Que voulez-vous
dire par « aider » ?
Aider en achetant
les journaux qui vont montrer les
candidats, très souvent et sous un jour
flatteur, aider en achetant les
télévisions et les médias qui vont
parler d’eux. Il est intéressant de
signaler la concordance exacte entre les
courbes des chiffres des passages à la
télévision et des chiffres des
élections. En fait, les courbes sont
identiques. Les deux partis où ces
courbes ne sont pas tout-à-fait
identiques, parce qu’ils ont beaucoup de
militants, ce sont les partis de
Mélenchon et Le Pen, mais pour tous les
autres partis, les résultats aux
élections dépendent rigoureusement du
temps de passage à la télévision.
L’information télévisuelle s’alimente
par les journaux : il n’y a pratiquement
pas – ou alors très peu – de
journalistes de terrain à la télévision,
en fait, les télés reprennent le plus
souvent ce qu’il y a dans les journaux.
Or, en France, les riches ont acheté
tous les journaux, il y a neuf
milliardaires qui ont acheté tous les
journaux papier du pays. Je ne parle pas
d’internet où il reste des journalistes
libres. Mais le gros de la population ne
regarde pas internet, la plupart des
gens ne sont pas politisés et regardent
la télévision, qui est le reflet de ce
qu’il y a dans les journaux qui, eux,
reflètent la pensée des milliardaires.
C’est très grave, parce qu’au lieu que
l’opinion soit éclairée par les
journalistes, elle est déformée et pas
informée. Ce qui est très problématique
parce qu’une démocratie demande que les
citoyens soient éclairés. Les vrais
journalistes sont les sentinelles du
peuple.
Comment
analysez-vous le mouvement des Gilets
Jaunes ?
De mon point de
vue, les Gilets Jaunes sont en train de
faire ce que toute la société devrait
faire. Ce sont eux qui commencent parce
qu’ils sont les exploités, ce sont eux
qui gagnent le moins, qui ont le plus de
difficultés à vivre, et les autres qui
gagnent juste un peu plus, qui savent
bien que bientôt ils seront dans la même
précarité, à mon avis, si tout se passe
logiquement, les non-Gilets Jaunes vont
bientôt rejoindre les Gilets Jaunes
parce qu’ils savent qu’ils sont menacés
eux aussi de déclassement, et que ce
sont ces extrêmes difficultés à vivre
qui jettent hors de chez eux les Gilets
Jaunes et les entraînent dehors.
Ces Gilets Jaunes
sont exemplaires à plusieurs titres.
D’abord, ils sortent de chez eux comme
nous devrions sortir de chez nous et se
retrouvent sur des lieux publics comme
nous devrions nous retrouver sur des
lieux publics, et ils y restent de façon
opiniâtre comme nous devrions y rester
de façon opiniâtre, malgré le froid,
malgré le vent, malgré la pluie. C’est
totalement inédit. D’habitude, les
mouvements sociaux se passent au
printemps. Là, malgré la tourmente, ils
sortent de chez eux, ils restent
au-dehors et ils font société. Ils
construisent des cabanes, ils aménagent
des lieux où ils se préparent des repas
chauds et des boissons chaudes, ils se
font des cadeaux, ils refont une
société. Ils sortent de chez eux où ils
avaient honte d’être pauvres. Cette
honte disparaît quand ils s’aperçoivent
qu’ils sont très nombreux, et la honte
se transforme en colère. C’est ce que
nous devrions faire.
Et ce n’est pas
tout, le plus important c’est qu’ils
sont dégoûtés par des décennies de
mensonges des politiciens, qu’ils soient
de « gauche » ou de « droite » ou du
« centre ». Complètement dégoûtés
par les politiciens, ils arrivent sur
les ronds-points avec une détestation de
la représentation. Ils ne veulent pas de
représentants, ils ne veulent pas
entendre parler de politique. À mon
avis, quand ils disent cela, ils parlent
des politiciens, et ils ne se rendent
pas compte que leur geste est
extrêmement politique au meilleur sens
du terme. Ce que font les Gilets Jaunes
n’est pas politicien ; ils s’occupent de
ce qu’il faut faire, ce que nous
devrions faire dans la société. Ils
savent bien qu’il y a des gens de gauche
et de droite parmi eux et ils font très
attention à ce qu’on ne le dise pas, que
personne n’ait un drapeau ou un étendard
de gauche ou de droite à brandir. Ceci
est décisif. C’est ça qui est
historique, c’est un mouvement unitaire.
Ce qui empêche le peuple de gagner, ce
sont les divisions, c’est la zizanie sur
des sujets législatifs, sur des sujets
sur lesquels nous sommes habitués à
discuter alors que nous n’avons aucune
puissance de décider. Ce n’est pas nous
qui décidons, ce sont les élus. Nous
avons l’habitude de nous disputer pour
rien car, de toutes façons, ce n’est pas
nous qui décidons. D’après ce que j’ai
compris, l’idée des Gilets Jaunes,
c’est : pas de zizanie, nous restons
unis.
En outre, très
rapidement, en à peine une semaine, ils
ont produit une liste de doléances. Des
doléances, ce sont des requêtes auprès
d’un maître, des demandes faites par un
être inférieur envers un être supérieur,
parce que c’est ça finalement, il y a
les êtres supérieurs qui sont les élus
et les êtres inférieurs qui sont les
électeurs. Ce n’est pas dit pour être
humiliant, c’est la réalité. Habitués à
cette situation de soumission, les
électeurs par rapport aux élus, comme
tous les peuples du monde au moment où
ils se révoltent, réclament des
décisions de niveau législatif (que je
distingue du niveau constituant) telles
que « nous voulons de meilleurs
salaires, nous voulons moins d’impôts,
nous voulons moins de gaspillages, moins
de privilèges des élus, etc. »
Leurs revendications sont bien formulées
et elles sont de niveau législatif,
c’est-à-dire que pour qu’elles soient
satisfaites, il faut que nos maîtres y
consentent. Il est évident que les
maîtres, les élus, ne vont pas tout
donner, ce sont eux qui nous ont privés
de tout cela, ce n’est pas pour nous les
donner à la première manifestation
venue. Ils vont nous concéder une ou
deux choses sur quarante, mais
certainement pas les quarante.
Et, deuxième point
historique majeur, les gilets jaunes ne
listent pas que des doléances : chaque
fois qu’il y a des révoltes sur terre,
les exploités réclamant de nouvelles
lois moins cruelles pour eux ; cela,
c’est ordinaire. Mais ce qui est
extraordinaire, c’est que dans la liste
des doléances, il y a une espèce de
pierre précieuse, comme une étoile dans
le ciel, qui s’appelle le Référendum
d’Initiative Citoyenne (RIC). Pourquoi
est-ce très précieux ? C’est parce que
ce n’est plus du tout législatif, c’est
constituant. Il ne s’agit pas de dire
« voilà une loi que nous voulons », il
s’agit de dire « voilà comment nous
voulons écrire les lois nous-mêmes ».
C’est extrêmement subversif. Quand j’ai
vu cela, j’ai compris que c’était
quelque chose de très important et je
leur ai dit : « cette ligne-là, dans vos
doléances, est tout-à-fait différente de
tout le reste. Si on obtient ça, on aura
tout le reste. C’est-à-dire que nous
aurons les moyens de voter nous-mêmes
les lois que nous trouverons
importantes. » Ce point mérite donc d’en
faire une priorité parce que, si on
demande quarante choses ou soixante
choses différentes, même si nous sommes
très nombreux, la force exercée sur
chaque doléance est faible, notre force
étant répartie sur chacun de ces points.
Et il suffira aux élus de nous accorder
deux ou trois de ces requêtes pour se
débarrasser de nous et nous faire
rentrer chez nous. Au lieu de cela, si
nous transformons ces quarante ou
soixante requêtes en deux requêtes, une
sur le Référendum d’Initiative Citoyenne
qui nous donnera accès à tout le reste,
et la deuxième portant sur un aspect
financier bien ciblé (pour que les plus
pauvres cessent tout de suite de tant
souffrir), si on concentre nos efforts,
donc, on aura plus de force pour
l’emporter.
D’abord, ils ont
demandé une augmentation du salaire
minimum, mais cela aurait l’inconvénient
de couler les PME car les toutes petites
entreprises ne peuvent pas supporter une
augmentation du SMIC (salaire minimum
garanti) à 1300 ou 1500 euros. Ils ont
donc transformé leur requête. Il faut
savoir qu’il y a des gens qui sont dans
une situation très cruelle et qui ont
faim aujourd’hui, il y a donc une
urgence sociale, et pour que les gens
cessent d’avoir faim, on peut augmenter
les revenus mais on peut aussi diminuer
de moitié le prix de tous les produits
de première nécessité, qui constituent
100% de leur panier. L’idée, c’est que
les Gilets Jaunes établissent une liste
des produits de première nécessité : les
produits alimentaires, les produits
vestimentaires, les produits sanitaires,
les médicaments, les produits du
logement, les produits de l’énergie,
l’électricité, de quoi se chauffer, etc.
Il faut donc faire la liste des produits
de première nécessité et ne demander que
ça, la baisse de leurs prix, pour
l’obtenir. Il faut demander que l’État
supprime sur ces produits toutes les
taxes et tous les impôts éventuels et,
comme ça ne suffit pas pour baisser
beaucoup les prix, demander que l’Etat
subventionne les prix pour, finalement,
les diminuer de moitié. Parce que, comme
ces produits constituent la totalité du
panier des pauvres gens, si on diminue
ces prix de moitié c’est comme si on
avait doublé leur salaire. Et pour
chiffrer cela, il faudrait que les
économistes – et pas les « économistes »
employés de banque qui nous condamnent à
l’austérité – mais de vrais économistes
amis du peuple comme les
Économistes Atterrés, calculent le
coût global approximatif de la
subvention de l’État applicable à tous
les produits de première nécessité. Il
faut ensuite trouver les moyens de
financer cette mesure, comme par exemple
supprimer le CICE (crédit d’impôt pour
la compétitivité et l’emploi) pour
récupérer déjà les 40 milliards de
cadeaux inutiles faits aux riches. C’est
facile de trouver les quelques milliards
qui vont être nécessaires pour permettre
aux pauvres de moins souffrir.
Et donc, l’idée des
Gilets Jaunes, c’est devenu non
seulement de repérer le RIC dans leur
liste de doléances, mais en plus d’en
faire une priorité, et que tous les
Gilets Jaunes et, j’espère, bientôt les
non-Gilets Jaunes, pousseront tous
ensemble deux requêtes décisives pour
que cesse la misère des pauvres et pour
que vienne enfin la puissance populaire
avec le référendum, pour perforer le
système de domination. C’est très
spectaculaire qu’ils soient arrivés à
faire ça. Ils sont déjà en train de se
concentrer sur le RIC, c’est tout-à-fait
magnifique : les Gilets Jaunes ont
compris cette idée à toute vitesse et
elle se répand très très vite. Quand je
leur dis « si vous n’avez pas le RIC,
c’est parce que ceux qui écrivent les
Constitutions ont un intérêt personnel à
ce que vous ne l’ayez pas. Vos maîtres,
nos maîtres, nos élus, ne veulent pas
que nous ayons le RIC. Ils veulent
tout décider et ils ne le donneront
jamais. » Et donc, les Gilets Jaunes
sont déjà en train de faire les ateliers
constituants pour écrire eux-mêmes les
règles du RIC :
Exemple
d’article de constitution
d’origine populaire instituant
un vrai RIC
(proposition d’ÉC,
source)
|
Notez
ici vos idées personnelles,
puisque vous aussi, Humain, vous
êtes invité à constituer avec
les #GiletsJaunesConstituants
|
Article
3 proposé :
La
souveraineté nationale
appartient au peuple qui
l’exerce par ses représentants
et par la voie du référendum
d’initiative citoyenne, en
toutes matières y compris
constitutionnelle et de
ratification des traités ; cet
article ne peut être modifié que
par voie référendaire.
Article
11 supprimé et remplacé par :
Article 11
proposé : MODALITÉS PRATIQUES du
RIC :
SEUILS DE
DÉCLENCHEMENT :
–
La Chambre des référendums
(tirée au sort) organise le
planning des référendums et
contrôle les débats
contradictoires (la mise en
scène des conflits) avant tout
référendum, sur le site des
référendums et sur la télévision
des référendums, pour éclairer
l’opinion pendant au moins 6
mois avant le vote. Deux fêtes
des référendums sont organisées
chaque année, le 4 février et le
4 août, fériés, chômés et
payés.
–
Toute initiative collective
regroupant l’appui de 1% des
inscrits (400 000 électeurs) [ou
0,5%] entraîne son inscription
automatique (sans filtre) sur le
calendrier des référendums, au
moins 6 mois plus tard.
–
Initiative individuelle
filtrée par la Chambre : un
citoyen seul peut présenter une
initiative devant la Chambre des
référendums, qui lui doit une
heure d’audience (ou davantage
si la Chambre le juge
nécessaire) pour expliquer son
idée. Cette Chambre décide alors
soit de rejeter l’initiative
individuelle, soit de l’inscrire
au calendrier des référendums.
–
Initiative individuelle par
cercles croissants : tout
citoyen peut, par ses propres
moyens, consulter ses
concitoyens.
• Si
l’échantillon consulté (plus de
1000 personnes sur une même
localité, village, rue…) est
favorable à l’initiative, la
municipalité ou les
municipalités des citoyens
consultés doivent organiser
rapidement un référendum
municipal.
• Si
le référendum municipal est
favorable à l’initiative, le
département dont dépend la
municipalité doit organiser
rapidement un référendum
départemental.
• Si
le référendum départemental est
favorable à l’initiative, la
nation (ou la confédération)
doit organiser un référendum
national (ou confédéral).
•
Tout résultat défavorable avant
d’atteindre l’échelle
confédérale met fin à la
progression de l’initiative.
DÉLAIS ET
ORGANISATION DE DÉBATS
CONTRADICTOIRES pour éclairer
l’opinion avant le vote :
–
Tout référendum doit être
précédé d’une période d’au moins
6 mois de débats contradictoires
complets, pour éclairer
l’opinion. La Chambre des
référendums est chargée de
l’organisation et du contrôle de
la qualité de ces débats.
–
L’opinion des citoyens doit être
honnêtement et complètement
éclairée en toute circonstance.
Dans ce but, tous les médias
du pays (journaux, radios,
télévisions, agences de presse,
instituts de sondage et de
statistiques) doivent appartenir
à leurs journalistes et employés
du moment. Aucune personne,
physique ou morale, ne peut
acheter un média quel qu’il
soit. Les actuels propriétaires
des médias doivent les céder
gratuitement à leurs employés.
La Chambre des médias (tirée au
sort) veille à l’application de
ces règles.
FORCE
CONTRAIGNANTE AUTOMATIQUE ET
ABSENCE D’« ORGANES DE CONTRÔLE
» (« Cour suprême » ou autre
« Conseil constitutionnel »
oligarchique et démophobe) :
–
Une fois l’initiative
populaire votée à la majorité,
la Chambre des référendums
contrôle l’honnêteté des
scrutins et doit déclarer la
décision prise, sans qu’aucun
organe ne puisse s’opposer à la
volonté populaire.
–
Une décision prise par RIC
est supérieure à toute autre
norme : règlements, lois,
constitution ou traités ; en
France, le peuple est souverain,
vraiment.
|
|
C’est tout-à-fait
historique. Les #GiletsJaunesConstituants
se passent le mot entre eux, ils savent
que les riches et les élus mentent quand
ils disent qu’ils vont leur donner un
RIC, et qu’ils vont leur donner un
faux RIC, et ils sont déjà en train
d’écrire le RIC qu’ils veulent,
c’est-à-dire un RIC en toutes matières,
sans garde-fou, sans limite, sans
interdit et on pourra, par ce RIC,
imposer une loi en toutes matières,
abroger une loi ou un traité en toutes
matières, on pourra révoquer un acteur
politique jusqu’au président de la
République, n’importe quel acteur
politique ou n’importe quel
fonctionnaire, n’importe quel acteur
public pourra être révoqué par le
référendum d’initiative citoyenne, et
puis la Constitution elle-même pourra
être modifiée. Il ne faut pas que le
Conseil constitutionnel qui est un
organe oligarchique et composé d’une
bande de vieux grigous corrompus jusqu’à
la moelle (le CC reçoit les
multinationales en secret —
scandale des « portes étroites » —
et bloque désormais toutes les lois
d’intérêt général contre les cartels) il
ne faut pas, donc, que le Conseil
constitutionnel puisse se mettre en
travers de la souveraineté populaire. Il
n’est pas question qu’un Conseil
constitutionnel composé de qui que ce
soit – pour l’instant ce sont de vieux
oligarques ou des vieux présidents de
chambres élues, c’est vraiment n’importe
quoi – entrave la souveraineté
populaire. Le Conseil constitutionnel
n’a aucune légitimité politique. Il a
été imposé par une anti-Constitution qui
a été votée sous la menace militaire
d’un coup d’État. Je vous rappelle que,
quand de Gaulle a fait voter la Ve
République, c’était sous une menace de
putsch militaire qui grondait en Corse
par des parachutistes. L’institution du
Conseil constitutionnel, par sa
composition même, est illégitime. Ça
peut faire l’objet d’un débat mais je
peux vous dire que ce sont des
discussions qui circulent chez les
Gilets Jaunes.
Donc, il est
question d’instituer la souveraineté
populaire, la vraie, sans chaînes
oligarchiques, et c’est tout-à-fait
révolutionnaire. C’est même davantage
que « révolutionnaire » parce que faire
une révolution, c’est faire un tour
complet, donc on revient au point de
départ et en fait, on a seulement changé
de maîtres, la plupart du temps. La
plupart des révolutions ne débouchent
pas sur une émancipation. Il s’agit donc
ici plutôt d’évolution que de
révolution, et d’une vraie évolution,
processus « évolutionnaire » majeur dans
l’histoire de l’humanité. Les humains,
donc les Gilets Jaunes constituants et
bientôt les autres, ceux qui les
regardent et qui voient que ça marche,
sont en train de trouver une cause
commune et c’est ça qui manque à
l’humanité depuis toujours : une cause
commune, c’est-à-dire qui dépasse les
clivages gauche-droite actuels. La cause
commune des êtres humains, c’est :
« nous voulons instituer nous-mêmes
notre propre puissance ». Ça va tout
changer ! Sur la planète Terre, si les
humains prennent conscience de cette
cause commune, il n’y a plus de place
pour les tyrans dans un peuple devenu
constituant, vigilant. Les humains
savent très bien se débarrasser des
tyrans pourvu qu’ils s’en occupent.
C’est parce que nous démissionnons de ce
processus constituant que les tyrans
prennent la place. Ils ne sont grands
que parce que nous sommes à genoux.
C’est peut-être ce qui est en train de
changer, les Gilets Jaunes sont en train
de se relever, je l’espère.
On remarque que
les Gilets Jaunes se sont inspirés de
vos idées : démocratie directe,
référendum d’initiative citoyenne, etc.
Étienne Chouard a-t-il été un
visionnaire ? Conseillez-vous les Gilets
Jaunes ?
J’en parle tous les
jours et ça circule beaucoup. Cela fait
treize ans que je travaille là-dessus,
treize ans que je dis que « ce n’est pas
aux hommes au pouvoir d’écrire les
règles du pouvoir ». Mais le référendum
d’initiative populaire, Condorcet le
décrivait déjà. Donc, c’est Condorcet
qui était visionnaire quand il
défendait, au XVIIIe siècle, pendant la
Révolution française, le référendum
d’initiative populaire. Et c’est Thomas
Paine qui, au XVIIIe siècle aussi (dans
« Les droits de l’Homme », chapitre 4
« Des constitutions ») était visionnaire
en martelant que la constitution ne peut
en aucun cas être un contrat entre
représentés et représentants, mais
exclusivement entre représentés ! Vous
ne pouvez pas mettre une évolution aussi
profonde que le RIC au crédit d’une
seule personne, c’est collectif.
Les idées appartiennent à ceux qui s’en
emparent. Ce qui se passe, c’est qu’il y
a surtout, il me semble, une nouveauté
dans l’histoire des idées : la connexion
des humains grâce à l’internet fait de
chaque humain actif un neurone. Cela
nous permet de nous organiser comme si
nous étions un cerveau collectif, ce
qu’on ne pouvait pas faire jusqu’ici.
Auparavant, ce
n’était pas possible de communiquer
aussi vite entre un aussi grand nombre
de personnes. Finalement, les mouvements
d’émancipation qui ont déjà existé, les
anarchistes, les démocrates, les
penseurs, restaient très isolés et se
faisaient massacrer par les bourgeois
dès qu’ils étaient repérés. Une fois que
les avant-gardes, les gens qui avaient
trouvé des solutions, étaient
assassinés, il fallait attendre des
générations pour que de nouveaux jeunes
gens lisent leurs bouquins et reprennent
leurs idées, ce qui ralentissait
beaucoup le mouvement. Ce qui se passe
aujourd’hui, c’est que notre inter
connectivité permet à une ou plusieurs
idées de se répandre à toute vitesse
comme dans un cerveau et le niveau monte
très très vite parce que nous nous
passons le mot grâce à notre inter
connexion, ce qui est tout-à-fait
enthousiasmant. Cela empêche les riches
de tuer les meneurs, car s’ils tuent
certains meneurs, il reste beaucoup de
meneurs un peu partout… Actuellement, il
y a déjà plein de gens qui sont capables
de prendre la relève pour défendre le
RIC et l’idée d’un processus constituant
populaire.
Le chant des
partisans, d’une certaine façon.
Ah, oui, c’est un
beau chant. Oui, c’est ça. Quant à
savoir si je suis visionnaire, je ne
dirais pas de moi une chose pareille,
évidemment.
Ne pensez-vous
pas que la Ve République en
France est à bout de souffle ?
Oui, sûrement, du
fait, d’abord, de la prise de conscience
générale de l’escroquerie parlementaire,
mais aussi parce que ce texte a été
écrit par des gens qui sont tous morts
depuis longtemps. Et ceux qui l’ont voté
aussi sont tous morts, ou presque. Et
Condorcet, encore lui, disait bien
qu’une génération ne peut pas assujettir
à ses lois les générations futures. Une
génération, celle de 1958 qui a soixante
ans, ne peut pas asservir à ses idées et
principes les générations futures. Ils
sont morts, qu’ils nous foutent la
paix ! C’est à nous d’écrire un nouveau
contrat social, le nôtre, et on n’a rien
à dire sur ce qui se passera dans
cinquante ans : nos enfants décideront
eux-mêmes à leur tour, souverainement.
Nous sommes légitimes à contester le
contrat social écrit par nos
grands-parents, et à en écrire un autre.
Et à mon avis, on n’écrira pas une 6ème
République, nous sommes partis pour
écrire une 1ère Démocratie.
Le mouvement des
Gilets Jaunes est en train de se
répandre dans toute l’Europe. D’après
vous, sommes-nous dans la phase du
réveil des peuples ?
Le fait que ça se
passe partout de la même façon allume
dans ma tête des « Warning », des
alertes. Je trouve que tout ça ressemble
à une « révolution de couleur ». Ce
genre de « révolution » financée par des
milliardaires…
Comme Soros, par
exemple.
Oui, Soros, mais ce
n’est pas le seul à mon avis. Donc, des
milliardaires qui veulent se débarrasser
d’un régime ou d’un gouvernement
résistant au mondialisme et qui ne se
laisse pas faire, protégeant sa
souveraineté. Ces gouvernements sont
renversés par des populations qu’on a
énervées, excitées, qu’on a aidées, et
le résultat est chaque fois un chaos
et/ou une tyrannie pire encore
qu’auparavant.
Comme on a vu
dans les « printemps arabes ».
Exactement. Comme
on a vu dans les printemps arabes ou à
Kiev, ou en Syrie. À chaque fois, il y a
un carburant. Les révolutions colorées
ne sont pas inventées de toutes pièces,
elles s’alimentent sur un carburant de
malheurs qui fait que les peuples sont
prêts à se soulever. Et on les aide, de
l’extérieur et en douce. Et ce n’est
certes pas par philanthropie. J’ai une
crainte, et je ne dis pas que c’est le
cas, je n’en sais rien, mais j’ai des
« warning » qui s’allument, il faut
mettre tout cela au conditionnel, c’est
vrai que c’est possible. Mais, à mon
avis, si les mondialistes sont en train
d’exécuter un plan de ce type, ils n’ont
pas prévu que nous devenions
constituants… Ça complique
considérablement leurs manipulations, à
mon avis. Car si nous devenons
constituants, donc vigilants, nous
sommes beaucoup moins manipulables, il
me semble. Donc, si on s’apercevait
qu’il s’agit d’une manipulation, ce ne
serait pas une raison pour renoncer à se
bagarrer.
Certains Gilets
Jaunes veulent participer aux élections
européennes. Ne pensez-vous pas que
faire des listes aux élections
européennes est dangereux pour le
mouvement ?
Oui, tout-à-fait.
Mais à mon avis, on ne pourra pas les en
empêcher. Donc, on s’en fout, il n’y a
qu’à les laisser faire, s’il y en a qui
veulent le faire, qu’ils le fassent. De
toutes façons, depuis le début, chaque
fois qu’il y a des représentants qui
surgissent et qui parlent au nom du
mouvement, il y a de nombreux Gilets
Jaunes qui s’insurgent un peu partout
pour dire qu’ils ne connaissent pas ces
gens-là, qu’ils n’ont pas de
représentants, et ils continuent à faire
comme si de rien n’était. Donc, en fait,
il n’y a pas de souci à se faire au
sujet du Parlement européen : oui, il y
a peut-être des Gilets Jaunes qui vont
présenter une liste aux élections, on
s’en fout, de toute façon, les élections
européennes servent à élire un Parlement
qui n’a aucun pouvoir et qui ne sert à
rien. En plus, il s’agit encore une fois
de désigner des maîtres parmi des
candidats qu’on peut aider… ce n’est pas
comme ça qu’on va s’émanciper.
À quoi jouent
les médias mainstream en voulant
stigmatiser les Gilets Jaunes en les
traitant de violents, d’antisémites,
etc. ?
Ça, c’est très
important. Je pense que le message que
portent les Gilets Jaunes, qui veulent
instituer leur propre puissance avec un
référendum d’initiative citoyenne en
toutes matières écrit par eux-mêmes, est
extraordinairement subversif et
puissant. Il sera très difficile aux
voleurs de pouvoir (le gouvernement et
les élus) et aux voleurs de parole (les
prétendus journalistes qui ne sont pas
du tout des journalistes mais des
propagandistes, la voix des
milliardaires), d’argumenter sur le
message, parce que ça se verra tout de
suite que ce sont des voleurs de pouvoir
et des ennemis du peuple. Comme ils ne
peuvent pas se battre contre le message
qui est trop fort pour eux et que ce
sont des lâches, ils s’en prennent aux
messagers. Ils calomnient, ils mentent,
en essayant de discréditer les
personnes, pour se dispenser de parler
du contenu. Mais si vous regardez les
commentaires, en- dessous des
publications des voleurs de parole, vous
voyez bien que les lecteurs ne sont pas
dupes. La défiance par rapport aux
prétendus « journalistes » est immense.
On l’a vu avec
leur manifestation devant les médias à
Paris.
À mon avis, les
gilets jaunes devraient faire attention,
parce que des actions violentes trop tôt
peuvent tuer le mouvement. L’extrême
hostilité des médias par rapport aux
Gilets Jaunes et la malhonnêteté des
élus et du gouvernement envers eux,
compte tenu de la puissance de leur
idée, devraient conduire les gilets
jaunes à faire avancer leur idée sans
tenir compte du tout des élus et des
journalistes : « On s’en fout,
disent-ils, on ne les lit même plus, on
n’a pas besoin d’eux pour préparer
l’auto-institution de la société. Nous
allons nous réinstituer nous-mêmes et
nous n’avons pas besoin de l’aide des
journalistes et des parlementaires. »
C’est très puissant, en fait. Il faut
juste que nous devenions nombreux, que
les non-Gilets Jaunes rejoignent les
Gilets Jaunes. Et la situation est
favorable, parce que 80 % des citoyens
sont, depuis des décennies, pour le
référendum d’initiative citoyenne. À
chaque fois qu’on les interroge par
sondage, les gens disent qu’ils
veulent le RIC. Donc, la population est
prête à suivre les Gilets Jaunes : s’ils
font du référendum d’initiative
citoyenne la requête principale, avec en
plus la diminution de moitié du prix des
produits de première nécessité, ce qui
va arranger tout le monde, la population
va plus facilement tomber d’accord. La
simplification des requêtes : 1) le
référendum d’initiative populaire en
toutes matières écrit par nous-mêmes, 2)
les produits de première nécessité
subventionnés dont le prix baisse de
moitié, c’est tellement simple et fort
que n’importe qui peut s’en faire
l’avocat et convaincre ses voisins pour
que le mouvement grandisse, et il n’y a
pas besoin d’apprendre l’argumentaire
pour les doléances en quarante points.
Il suffit de se concentrer sur deux
choses essentielles dont l’argumentaire
est simple et fort, et cela facilite
l’expansion de ces idées dans toute la
société.
Quand on voit le
traitement médiatique des différentes
manifestations des Gilets Jaunes, ne
peut-on pas dire que les médias
dominants ont perdu toute crédibilité ?
Oui, on peut dire
ça, bien sûr. Mais ça ne les empêche pas
de pérorer. Le problème pour eux, c’est
qu’on ne les lit plus. On sait que ce
sont des menteurs, on sait que ce sont
des escrocs, des voleurs d’argent
et des voleurs de pouvoir. On ne s’en
occupe plus, on est déjà en train
d’instituer le monde qui va les
remplacer. Ils n’ont plus de crédibilité
et ils n’en ont plus pour longtemps. Les
citoyens devenus constituants
institueront des médias indépendants des
puissants.
Les médias
alternatifs et les réseaux sociaux ont
constitué le fer de lance du mouvement
des Gilets Jaunes. Les peuples n’ont-ils
pas besoin de médias qui défendent leurs
intérêts face aux minorités
oligarchiques qui dirigent le monde ?
Ce qui est
étonnant, c’est que Facebook nous sert
de liant dans notre cerveau collectif.
En fait, Facebook joue le rôle d’un
service public. Cet outil qui
marchandise nos informations facilite en
même temps notre connexion politique.
D’ailleurs, c’est très problématique que
cet outil soit privé parce que si, du
jour au lendemain, Facebook ferme, nous
ne communiquerons plus aussi facilement.
C’est très hasardeux d’être dépendants
d’un objet de propriétaire et il faudra
sûrement que nous écrivions des articles
de Constitution, très vite, pour
instituer nous-mêmes un réseau social
public sous contrôle citoyen. Il faudra
créer un outil comme Facebook mais sans
les risques de coupure, de surveillance
ou de fraude.
Peut-on dire que
la bataille de l’information a été
gagnée par les Gilets Jaunes ?
Pas encore, parce
que nous ne sommes pas assez nombreux,
que c’est un mouvement naissant. Il y a
certaines batailles qui sont gagnées
mais gagner une bataille, ce n’est pas
gagner la guerre. La guerre des classes
a encore lieu, les riches sont encore
extrêmement puissants, ils sont
menteurs, ils sont manipulateurs, ils
deviennent ultra-violents quand leurs
privilèges sont menacés… Ce n’est pas
gagné du tout, la guerre des classes.
Non, la bataille de l’information n’est
pas encore gagnée. La plus grande partie
des électeurs, beaucoup de retraités, de
nombreuses personnes âgées, sont plantés
devant leur télévision, donc
complètement intoxiqués par la
télévision, et ils n’entendent dire que
des choses terribles sur le Gilets
Jaunes, et à force de répétition, ils
les croient. Cela fait beaucoup de
monde.
D’après vous,
quelles sont les perspectives de ce
mouvement ?
Je ne peux pas
prévoir l’avenir, je n’en sais rien.
Déjà, naguère, je savais qu’une chose
pareille arriverait mais je ne pensais
pas que ça arriverait de mon vivant. Je
ne savais pas quand ça arriverait et
c’est en train d’arriver, c’est vraiment
un cadeau d’anniversaire formidable.
Mais les riches sont retors, quand ils
voient qu’ils vont perdre leur pouvoir,
ils sèment le chaos, ils tirent dans le
tas, ils déclenchent des guerres, ils
déclenchent des pénuries, des blocus,
ils sont capables de tout pour nous
empêcher de nous émanciper. Il est bien
difficile de dire de quoi l’avenir sera
fait. Même si on perd, il s’est déjà
passé des choses incroyables, j’espère
que ça ira plus loin encore mais je ne
sais pas ce que l’avenir nous réserve.
Ce qu’on peut dire sur l’avenir, c’est
qu’il y a deux grands risques pour les
Gilets Jaunes :
Une des très
grandes forces est le côté unitaire du
mouvement, c’est ça qui permet de
gagner. Et le risque majeur, c’est donc
la zizanie. Que ça provienne d’un parti
d’extrême-gauche qui vienne « aider » le
mouvement et une fois qu’il est dedans,
se mette à dénoncer et chasser les gens
d’extrême-droite à l’intérieur, ou au
contraire, des gens d’extrême-droite qui
viennent « aider » le mouvement et puis,
un fois introduits, viennent dénoncer et
chasser les gauchistes à l’intérieur et
semer la zizanie, le risque c’est que
des mouvements politiciens –
l’extrême-droite et l’extrême gauche
sont souvent identitaires, ils détestent
les autres partis, en bloc – sèment la
zizanie. Le risque serait que les Gilets
Jaunes soient infiltrés puis manipulés
au point de se diviser.
Le deuxième risque,
c’est le pendant d’une qualité dont je
n’ai pas parlé jusqu’ici, c’est qu’il
est pacifique, et donc inattaquable au
fond. Sur les ronds-points, c’est
incroyablement chaleureux, fraternel, il
y a beaucoup de bonheur et c’est
vraiment sympathique. Une des faiblesses
du mouvement des Gilets Jaunes, c’est
qu’il se mette à trop ralentir les gens,
à les bloquer, à gêner tout le monde,
ou, encore pire, à casser. À ce
moment-là, ils ennuient beaucoup les
gens et, s’ils continuent à bloquer, ils
deviendront impopulaires. Mais ce choix
varie selon les Gilets Jaunes : il y en
a beaucoup qui réfléchissent à des
actions qui ne sont pas impopulaires et
qui pourtant sont très efficaces, comme
par exemple libérer les péages, rendre
l’autoroute gratuite, c’est tout-à-fait
populaire et ça ennuie fortement les
bonnes personnes, c’est-à-dire les
dominants, et cela renforce le
mouvement.
À chaque fois que
le mouvement monte à Paris, il y a des
risques de dérapage. Au début, c’était
vraiment très violent et il y avait un
risque de voir le mouvement dégénérer,
parce que si on devient trop violent,
c’est évident que le mouvement va
s’arrêter. Le pouvoir ne pourra pas
faire autrement, et il sera même
légitime à interrompre de force un
mouvement très minoritaire. Alors que,
quand il n’est pas à Paris, le mouvement
n’est pas concentré, il est disséminé,
il n’offre pas de prise. Des
ronds-points, des péages, il y en a
absolument partout dans le pays. Le
mouvement est complètement
insaisissable. Quand la police vient
pour chasser les Gilets Jaunes, ils
reviennent le lendemain, là ou ailleurs.
Et c’est comme ça partout dans le pays.
Ils sont insaisissables, ce mouvement
est d’une puissance inouïe. Si, au lieu
d’aller ralentir les autoroutes, au lieu
d’aller bloquer les routes, au lieu
d’aller empêcher les pauvres gens de
travailler, s’ils vont casser les pieds
aux médias pour délivrer leur message,
si les Gilets Jaunes vont libérer les
services publics et les autoroutes pour
les rendre gratuits, s’ils inventent des
actions qui sont utiles aux gens et ne
soient pas gênantes, alors le mouvement
va devenir de plus en plus fort et il y
aura de plus en plus de non-Gilets
Jaunes qui vont devenir Gilets Jaunes.
Il y a donc deux
grands risques : la violence et la
zizanie. Mais ils sont incroyablement
déterminés, ils se sont arrêtés une
semaine pour les fêtes et ils savent
très bien qu’ils vont se retrouver en
janvier malgré le vent ou la pluie, le
jour et la nuit. Pour moi, les Gilets
Jaunes sont des héros. Ils font ce que
nous devrions tous faire. Ils sont
héroïques et exemplaires.
Conseillez-vous
les Gilets Jaunes, vu votre expérience ?
Ce n’est pas mon
expérience. Je leur parle de mon
travail, de mes idées, et puis ils s’en
emparent. Ils ne s’en emparent pas tous,
et ne s’emparent pas de toutes mes
idées. Ils font leur choix. Et moi, je
m’inspire d’eux, je progresse grâce à
eux. On grandit ensemble, c’est un
cerveau collectif. C’est très
enthousiasmant, je peux vous dire… Enfin
le bien commun en ligne de mire…
L’expérience des
Gilets Jaunes ne doit-elle pas servir
d’exemple aux autres peuples pour
s’affranchir du 1% qui dirige le monde ?
Les Gilets Jaunes
constituants lancent un appel à toute
l’humanité. Les 99 % doivent s’emparer
de cette idée partout sur terre pour se
débarrasser des riches et des oligarques
du moment : « nous voulons instituer
nous-mêmes notre puissance politique ».
Oui, bien sûr, c’est un message pour
toute l’humanité. La grandeur de l’idée
des Gilets Jaunes constituants, c’est
qu’elle concerne tous les exploités.
Interview
réalisée par Mohsen Abdelmoumen
Qui est Etienne
Chouard ?
Professeur
d’économie et de droit, Étienne Chouard
est militant et blogueur politique
français. Lors du referendum de 2005, il
était l’une des figures de proue du Non
au Traité constitutionnel européen. Il
critique le système en place et milite
pour un changement de Constitution et
l’instauration d’une démocratie directe,
en appelant notamment à former
une Assemblée constituante tirée au
sort et à mettre en place le Référendum
d’Initiative Citoyenne (RIC). Il est
particulièrement suivi par le mouvement
des Gilets jaunes pour sa défense du RIC
qui est devenu l’une des principales
revendications du mouvement.
Le
site officiel d’Etienne Chouard
Reçu de Mohsen Abdelmoumen pour
publication
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