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Russie-Afrique du Sud : d'une pierre,
deux coups
Mikhail Gamandiy-Egorov
© Sputnik
. Vitaly Belousov
Mardi 17 juillet 2018
Source:
Sputnik
Le partenariat
entre Moscou et Pretoria a le vent en
poupe. Déjà très fort dans les domaines
politique, économique, culturel, sans
oublier l’agroalimentaire, il est amené
à se développer dans un domaine
inattendu: Moscou propose en effet une
solution à l’épineux problème des
fermiers blancs qui doivent laisser
leurs terres aux noirs.
Depuis la chute du
régime raciste d'apartheid, les
relations entre la République
sud-africaine et la Fédération de Russie
ont toujours été cordiales. Rien
d'étonnant, sachant que l'ANC, le parti
au pouvoir depuis la fin de la dictature
néocoloniale, a été activement soutenu
en son temps par l'Union soviétique.
D'ailleurs, plusieurs des représentants
de l'élite sud-africaine post-apartheid
ont été formés dans des universités
russes.
Le nouveau
président sud-africain, Cyril Ramaphosa,
est en ce sens dans la lignée de ses
prédécesseurs, à savoir un partisan
d'une relation forte avec Moscou,
d'autant plus que les deux nations sont
toutes deux membres de l'alliance BRICS.
Illustration de ce partenariat
privilégié, les deux pays ont lancé
l'année dernière un régime sans visas
pour leurs citoyens respectifs, pour des
séjours jusqu'à 90 jours, donnant une
impulsion supplémentaire à la promotion
des investissements et du tourisme.
Par ailleurs,
l'agence fédérale russe de l'énergie
atomique (Rosatom) devrait construire
une centrale nucléaire en terre
sud-africaine, même si cela déplaît
énormément aux concurrents occidentaux
du projet et à leurs amis héritiers de
l'apartheid, se trouvant aujourd'hui
dans l'opposition. Secteur des mines,
bourses d'études, manifestations
culturelles conjointes,… Russie et RSA
ne comptent pas s'arrêter en si bon
chemin: récemment, un nouveau volet est
venu s'ajouter à cette longue liste de
domaines de coopération… Assez
inattendu.
Le leader
sud-africain a en effet récemment
annoncé qu'il comptait revenir à la
question sensible qui tracasse depuis de
longues années la société du pays: celle
de la transmission des terres agricoles
aux mains des représentants de la
majorité noire. Car faut-il le rappeler,
les meilleures terres agricoles de la
nation arc-en-ciel restent détenues par
des représentants de la minorité
blanche. À la différence du Zimbabwe, de
Nelson Mandela à Jacob Zumba, en passant
par Thabo Mbeki, le leadership
sud-africain a été vraiment
très —certains diront trop- patient à ce
sujet.
Si cela devait
arriver, il serait bon de dire que cette
décision serait amplement justifiée,
sachant que nombre d'agronomes qualifiés
noirs ont été formés depuis la chute de
l'apartheid. Que d'autre part, il est
effectivement illogique qu'une minorité
issue du colonialisme puisse continuer à
profiter d'un système né durant une
époque d'injustice et de discrimination.
Et qu'enfin, la République sud-africaine
est un pays souverain, ayant droit
d'adopter les mesures jugées nécessaires
par ses représentants élus
démocratiquement.
Mais que faire de
ces fermiers blancs, pour la plupart
descendant des Afrikaners
néerlandophones, et hautement qualifiés
dans le domaine qui les concerne? Eh
bien, la Russie, qui offre depuis déjà
plusieurs années des conditions
inespérées dans le domaine
agroalimentaire, notamment après
l'établissement des sanctions
occidentales à son endroit et les
contre-mesures russes visant grand
nombre de produits occidentaux, a ouvert
la porte aux nombreux fermiers
afrikaners afin de leur permettre de
venir s'installer en terre russe. Un
message vraisemblablement bien
accueilli, puisque déjà 15.000 fermiers
sud-africains sont arrivés dans le sud
de la Russie et comptent se lancer dans
un business qu'ils maîtrisent si bien.
La terre russe, surtout celle du sud,
leur offre d'une part un climat et des
conditions de travail propices, sans
oublier d'autres avantages fournis par
le gouvernement local. Côté
sud-africain, ces fermiers se disent
prêts à investir chacun pas moins de
100.000 euros pour pouvoir lancer leur
production. Faites le compte: 15.000
fermiers x 100.000 euros, cela fait déjà
1,5 milliard d'euros que le budget russe
pourra recevoir, ajouté à cela l'énorme
savoir-faire des fermiers en question.
Moscou fait d'une
pierre, deux coups: d'une part, elle
maintient de très bons rapports avec le
gouvernement sud-africain, élargit au
maximum le portefeuille de projets
conjoints, tout en contribuant d'une
certaine façon au règlement d'un
problème né durant une phase sombre de
l'histoire d'Afrique du Sud.
D'autre part,
sachant que la Russie est devenue un
nouvel eldorado pour les projets dans le
secteur agroalimentaire, avec l'arrivée
de ces milliers de spécialistes
sud-africains hautement qualifiés, elle
porte un coup supplémentaire aux
intérêts occidentaux. C'est désormais
certain: tout retour éventuel des
produits agroalimentaires européens sur
le marché russe sera extrêmement
difficile.
Certains sceptiques
nous annonçaient de grandes difficultés
pour la Russie. Une fois encore, le pays
ne fait qu'en sortir renforcé.
Il y a toujours des alternatives.
L'essentiel est de les saisir.
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Publié le 19 juillet 2018 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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