Théopolitique
La guerre des
messianismes
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Vendredi 30 mai 2014
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1 -
Aux origines du messianisme
américain
2 - Un messianisme national
3 - Deux messianismes et deux
cochers
4 - La bête masquée par le sacré
5 - Le sang de l'Histoire
6 - Les deux messianismes
7 - La cécité démocratique
8 - Le discours de la Maison
Blanche
9 - Le messianisme de la raison
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1 - Aux origines
du messianisme américain
Tenter de peser le
destin politique de la France et de
l'Europe, c'est chercher la balance à
peser le cerveau du monde, et cette
pesée passe par l'approfondissement de
la connaissance de l'humain. L'heure de
radiographier un humanisme mondial
devenu une coquille vide dans nos écoles
a sonné pour les héritiers de la
Renaissance dont nous sommes les
paresseux survivants; et ce serait
déposer une coquille vide sur les
plateaux de cette balance de renoncer au
courage de l'esprit critique; car notre
anthropologie superficielle s'est
chapeautée de messianisme il y a trois
millénaires seulement pour se scinder
aussitôt entre deux sotériologies
clairement séparées, l'hébraïque et la
chrétienne. C'est cela que seule une
anthropologie des mythes sacrés
permettra d'éclairer quelque peu.
La semaine
dernière, j'ai commencé de raconter non
point ce qui se passe en ce moment dans
les coulisses du journal Le Monde
- un film en cours de tournage
sur le sujet sortira dans les salles
dites obscures en septembre, mais
seulement sur le modèle d'un récit amusé
des querelles d'acteurs en
représentation sur les planches du
théâtre qu'on appelle l'actualité Pour
ma modeste part, j'ai tenté de visiter
les coulisses de la géopolitique à la
lumière des relations nouvelles et
tempétueuses que le sionisme contraint
désormais deux acteurs vieillis sous le
harnais à entretenir derrière les
décors, à savoir les propriétaires des
journaux et les rédactions. Car il faut
se résigner à le constater: le sionisme
est un personnage réel, et ce personnage
a débarqué en chair et en os dans
l'histoire contemporaine sous les habits
nouveaux dont le XXIe siècle a commencé
de le vêtir.
2 - Un
messianisme national
Grandeur et
servitude militaires, écrivait
un peseur du messianisme guerrier,
Alfred de Vigny. Sonder la grandeur et
la servitude de la vocation messianique
du journalisme est une nécessité dès
lors que le destin du monde se réduirait
à des bulles de savon si nous jouions
les Tacite et les Thucydide avec le
bâillon d'un interdit tyrannique sur la
bouche, celui de nous poser clairement
la question de savoir si le messianisme
inné de la presse tombera dans le
burlesque parce que le statut des
phalanges intellectuelles des nations se
trouvera scindé entre Israël et le
monde.
C'est pourquoi, le
23 mai, j'ai tenté de poser la question
de la mission d'une diaspora
dichotomisée entre deux patries. Mais
pour comprendre la bipolarité qui
compénètre l'intelligentsia mondiale, il
faut s'interroger sur la scission qui
divise la notion même de messianisme
entre la localisation sioniste du
message identitaire d'un peuple et son
universalisation américaine et pseudo
démocratique. Car la démocratie
d'outre-Atlantique a universalisé une
sotériologie patriotique: le drapeau de
la Liberté mondiale s'est hissé sur la
hampe d'une religion nationalisée, et
c'est à ce titre que le christianisme de
Calvin est devenu américain sur notre
astéroïde.
On ne saurait donc
soumettre le sionisme planétarisé à une
psychanalyse anthropologique de ses
composantes cérébrales si l'on ne
radiographiait pas la théologie de la
politique, donc le messianisme et le
prophétisme de l'Amérique en tant
qu'empire en expansion territoriale et
religieuse confondues et si l'on n'en
comparait pas les paramètres avec
l'eschatologie d'Israël, dont le
sionisme divinise seulement quelques
arpents de la Judée, de la Galilée et de
la Samarie.
3 - Deux
messianismes et deux cochers
Au terme de la
treizième et de la plus orageuse des
"négociations" qui se sont déroulées
entre Israël et John Kerry - orageuse,
parce qu'elle portait sur le "conflit"
diplomatique censé banalisable et
baptisé d'"israélo-palestinien" par la
presse internationale - il s'en est
fallu de peu que la question fût posée
pour la première fois de la véritable
nature de ce débat - mais la politologie
mondiale n'est pas sortie du Moyen-Age.
Et pourtant, une réflexion énigmatique -
aux yeux d'une anthropologie dont
l'observation de l'animal auto-sacralisé
ferait enfin l'objet - a été entendue de
la bouche de de M. Naftali Bennett, le
plus messianisé, précisément, des
ministres du gouvernement de M. Benjamin
Netanyahou. Que signifient les violents
reproches adressés par ce théologien de
droite au Ministre américain des
affaires étrangères pour sa lecture
messianique des évènements, puisque,
comme il est dit plus haut, la
politologie moderne ne dispose encore
d'aucune science de l'animal
transcendantal qui permettrait aux
négociateurs de connaître le terrain
psychogénétique de la théopolitique sur
lequel les deux parties se situent sans
en comprendre les arcanes?
Comment expliquer
qu'Israël se dise en mesure de faire
grief à son interlocuteur américain de
s'égarer dans une sotériologie
délirante, un mythe en folie, une
eschatologie rédemptrice , une épopée du
salut et de la grâce abusivement
universalisés, alors que, de son côté,
Washington accuse Israël de se raconter
une histoire biblique prise à la lettre,
de s'égarer sottement dans un
fantastique vétéro-testamentaire, de
changer l'histoire en un théâtre du
surnaturel? Pour que deux finalismes
cosmologiques aussi salvifiques l'un que
l'autre ignorent leur propre complexion
au point de se lancer à la tête des
accusations d'hérésie sans rémission,
alors qu'ils participent viscéralement
d'une même rédemption formalisée, voilà
qui nous invite à nous demander ce qui
rend incompatibles deux débarquements du
récit d'une délivrance mythique de
l'humanité. Car les deux torrents de ce
messianisme s'épaulent l'un l'autre et
courent côte à côte depuis quatre cents
lustres.
4 - La bête
masquée par le sacré
La démocratie
mondiale - et l'américaine avant toute
autre - porte le sceptre et l'auréole
sinon mêlés, du moins parallèles, d'une
révélation unique et terminale, celle du
mythe de la Liberté. Il s'agit
d'un évangile, donc d'un instrument de
croisade, donc d'une annonciation, donc
d'une arme de guerre; mais, de son côté,
le monothéisme hébreu se contente de
sacraliser une parcelle du globe
terrestre. Ce coup de projecteur de
l'absolu change un peuple microscopique
en une phalange glorieuse d'élus
prédestinés à se trouver sauvés à titre
collectif sous la foudre et la houlette
d'un Jupiter férocement sélectionneur.
Comment se fait-il que deux explosions
eschatologiques dont le crâne dédoublé
des évadés de la zoologie se veut le
théologien laissent la bête damnée et la
bête sauvée ignorer leur nature
respective et comment se fait-il que la
parenté qui relie étroitement entre
elles les nombreuses sotériologies dont
cet animal se fait un théâtre, échappe à
sa connaissance et se dérobe même à
l'attention de ses simianthropologues?
Pour tenter de
comprendre un prodige cérébral aussi
diversifié selon les époques et les
lieux, il faut remonter aux origines de
l'espèce surréelle. Le bimane aux
neurones à jamais séparés du monde
visible n'a commencé que fort tard -
avec les monothéismes seulement - à
armer ses domiciles aériens des
poignards et des glaives de ses
victoires et de ses défaites sur les
champs de bataille. Quand les Romains
conquéraient l'Angleterre ou la
Germanie, ils ne prétendaient pas
apporter la Liberté, mais, tout au
contraire, une servitude méritée aux
yeux des dieux vaincus - et les
victoires des légions scellaient leurs
triomphes du sceau incontesté de la
légitimation de leurs exploits.
C'est le
monothéisme hébreu, puis chrétien qui,
les premiers, ont dédoublé les lauriers
récoltés par des carnages de tout
l'éclat du divin; et cette tiare
prestigieuse était déjà celle d'une
Liberté sacralisée chez Saint Jean et
Saint Paul. Naturellement, la raison du
plus fort n'en est pas moins demeurée la
meilleure en tous lieux; mais depuis
lors, l'humanité s'avance d'un siècle à
l'autre sous les chasubles de sa
sainteté. A toutes les époques, des
ailes de séraphins poussent dans le dos
des colosses de l'histoire; mais la
taille de ces plumages s'est
proportionnée à la musculature des
géants divinisés par leurs ailerons. Il
faut donc comparer entre eux les masques
d'anges qu'arborent les diverses
religions, puis les mettre en regard de
la stature terrestre des bêtes tout
subitement célestifiées.
Telle est la
balance d'une anthropologie dont les
plateaux pèseront les ailes du
messianisme d'Israël, d'un côté et
celles de la démocratie mondiale
américanisée de l'autre; car les deux
eschatologies ne dessinent leur effigie
sanctifiée et n'arborent l'écusson de
leur Liberté théologisée qu'à l'école de
l'étendue des territoires qu'elles
occupent sur notre astéroïde.
5 - Le sang de
l'Histoire
C'est dire que,
sitôt devenues les solitaires du cosmos,
ni la divinité des Hébreux, ni celle des
chrétiens n'ont ambitionné de mettre
tout de suite et définitivement la main
sur des territoires d'une superficie
illimitée. Voyez la dispute entre les
"saints de Jérusalem" - les disciples de
Jésus demeurés sédentaires d'un côté et,
de l'autre, l'universalisme voyageur et
le prosélytisme impénitent de Saint Jean
et de saint Paul. Cette dispute a tout
de suite porté sur la question cruciale
de savoir s'il était légitime que le
mythe du salut se trouvât exporté à
foison et répandu avec ardeur parmi les
"gentils", c'est-à-dire les nations, les
"gentes" ou bien si la manne de
la grâce divine fécondée à nouveaux
frais par la Croix, devait demeurer
enclose entre les seules murailles du
"peuple élu". Israël conserverait-il le
monopole de la délivrance de l'humanité?
La question de l'expansion territoriale
du messianisme n'est donc qu'un
corollaire de sa théologie avare ou
gaspilleuse de la grâce.
On sait que
l'expansionnisme généreux de la
théologie chrétienne du "salut" a
aussitôt triomphé de sa
provincialisation parcimonieuse et que
la foi demeurée municipale d'Israël
s'est retranchée et même barricadée dans
l'enceinte de Jérusalem. Les "saints de
Jérusalem" recevaient les fonds que
Saint Paul récoltait en abondance parmi
les gentils et qu'il envoyait
méticuleusement aux grippe-sous du ciel
de la ville sainte. Du coup, le monde
entier s'est divisé entre deux types
d'alliances du ciel des anges avec les
guerriers d'ici-bas. La potence s'est
révélée un symbole plus parlante de
l'histoire meurtrière de l'humanité que
les Ecritures réputées dictées à Moise
sur le Sinaï.
Aussi les croisés
ont-ils pu porter une double armure,
celle de l'éternité de Dieu et celle de
la précarité des Etats; et les
conquistadors ont converti les Incas en
brebis dociles d'un gibet scindé entre
l'universalité de la vérité céleste et
les gloires passagères de la terre. Mais
comment le saint génocidaire du Déluge,
puis le tortionnaire insatiable des
trépassés sous la terre apportait-ils la
délivrance aux sauvages? Par l'estrapade
et la noyade ?
Cette question n'a
pas tardé à fissurer la cuirasse du Dieu
de Justice; et l'on a vu les armées de
la piété se ruer sur l'Occident jusqu'à
Poitiers, tandis que le reste de
l'univers s'est partagé entre les
dévotions de Constantinople et celles de
Rome. Puis l'Europe s'est scindée entre
les protestants d'un côté, qui
refusaient tout net de boire à pleines
rasades le sang frais et de dévorer la
chair crue de leur prophète et, de
l'autre, les mangeurs de cette viande et
les buveurs de l'hémoglobine de leur
ciel.
Dans les deux
mythologies, la question anthropologique
posée dans l'inconscient guerrier de
tous les messianismes était celle du
statut du sang mi-réel, mi-surréel de
l'histoire de l'humanité. Du coup, le
messianisme du propulseur céleste des
neurones de la bête conquérante a
partagé le torrent de ses grâces entre
l'Amérique de Calvin et l'Italie du
saint Pontife romain; et seul Israël est
demeuré l'arme au pied dans l'enceinte
de son Jahvé inexpugnable, mais privé
des aliments salvifiques du sang et de
la mort.
6 - Les deux
messianismes
Du coup, on
comprend mieux l'intérêt politique
décisif, aux yeux des Etats-Unis
d'aujourd'hui, de traquer un Jahvé
entêté à se camper sur ses terres et à
opposer son messianisme d'assiégé
résolument debout sur ses deux jambes au
salut dissolvant qu'éclaireront les
pâles bougies des idéalités mondiales.
Avec l'Amérique, le salut s'est armé
jusqu'aux dents du millepattes de la
démocratie, mais au risque de se noyer
dans des abstractions faussement
salvifiques et cuirassées de concepts
stériisés par leur sacralisation
verbale. La toge du dieu Liberté sera
immaculée, mais tentaculaire, vaporisée
mais griffue, effilochée, mais dentue.
C'est pourquoi le
messianisme sédentarisé dans sa niche de
M. Naphtali Bennett accusait le
messianisme internationalisé de M. Kerry
du péché paulinien et johannique de
tomber dans le tentaculaire d'une toile
d'araignée du sacré, parce qu'Israël
n'est pas planétarisé pour un sou par
son Jahvé déguisé en père de famille.
Quel effarement de voir le géniteur
vieillissant d'Israël s'universaliser
sur le tard et armer de pied en cap une
masse d'indigènes en Palestine! Un Dieu
bien retranché sur son champ de bataille
demeure à l'abri tant des sortilèges
ravageurs de l'ubiquité salut que des
exploits sanglants des magiciens
délocalisés et surtout de la tentation
des dieux sénescents de se survivre dans
une progéniture hors de saison.
Mais comment la
Maison Blanche ne conjurerait-elle pas
le danger que le dieu des Hébreux fait
courir à ses fortins? Si Jahvé s'obstine
à ne camper que dans les pénates de ses
élus et s'il remplace les dieux lares
des Romains par un Jupiter indélogeable
de son mont Sinaï, cette épine dans le
pied de Washington lui interdit de faire
régner ses vapeurs de Brest au Caucase,
de faire entendre les foudres du salut
démocratique mondialisé et de répandre
les torrents de la grâce que le dieu
Liberté déverse sur toute la terre
habitée. Comment dorer le sceptre de
l'abstrait et sertir la déesse Majorité
des diamants d'un vocabulaire messianisé
si ce têtu de Jahvé vous nargue à
demeurer l'arme au pied dans sa
casemate?
7 - La cécité
démocratique
Trois exemples
seulement.
Les Etats-Unis
d'Amérique comptent trois cent cinquante
millions de consommateurs, l'Europe sept
cent quarante millions. Tout le monde
comprend que si les premiers demandent
aux seconds de conclure un traité de
libre échange de leurs marchandises, les
seconds se trouveront submergés de
produits fabriqués à la chaîne, tandis
que l'autre camp n'absorbera jamais que
la moitié de ce commerce.
Qu'est-ce qui
empêche les classes dirigeantes du Vieux
Monde de s'apercevoir qu'il s'agit d'un
grotesque attrape-nigauds? Croyez-vous
que si le mythe de la Liberté ne mettait
pas un bandeau sur les yeux de cet
immense réservoir de dupes, un si
titanesque subterfuge ne demeurerait pas
bien visible? Mais si, de surcroît, cinq
cents garnisons et places-fortes
consolident le bandeau, comment le bon
sens ferait-il encore tenir grands
ouverts les yeux des vassaux? En
revanche, si quelques phalanges de la
lucidité publique devaient monter sur
les remparts, où les recrutera-t-on,
sinon dans les rédactions? Débâillonner
ces dernières est donc la seule mesure
de salut public qui répondrait à la
situation; et, dans ce cas, un accord
entre elles leur permettrait, le même
jour et dans toute la presse, d'imposer
la royauté d'une raison politique
tellement élémentaire qu'elle aurait
crevé les yeux de tout le monde à Rome à
l'heure des guerres puniques - car, en
ce temps-là, les dieux du langage
n'obscurcissaient pas encore la vue des
fidèles, mais au contraire, leur
écarquillaient les yeux davantage.
Second exemple: la
vassalité rend muet. On n'ouvre plus la
bouche de crainte d'évoquer les vrais
sujets. Mais ceux-ci s'infiltrent sous
les carapaces du silence. On vient
d'élire des députés de l'Union
européenne au Parlement de Strasbourg
sans que personne n'ait demandé aux
électeurs: "Que faisons-nous des bases
américaines dont la seule présence sur
nos terres paralyse nos négociations
avec la Russie et la Chine? Que
faisons-nous face aux nations
émergeantes qui nous appellent à épouser
le destin de la planète de demain?" Mais
l'interdiction de formuler ces questions
les pare de tout l'éclat de leur
absence: quand on se demande seulement
qui nommera le Président de la
Commission de Bruxelles, tout le monde
se dit que le suffrage universel n'est
pas un oracle omniscient et qui
ouvrirait soudainement, spontanément et
à lui seul les yeux des nations
vassalisées?"
Troisième exemple.
Dans les sociétés primitives, si le
sorcier en chef échoue trop longtemps à
faire tomber la pluie, on le remplace
par un autre - mais on ne va pas changer
de météorologie. De même , quand
Copernic découvre la ronde des planètes
autour du soleil, l'Europe essaiera,
deux siècles durant, d'adapter
l'astronomie de Ptolémée à cette
découverte. De même, quand l'Amérique
dépense des milliards de dollars à
détacher l'Ukraine de la Russie,
l'Europe ne changera pas davantage
d'échiquier mental que l'Eglise du XVIe
siècle - elle se dressera en aveugle
contre l'"expansionniste" désigné par le
dieu de la démocratie mondiale.
Mais comment
l'aveuglement politique des peuples
asservis fonctionne-t-il sur le terrain
de la vérification expérimentale, donc
de l'histoire vécue? On observera le
déplacement du regard de la bête vers un
autre échiquier, un glissement
subreptice du globe oculaire des vassaux
en direction du paysage mental biaisé
par le mythe que leur maître substitue
astucieusement à leur champ de vision
naturel. Le maître d'au-delà des mers
sait fort bien qu'on n'entre dans
l'Union européenne qu'après un examen de
passage relativement sévère, on pèse
avec soin la prospérité économique du
candidat et ses chances de s'enrichir
sainement. Si la Grèce n'était pas
parvenue à falsifier ses comptes avec
l'aide de la banque américaine Goldman
Sachs, elle n'aurait pas été admise dans
l'enceinte du Vieux Monde.
Ces pesées
importent peu à l'empire, puisqu'il
n'autorise aucun Etat à entrer dans
l'Union européenne sans l'avoir privé au
préalable de sa souveraineté réelle - il
le colloque toujours et à titre
préjudiciel sous le commandement
militaire exclusif du général américain
dont le quartier général se trouve
installé depuis un demi-siècle à Mons en
Belgique. Non seulement l'OTAN place les
armées nationales européennes sous un
commandement étranger, mais la Maison
Blanche hisse le pavillon de
complaisance de la démocratie mondiale
pour lancer le continent de Copernic sur
des champs de bataille extérieurs.
Afin de masquer un
subterfuge stratégique greffé sur la vie
onirique de la bête, un homme de paille,
toujours soigneusement choisi dans un
pays minuscule et dûment chapeauté du
titre retentissant de " Secrétaire
général " sert d'alibi à la religion de
la Liberté universelle. C'est ainsi que
M. Rasmussen a tout de suite bondi des
coulisses du mythe pour rappeler que le
placement de l'Ukraine sous le joug de
l'OTAN était le but véritable de
l'opération.
C'est de cette
stratégie de la vassalisation
parareligieuse des cerveaux que M.
Vladimir Poutine a fait échouer le génie
de la contrefaçon intellectuelle. Et
maintenant, le souverain
d'outre-Atlantique peine à charger les
épaules de la Russie du sac à dos de son
propre expansionnisme militaire.
Comment
comprendriez-vous la géopolitique sans
une simianthropologie qui seule vous
éclairera sur l'animalité spécifique du
cerveau humain?
8 - Le discours
de la Maison Blanche
L'Amérique se dit:
"Si Israël persévérait à se présenter en
geôlier du messianisme de platebande de
Jahvé, la sotériologie sioniste de ce
laboureur de la Judée sapera les
fondements de notre eschatologie
mondiale, et il n'y aura plus de
rédemption américaine à l'échelle de la
planète du verbifique. Il y va de la
définition même du monothéisme chrétien
et israélien. Certes, la démocratie a
fait basculer le verbe divin dans une
animalité conceptualisée, donc
vaporisée, certes, cette religion s'est
universalisée à l'école de la Révolution
ubiquiste de 1789; mais le danger est
grand, pour les idéalités de la
démocratie mondiale de se changer en
ciboires, en encensoirs et en
brûle-parfums sur les autels fumants du
salvifique moderne. Il faut encager le
messianisme de village d'Israël, sinon
ce prophétisme de terroir menacera
l'empire fumigène de notre démocratie,
celle des guerriers d'une Liberté que
nous vaporisons à notre profit depuis
1945."
On voit que la
simianthropologie étudie les alliances
du sang avec le sacré et que cette
science s'articule étroitement avec la
géopolitique que les évadés de la
zoologie illustrent sur leurs champs de
bataille. Le messianisme américain est
un Titan blessé au flanc par la Crimée.
Comment, se dit la Maison Blanche,
maintiendrai-je l'Europe sous mon joug
si Moscou, désormais étroitement associé
à Pékin, conduit le Vieux Monde à ses
retrouvailles avec sa souveraineté
antérieure à 1939? Dans ce contexte, si
M. Barack Obama et le Département d'Etat
échouaient à armer de nouveau le
continent de Copernic des feux du
messianisme démocratique américain, on
verrait tomber en quenouille, sur les
cinq continents, le sceptre de la
sotériologie et de la rédemption que
brandit cet empire.
9 - Le
messianisme de la raison
De deux lutteurs,
le plus faible ne saurait apporter aide
et secours au plus fort. Il faut donc
que la puissance s'abaisse à demander la
protection de ses vassaux. Alors
seulement ceux-ci auront des chances de
renaître et de prendre la place de leur
maître. Mais jamais, face à sa
valetaille, l'empire américain ne se
comportera en quémandeur. Du coup
comment persévèrerait-il à brandir son
sceptre de bois sec? C'est de cela que
témoigne la guerre entre les
propriétaires du Monde et
la rédaction: ce n'est pas à
s'agenouiller devant la Maison Blanche,
mais en convertissant le sionisme
français à retrouver, à sa manière, le
nationalisme éternel d'Israël que la
France fera passer la communauté juive
dans son camp.
Le meilleur exemple
de ce renversement d'alliance n'est
autre qu'Israël lui-même. On sait que,
bien avant le renoncement officiel de
l'Europe à ses sottises
pseudo-pénalisantes à l'égard de la
Russie, Israël a eu l'audace de refuser
de s'associer aux sanctions
retentissantes, mais stériles, du Dieu
"Démocratie". Pourquoi cela, sinon parce
qu'il s'agit désormais d'une guerre à
fronts renversés. Les Incas refoulés
dans l'enceinte de leurs temples ne
faisaient plus le poids face à la
sotériologie du messianisme armé de
l'époque. Cinq siècles plus tard, on
voit le messianisme universalisé de la
démocratie mondiale battre de l'aile et
dessécher le mythe du salut par
l'avènement planétaire du dieu
Liberté. Le glaive et l'armure des
guerriers du monothéisme américain ont
cessé de briller - puisse Israël aider
son hôte gaulois à rallier l'Europe au
messianisme étincelant de la raison.
le 31 mai 2014
Reçu de l'auteur pour publication
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