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Décodage anthropologique de l'histoire contemporaine

Eclairer l'histoire à la lumière du génie littéraire

Manuel de Diéguez


Manuel de Diéguez

Vendredi 20 mai 2016

1 - Clio en panne de grandeur
2 - Qu'est-ce que le G8 ?
3 - Cervantès et Shakespeare face à l'histoire
4 - La postérité de Cervantès
5 - Cervantès, psychanalyste de l'hypocrisie démocratique

1 - Clio en panne de grandeur

L'histoire du monde s'est invitée dans la République des Lettres avec l'Iliade et l'Odyssée. Le germe homérique a multiplié ses récoltes et Clio s'est révélée dantesque, shakespearienne, quichottesque. Puis ces premières semailles se sont diversifiées et se sont révélées cornéliennes avant de se rendre ubuesques et kafkaiennes. Mais, entre temps, la comédie humaine était devenue balzacienne pour avoir rendu méticuleuse la divine comédie.

Mais quelle encre, quelle plume, quel pinceau nous raconteront-ils le ridicule et le grotesque de M. Steinmeier, ministre des affaires étrangères des Germains, qui expliquait doctement à la Russie que le G8 est prêt à la traiter en enfant prodigue, mais repentant, et qu'elle pourrait revenir dans cette enceinte, à condition qu'elle suive docilement l'itinéraire que la démocratie des catéchistes lui dicterait. M. Steinmeier n'est le héros d'aucun théâtre connu de l'histoire du monde.

On sait que le 20 avril 2016 la Russie a définitivement claqué la porte d'un G8 que la Sarkozie avait enterré aux trois quarts. Il faudrait saluer l'initiative du fondateur du G20, s'il n'avait ensuite passé le reste de son mandat à se repentir sur le mode gesticulatoire, et cela jusqu'à replacer la France sous le joug de l'OTAN - la réoccupation du territoire national antérieurement à 1966 se trouvant sinon momentanément exclue, du moins remise à plus tard.

2 - Qu'est-ce que le G8 ?

Cette farandole était composée de la manière suivante: un maître du monde, l'Amérique, s'était donné un satellite docile et muet à souhait, le Canada. Puis il s'était subordonné une Allemagne occupée par deux centaines de ses bases militaires, puis une Italie occupée par cent trente sept forteresses de son maître, puis une Europe quadrillée par cinq cents camps retranchés de son souverain, puis un Japon soumis à son joug depuis soixante-dix ans.

Quel rôle l'Angleterre et la France jouaient-elles dans ce concert des vassaux? Le Royaume Uni vient de se faire rappeler à l'ordre. Son rôle était de faciliter à son maître l'unification commerciale qui ferait du Vieux Monde et du Nouveau une vaste zone de libre-échange à jamais émasculée. S'il lui venait la fantaisie de quitter l'Europe, alors qu'elle y remplit la mission d'étouffer toute velléité d'unification politique et militaire. La Maison Blanche lui rappellerait qu'elle entretient des relations commerciales et financières privilégiées avec la City. Du coup, l'Angleterre serait rudement sommée de rentrer dans le rang, sinon elle "passerait en queue du peloton" des quémandeurs.

Quelle littérature a-t-elle jamais prêté sa plume et son encrier à cette fantasmagorie? M. Steinmeier n'est pas dantesque - il lui manque la grandeur et le tragique du peintre italien. M. Steinmeier n'est pas quichottesque - il lui manque la noblesse et le souffle de l'univers cervantesque. M. Steinmeier n'est pas shakespearien - il lui manque l'étoffe des héros du grand dramaturge anglais. M. Steinmeier n'est pas ubuesque - il lui manque le grain de folie qu'Horace jugeait insuffisant chez Virgile. M. Steinmeier n'est pas kafkaïen - il lui manque le gouffre de la mort que le grand Pragois a ouvert sous les pas du genre humain. Décidément, il faudra invoquer la palette d'une littérature inconnue pour peindre la chute dans une poussière muette de l'histoire des domestiques du maître d'aujourd'hui.

3 - Cervantès et Shakespeare face à l'histoire

1616-2016 : quatre siècles ont passé depuis la mort, la même année, de Cervantès et de Shakespeare. Le monde entier commémorera l'apparition de cette double fulgurance du génie littéraire dans l'histoire anthropologique des évadés actuels de la zoologie.

Mais puisque 2016 rappellera le quatre centième anniversaire de la mort de l'auteur de Don Quichotte de la Manche et de celui de Hamlet, quelle sera leur postérité politique? A qui la palme du symbolique reviendra-t-elle? Certes, l'Europe est le Hamlet international de notre temps. Mais l'arrière-fond de Shakespeare transcende rarement le champ de la politologie, tandis que Cervantès prend à bras le corps une espèce scindée entre don Quichotte et Sancho Pança, entre la Rossinante de l'un et la mule de l'autre, entre Dulcinée et Maritorne.

Assurément, Hamlet transcende la politique quand il se pose la question: "être ou ne pas être". Mais à aucun moment le géant Anglais ne s'interroge sur la signification anthropologique du verbe exister appliqué au genre humain, à aucun moment, il ne se préoccupe de la spécificité du simianthrope évolutif, tandis que Cervantès accède constamment à la science anthropologique la plus originelle, celle de découvrir ce que signifie le verbe être appliqué à un animal en suspens entre ses Tobosos et ses platitudes.

Le seul personnage transhistorique de Shakespeare est Lady Macbeth dont la tache de sang indélébile sur ses mains illustre les relations que la bête meurtrière entretient avec son propre sang. Mais Cervantès écrit de nos jours l'histoire la plus abyssale d'Adam, celle de sa propre agonie. Car don Quichotte est descendu dans le sépulcre de la mémoire, don Quichotte est mort de désespoir pour avoir découvert qu'il n'y a pas de Toboso en ce monde, qu'il n'y a pas de Dulcinée, qu'il n'y a pas de chevalier errant, qu'il n'y a de choix qu'entre l'agonie des nobles utopies et les platitudes qui livrent le simianthrope à ses apothicaires. C'est Cervantès qui fait dire à Flaubert: "Mme Bovary, c'est moi", c'est Cervantès qui parle chez Baudelaire.

C'est Cervantès qui rédige l'histoire entière du romantisme français. C'est Cervantès qui donne sa portée anthropologique à une espèce devenue trans-animale entre ses terres promises et ses désastres. En 1989, le psychanalyste jungien - et américain - James Wyly, publiait un essai intitulé La quête phallique, dans lequel il démontrait que l'homme est un animal métaphorique et qu'il transporte ses signifiants dans un monde surréel. De mon côté, je démontrais, dès 1963, dans mon Chateaubriand ou le poète face à l'histoire que l'homme est un auto-transfigurateur qui charrie tout son être dans une trans-biographie, ce que Valéry avait souligné depuis longtemps: le biographe, disait-il, "compte les chaussettes, les maitresses, les niaiseries de son sujet".

4 - La postérité de Cervantès

La postérité de Cervantès est inépuisable, parce qu'elle véhicule, de siècle en siècle, le regard en devenir qu'une espèce trans-zoologique porte sur sa propre essence et quintessence. C'est sur le modèle du Quichotte que le monde moderne meurt sous nos yeux faute de souffle, d'élan, de foi, de folie. Le monde moderne meurt de désespoir au spectacle d'une Maritorne qui jette des grains aux poules dans une basse-cour du village de Sagayo.

L'actualité politique de Cervantès transcende, siècle après siècle, celle de Shakespeare, car le décor de la comédie humaine du dramaturge anglais place sans cesse la petite querelle entre les Montaigu et les Capulet derrière la mise en scène de Roméo et de Juliette, tandis que Cervantès éveille une anthropologie abyssale sur l'étrangeté d'une bête que sa noblesse égare dans la folie et sa banalité dans les étranglements du quotidien. L'Europe périra-t-elle dans la strangulation atlantiste, l'Europe périra-t-elle dans la satellisation qui la vassalise sous l'égide du Dieu américain ou bien l'Europe retrouvera-t-elle un souffle, un élan, une grandeur à entrer dans le royaume prometteur d'une rencontre entre le génie russe et le génie européen?

5 - Cervantès, psychanalyste de l'hypocrisie démocratique

Don Quichotte mourra-t-il dans l'asphyxie démocratico-messianique ou bien l'Europe s'ouvrira-t-elle à un quichottisme de la grandeur? Voilà qui fait du héros de Cervantès un messager trans-politique dont la fécondité grandira de siècle en siècle. Car Cervantès est aussi le pionnier mondial d'un regard sur la bête dont l'hypocrisie ne cesse d'illustrer la double face. Cervantès est aussi l'auteur potentiel d'une histoire de l'hypocrisie. Celle-ci n'en est encore qu'aux balbutiements.

Quand Molière donne la première représentation du Tartuffe en 1663 devant un Roi-Soleil âgé de vingt-cinq ans ans seulement, l'anthropologie historique ne dépeint encore que les "faux-dévots", parce que le XVIIe siècle ne cherche pas à comprendre pourquoi le spectacle de leur hypocrisie irrite à ce point les "vrais dévots". Puis, au XIXe siècle Le Rouge et le Noir de Stendhal ne dépeint pas encore l'hypocrisie qui s'étend au delà de l'enceinte sacerdotale et Balzac lui-même ne franchit que quelques pas dans la peinture d'une Restauration dont il se révèle l'annonciateur et qui fera d'un ancien forçat le chef de la police sous Louis-Philippe. Cervantès va bien au delà dans le portrait du simianhrope: il fait de l'hypocrisie le poison qui place don Quichotte sur le piédestal intérieur de ses idéalités.

Il faudra attendre la psychanalyse pour découvrir la portée anthropologique de la cristallisation stendhalienne et de la sublimation freudienne, il faudra attendre la seconde moitié du XXe siècle pour connaître le filtre de la survie de l'humanité qu'est le masque de l'idéalisme quichottesque. Car Cervantès est le découvreur du narcissisme idéologique ou théologique qui permet au sujet de se réfléchir dans le miroir d'un quichottisme flatteur. Le sujet se mire dans son propre masque, celui qui permet à l'hypocrisie idéologique de se donner le royaume des vanités pour demeure dans laquelle l'hypocrisie trouve l'appui d'une feinte élévation.

Décidément, nous ne verrons pas Madrid, en cette année 2016, prendre la parole à la face du monde et rappeler à l'humanité la vraie grandeur de Cervantès, décidément, nous ne verrons pas la France de 2016 rappeler au monde que le génie de la langue française du XVIIe siècle a porté don Quichotte sur les fonts baptismaux de l'universalité de son destin, puis le XVIIIe siècle porter don Quichotte sur les fonts baptismaux de la raison de demain, puis le XIXe siècle porter don Quichotte sur les fonts baptismaux de l'anthropologie de demain.

Ni la classe dirigeante de langue espagnole d'aujourd'hui, ni la classe dirigeante d'une Ve République agonisante ne sont de taille à empoigner à bras le corps le génie prophétique et anthropologique du Cervantès d'hier, d'aujourd'hui et de demain.

Le 20 mai 2016

 

 

   

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Source: Manuel de Diéguez
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