Décodage
anthropologique de l'histoire
contemporaine
D'Erasme à Vladimir Poutine
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Vendredi 13 avril 2018
Réflexion
anthropologique sur l'idiotie en
politique
Depuis hier une
nation peuplée de cent cinquante
millions d'âmes, une nation qui s'étend
sur neuf fuseaux horaires, une nation
dont l'alliance militaire et politique
avec un milliard cinq cent millions de
Chinois a déclaré que "l'Occident
était allé trop loin dans l'idiotie"
et que la partie idiote de l'humanité
allait devoir présenter des excuses
diplomatiques à la portion saine
d'esprit du genre humain.
Cette déclaration
fait écho à l'ironique Stultilia
salve d'Erasme - Eloge de
la stupidité, faussement
traduit par Eloge de la Folie.
Elle en appelle à une anthropologie
d'avant-garde ; car il y est clairement
rappelé que l'idiotie politique ne
renvoie pas à une stupidité banale,
puisqu'il s'agit d'une idiotie
consciente d'elle-même et à laquelle
l'idiot est capable de porter remède en
raison de son pouvoir de se réfléchir
dans le miroir de son intelligence en
germe.
Sans doute cette
prise de position de Vladimir Poutine au
chapitre du contenu d'une anthropologie
capable de s'élever à la réflexion
théorique sur son propre contenu nous
apporte-t-elle des informations
nouvelles et précieuses. Six siècles
après Erasme et cinq siècles après
Jonathan Swift, des millions de Yahous
apeurés ont donc subitement débarqué en
chair en os dans l'histoire de
l'humanité. Le continent qui symbolisait
la raison euclidienne est soudainement
devenu le creuset de l'idiotie politique
mondialisée.
Supposons que face
à ces embarras du "nouveau discours de
la méthode" un analphabète de
l'anthropologie critique tienne à peu
près le discours qui suit :
" J 'ignore tout de
la déclaration de l'anthropologue
Vladimir Poutine. En tant que savant
d'Etat, il ne m'appartient ni de penser
la politique, ni de réfléchir sur les
fondements de cette discipline. A
l'exception du Monde, je
ne lis ni journaux ni magazines. "
Dans ce cas,
l'anthropologie critique battra-t-elle
en retraite ou bien se dira-t-elle avec
courage et non sans une saine colère,
que si l'on ignore la politique, on
ignore l'histoire et que si l'on ignore
l'histoire, on tourne le dos au genre
humain et que si l'on tourne le dos au
genre humain on cherchera refuge dans
l'escalade de quelque Mont Athos sur
lequel de grands chambellans d'une
scolastique au petit pied se
spécialiseront dans le maniement des
idéalités.
L'anthropologie
critique prend acte d'une science de la
bête onirique. Cet animal craintif pèse,
depuis des millénaires, l'univers sur la
balance de ses songes. Il prend ses
rêveries pour des réalités bien plus
objectives que le monde qu'il voit de
ses yeux, qu'il entend de ses oreilles
et qu'il touche de ses mains, tellement
il préfère s'appuyer sur des supports
illusoires dans les nues ou
artificiellement créés sur la terre, que
de se voir précipité dans le monde réel
et livré aux mâchoires d'une réflexion
sur lui-même et sur l'idiotie de sa
politique de soumission aux intérêts
d'un empire étranger.
Voilà ce
qu'enseigne une vraie psychanalyse et
non point celle des niaiseries
freudiennes dont tout le picotin se
réduit à picorer les grains d'un certain
complexe d'Œdipe.
La vraie
psychanalyse se fonde sur la découverte
de ce que l'humanité est un animal
pseudo rationale. Elle retient de
Freud ce qu'il présente de meilleur à
ses lecteurs, à savoir ses réflexions
sur l'avenir d'une gigantesque illusion
collective dont les bercements et les
cruautés rythment l'histoire de
l'humanité depuis des millénaires.
13 avril 2018
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