L'art de la guerre
À Ghedi on prépare la nouvelle
base pour les F-35
Manlio Dinucci

Manlio
Dinucci. DR
Mardi 6 octobre 2020
Dans
l’aéroport militaire de Ghedi (Brescia)
sont en train de commencer les travaux
pour réaliser la principale base
opérationnelle des chasseurs F-35A
de l’Aéronautique italienne armés de
bombes nucléaires. La Matarrese Spa de
Bari, qui a obtenu l’adjudication avec
une offre de 91 millions d’euros,
construira un grand hangar pour la
maintenance des chasseurs (plus de 6
000m2) et un petit immeuble
qui accueillera le commandement et les
simulateurs de vol, doté d’un parfait
isolement thermo-accoustique “dans le
but d’éviter des révélations de
conversations”.
Deux
lignes de vol seront réalisées, chacune
avec 15 petits hangars à l’intérieur
desquels se trouveront les chasseurs
prêts au décollage. Ceci confirme ce que
nous avions publié il y a trois ans (il
manifesto, 28 novembre 2017), à
savoir que le projet (lancé par Roberta
Pinotti, alors ministre de la Défense)
prévoyait le déploiement d’au moins 30
chasseurs F-35A.
L’aire où seront basés les F-35,
clôturée et surveillée, sera séparée du
reste de l’aéroport et top secret. La
raison en est claire : à côté des
nouveaux chasseurs seront basées à Ghedi,
dans un dépôt secret qui n’apparaît pas
dans l’adjudication, les nouvelles
bombes étasuniennes B61-12.
De même
que les actuelles B-61 dont sont armés
les Tornado PA-200 du 6ème
Stormo, les B61-12 seront contrôlées par
l’unité spéciale étasunienne (704th
Munitions Support Squadron de
l’U.S. Air Force), “responsable de la
réception, stockage et maintenance des
armes de la réserve de guerre USA
destinées au 6ème Stormo OTAN
de l’Aéronautique italienne”. Cette même
unité de l’Aéronautique USA a le devoir
de “soutenir directement la mission
d’attaque” du 6ème
Stormo.
Des pilotes italiens sont déjà
entraînés, dans les bases aériennes de
Luke en Arizona et Eglin en Floride, à
l’utilisation des F-35A y compris
pour des missions d’attaque nucléaire
sous commandement USA.
Des chasseurs du même type, armés ou en
tous cas armables avec les B61-12, sont
déployés dans la base d’Amendola
(Foggia), où ils ont déjà dépassé les 5
000 heures de vol. En plus de ceux-ci,
il y aura les F-35 de l’U.S. Air Force
déployés à Aviano avec les B61-12.
Le nouveau chasseur F-35A et la nouvelle bombe nucléaire B61-12
constituent un système d’arme intégré :
l’utilisation de l’avion comporte
l’usage de la bombe. Le ministre de la
Défense Guerini (Pd) a confirmé que
l’Italie maintient son engagement à
acheter 90 chasseurs F-35, dont 60 de
modèle A à capacité nucléaire.
La participation au programme du F-35, en tant que partenaire de second
niveau, renforce l’ancrage de l’Italie
aux États-Unis. L’industrie guerrière
italienne, chapeautée par la société
Leonardo qui gère le site des F-35 à
Cameri (Novara), se trouve de plus en
plus intégrée dans le gigantesque
complexe militaro-industriel USA
chapeauté par la société Lockheed
Martin, la plus grande industrie
guerrière du monde, constructrice du
F-35.
En même temps l’Italie -État
non-nucléaire adhérent au Traité de
non-prolifération qui lui interdit
d’avoir des armes nucléaires sur son
territoire- joue la toujours plus
périlleuse fonction de base avancée de
la stratégie nucléaire USA/OTAN contre
la Russie et d’autres pays.
Sachant que chaque avion peut
transporter en soute deux B61-12, rien
que les 30 F-35 A de Ghedi auront une
capacité d’au moins 60 bombes
nucléaires. Selon la Fédération des
scientifiques américains, la nouvelle
bombe “tactique” B61-12 pour les F-35,
que les USA déploieront en Italie et
autres pays européens à partir de 2022,
étant plus précise et en position
rapprochée des objectifs, “aura la même
capacité militaire que les bombes
stratégiques déployées aux États-Unis”.
Il y a enfin la question, non encore
définie, des coûts. Le Service de
recherche du Congrès des États-Unis, en
mai 2020, estime le prix moyen d’un F-35
à 108 millions de dollars, en précisant
cependant que “c’est le prix de l’avion
sans moteur”, dont le coût est d’environ
22 millions. Une fois acheté, même à un
prix moindre comme le promet pour
l‘avenir Lockheed Martin, commence pour
le F-35 la dépense pour sa mise à jour
continue, pour la formation des
équipages et pour son utilisation. Une
heure de vol d’un F-35 -documente l’U.S.
Air Force- coûte plus de 42 000 dollars.
Cela signifie que rien que les 5 000
heures de vol effectuées par les F-35 d’Amendola
ont coûté à nos caisses publiques 180
millions d’euros.
Édition de
mardi 7 octobre 2020 d’il manifesto
https://ilmanifesto.it/a-ghedi-si-prepara-la-nuova-base-per-gli-f-35-nucleari/
Traduit de
l’italien par M-A P.
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