L'art de la guerre
Le premier satellite-espion
italien en orbite
Manlio Dinucci
© Manlio
Dinucci
Jeudi 3 août 2017
Le 2 août a été lancé depuis la
Guyane française, avec un lanceur Vega
de l’Agence spatiale européenne
construit en Italie par Avio, le
satellite Opsat-3000 du ministère de la
Défense italien. Cependant le satellite
n’est pas italien mais israélien. Il a
été acheté en 2012 dans le cadre d’un
accord de coopération militaire entre
Rome et Tel Aviv, dans lequel Alenia
Aermacchi (société de Finmeccanica, à
présent Leonardo) a fourni à Israël 30
appareils militaires d’entraînement
avancé M-346 et les Israel Aerospace
Industries ont fourni à l’Italie l’Opsat-3000
et un premier avion G550 Caew (cf. il
manifesto, 31 juillet 2012).
L’Opsat-300, placé en orbite basse (450 Km d’altitude), sert non pas à
une générique “observation de la Terre”,
mais à fournir des images détaillées à
très haute résolution de “n’importe
quelle partie de la Terre” pour des
opérations militaires dans des théâtres
de guerre lointains. Les images
recueillies par Opsat-3000 arrivent dans
trois centres en Italie : le Centre
Interforces de télédétection
satellitaire de Pratica di Mare (Rome),
le Centre interforces de gestion et
contrôle Sicral de Vigna di Valle (Rome)
et le Centre spatial du Fucino di
Telespazio (L’Aquila).
L’Opsat-3000 est relié en même temps à un quatrième centre : la Mbt
Space Division des Israel Aerospace
Industries à Tel Aviv. Ceci confirme que
l’accord militaire italo-israélien
prévoit non seulement la collaboration
entre les industries militaires, mais
une coopération stratégique toujours
plus étroite entre les deux pays.
Dans le cadre de ce même accord de 2012, les Israel Aerospace
Industries ont livré à l’aéronautique
italienne, en décembre 2016, le premier
des deux avions G-550 Caew : ce sont des
Gulfstream 550, jets de luxe privés made
in USA, que les Israel Aerospace
Industries transforment en avions de
guerre très sophistiqués. Dotés des plus
avancés systèmes de radar, d’espionnage
et de communication conformes aux
standard Otan, ces avions constituent le
fer de lance d’un système de
commandement et contrôle pour l’attaque
dans des théâtres de guerre distants.
Tout cela a un prix. L’Opsat-3000 est payé par l’Italie 182
millions de dollars, auxquels s’ajoutent
les coûts pour la mise en orbite et la
gestion du satellite, dont la “vie” est
prévue à environ 7 années. Les deux
avions G-550 Caew, avec leurs centres de
commandement et contrôle, coûtent
environ 800 millions de dollars. Au
total plus d’un milliard de dollars payé
en argent public. Le milliard de dollar,
provenant de la vente à Israël des 30
appareils d’entraînement M-346, entre
dans les caisses de Leonardo SpA,
nouvelle dénomination sociale de
Finmeccanica, dans lequel le Trésor
détient un pourcentage de 30%.
Ainsi se trouve réalisé le “Livre Blanc pour la sécurité internationale
et la défense” signé par la ministre
Pinotti, transformé en février dernier
en projet de loi qui délègue au
gouvernement “la révision du modèle
opérationnel des Forces armées”. Modèle
où l’industrie militaire assume le rôle
de “pilier du Système pays”, dans lequel
les Forces armées ont le devoir de
défendre “les intérêts vitaux du Pays”,
en intervenant dans les aires donnant
sur la Méditerranée -Afrique du Nord,
Moyen-Orient, Balkans- et, en dehors de
ces aires, en Afghanistan et partout
dans le monde où sont en jeu les
intérêts de l’Occident représentés
fondamentalement par l’Otan sous
commandement USA.
L’acquisition de systèmes militaires comme le satellite-espion Opsat-3000
et les avions G-550 Caew ne laisse aucun
doute sur la voie ainsi tracée : en
démolissant les piliers constitutionnels
de la République italienne, c’est de
plus en plus celle de la guerre.
Edition de jeudi 3 août 2017 de il
manifesto
https://ilmanifesto.it/in-orbita-opsat-3000-primo-satellite-spia-italiano-costa-mille-miliardi-di-dollari/
Traduit de l’italien par M-A P.
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