L'art de la guerre
5G, nouveau
terrain de la course aux armements
Manlio Dinucci

© Manlio
Dinucci - Capture
d'écran PalSol
Mardi 2 juin 2020
À la base
aérienne Nellis au Nevada -annonce le
Pentagone- commencera en juillet la
construction d’un réseau expérimental
5G, qui deviendra opérationnel en
janvier 2021.
Dans cette base s’est déroulée en mars
dernier la Red Flag, la plus importante
manoeuvre aérienne des États-Unis, à
laquelle ont participé des forces
allemandes, espagnoles et italiennes.
Ces dernières étaient composées aussi de
chasseurs F-35 qui -communique
l’Aéronautique militaire- ont été
“intégrés aux meilleurs dispositifs de
l’aviation militaire américaine” afin
d’”exploiter au maximum les
potentialités des aéronefs et des
systèmes d’armes en dotation”, y compris
à coup sûr les nucléaires. À la Red Flag
de 2021 seront probablement déjà en
fonction, pour être testés dans un
environnement réel, des réseaux mobiles
5G formés de tours montables et
démontables en moins d’une heure pour
être rapidement transférés selon
l’opération en cours.
La base
Nellis est la cinquième sélectionnée par
le Pentagone pour expérimenter
l’utilisation militaire de la 5G : les
autres se trouvent dans l’Utah, en
Georgie, en Californie et dans l’Etat de
Washington.
Un
document du Service de recherche du
Congrès (National Security Implications
of Fifth Génération 5G
MobileTechnologies, 22 mai 2020)
explique que cette technologie de
cinquième génération de la transmission
mobile de données peut avoir “de
nombreuses applications militaires”.
L’une d’elles concerne les “véhicules
militaires autonomes”, c’est-à-dire les
véhicules robotiques aériens, terrestres
et navals en capacité d’effectuer de
façon autonome les missions d’attaque
sans même être pilotés à distance. Ceci
requiert le stockage et l’élaboration
d’une énorme quantité de données qui ne
peuvent pas être effectuées uniquement à
bord du véhicule autonome. La 5G
permettra à ce type de véhicule
d’utiliser un système extérieur de
stockage et élaboration de données,
analogue à l’actuel Cloud pour le
stockage personnel de dossiers. Ce
système peut rendre possibles de
“nouveaux concepts opérationnels
militaires”, tel celui de l’”essaim”
dans lequel chaque véhicule se relie
automatiquement aux autres pour
effectuer la mission (par exemple
d’attaque aérienne d’une ville ou
attaque navale d’un port ).
La 5G permettra de rendre plus puissant tout le système de commandement
et contrôle des forces armées
étasuniennes à une échelle mondiale :
actuellement -explique le document- il
utilise les communications par satellite
mais, à cause de la distance, le signal
prend un certain temps pour arriver,
provoquant des retards dans l’exécution
des opérations militaires. Ces retards
seront pratiquement éliminés par la 5G.
Celle-ci aura un rôle déterminant
notamment dans l’utilisation des armes
hypersoniques qui, dotées aussi de têtes
nucléaires, circulent à une vitesse
supérieure à 10 fois celle du son.
La 5G
sera aussi extrêmement importante pour
les services secrets, rendant possibles
des systèmes de contrôle et d’espionnage
beaucoup plus efficaces que les actuels.
“La 5G est vitale pour conserver les
avantages militaires et économiques de
l’Amérique”, souligne le Pentagone.
Particulièrement avantageux est le fait
que “la technologie émergente 5G,
commercialement disponible, offre au
Département de la Défense l’opportunité
de bénéficier à moindres coûts de ce
sytème pour ses propres exigences
opérationnelles”. En d’autres termes le
réseau commercial de la 5G, réalisé par
des sociétés privées, se trouve utilisé
par les forces armées étasuniennes avec
une dépense beaucoup plus basse que
celle qui serait nécessaire si le réseau
était réalisé uniquement à des fins
militaires. Ceci se passe aussi dans
d’autres pays.
On comprend donc que le contentieux sur
la 5G, en particulier entre États-Unis
et Chine, ne fait pas partie de la seule
guerre commerciale. La 5G crée un
nouveau terrain de la course aux
armements, qui se déroule moins sur le
plan quantitatif que qualitatif. Ceci
n’est pas abordé par les médias et
largement ignoré même par les critiques
de cette technologie, qui concentrent
leur attention sur les possibles effets
nocifs pour la santé. Engagement certes
de grande importance, mais qu’il faut
unir à celui s’opposant à l’utilisation
militaire de cette technologie, financée
à leur insu par les utilisateurs
ordinaires des téléphones portables de
cinquième génération.
Édition de
mardi 2 juin 2020 d’il manifesto
https://ilmanifesto.it/5g-nuovo-campo-della-corsa-agli-armamenti/
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