Opinion
L'échec fiscal des
États-Unis justifie un monde
désaméricanisé
Liu Chang
Samedi 2 novembre 2013
La très officielle agence de presse
chinoise
Xinhua, vient de publier (en
anglais) un article sous la signature
d’un de ses journalistes appelant à la
« désaméricanisation » du monde (la
traduction a été faite par le site
Les-crises). Le ton de cet article
est assez nouveau, parce que jusqu’à
présent, les commentaires chinois sur
les affaires internationales restaient
dans un style très diplomatique, et de
ce fait, assez hermétique. Cette fois,
l’argumentation est parfaitement claire,
et c’est pourquoi nous le publions.
Résistance
Pékin, 13/10/2013 (Xinhua) — Alors que
les hommes politiques américains
échouent à trouver un accord viable pour
refaire fonctionner normalement les
institutions politiques dont ils sont si
fiers, c’est peut-être le bon moment
pour une planète abasourdie de commencer
à envisager la construction d’un monde
désaméricanisé.
Ayant émergé de la Seconde Guerre
Mondiale en tant que Nation la plus
puissante au monde, les États-Unis n’ont
depuis eu de cesse de bâtir un empire
mondial en imposant leur ordre mondial,
alimentant la croissance en Europe et
encourageant des changements de régimes
dans des pays qu’ils considéraient comme
inamicaux.
Avec leur puissance économique et
militaire apparemment inégalée, les
États-Unis ont déclaré qu’ils avaient
des intérêts nationaux vitaux à protéger
dans presque tous les coins du globe, et
se sont habitués à s’ingérer dans les
affaires d’autres pays et régions bien
loin de leurs rivages.
Alors que le gouvernement américain
s’échine à vouloir faire croire au monde
qu’il est le champion de la morale, il
s’autorise secrètement des pratiques
aussi audacieuses que torturer des
prisonniers de guerre, cibler des civils
lors d’attaques de drones et espionner
les leaders politiques et économiques
mondiaux.
Sous le régime de ce qu’on appelle la “Pax
Americana”, nous n’arrivons pas à
forger un monde où les États-Unis
aideraient à désamorcer la violence et
les conflits, à réduire la pauvreté et
les déplacements de population et
apporteraient une paix réelle et
durable.
En outre, au lieu d’honorer avec
responsabilité ses devoirs de leader
mondial, Washington, avec en tête
ses propres intérêts, a abusé de son
statut de superpuissance et a accru le
chaos dans le monde en transférant à
l’étranger les risques de son système
financier, en attisant les tensions
régionales dans des différends
territoriaux et en menant des guerres
injustifiées sous des prétextes
fallacieux basés sur des mensonges
éhontés.
Le résultat est que le monde est encore
en train de chercher comment s’extirper
d’un désastre économique dû à la
voracité des élites de Wall Street,
alors que les meurtres et les bombes
sont le quotidien du peuple irakien des
années après que Washington se soit
vanté de l’avoir libéré du joug d’un
tyran.
Plus récemment, le blocage qui paralyse
de façon cyclique à Washington tout
accord bipartisan sur le budget fédéral
et le relèvement du plafond de la dette
menace de nouveau les importantes
réserves en dollars de nombreux pays et
angoisse fortement la communauté
internationale.
Il faut mettre un terme à de telles
périodes d’inquiétude, où les destinées
d’autres pays se trouvent dans les mains
d’une nation hypocrite, et un nouvel
ordre mondial doit être mis en place,
dans lequel toutes les nations, pauvres
ou riches, petites ou grandes, verront
leurs intérêts vitaux respectés et
protégés sur un pied d’égalité.
Dans ce but, plusieurs pierres
angulaires doivent être posées pour
construire ce monde désaméricanisé.
Pour commencer, toutes les Nations
doivent se plier aux principes de base
du Droit international, ce qui implique
de respecter la souveraineté des pays et
de cesser de se mêler des affaires
intérieures des autres.
En outre, l’autorité de l’Organisation
des Nations Unies dans le traitement des
points chauds mondiaux doit être
reconnue. Cela signifie qu’aucun pays
n’a le droit de mener toute forme
d’action militaire contre les autres
sans mandat de l’ONU.
En dehors de cela, le système financier
mondial doit également adopter certaines
réformes importantes.
Les économies de marché des pays
émergents et des pays en développement
ont besoin de faire entendre leur voix
dans les institutions financières
internationales, ce qui inclut la Banque
mondiale et le Fond Monétaire
International, de façon à mieux refléter
les transformations du paysage
économique et politique mondial.
Ce qui induit une réforme-clé : la mise
en place d’une nouvelle monnaie de
réserve internationale, qui doit être
créée pour remplacer le dollar
américain, afin que la communauté
internationale puisse définitivement se
tenir à l’écart des retombées de
l’agitation croissante de la politique
intérieure des États-Unis.
Bien entendu, le but de ces changements
n’est pas d’écarter complètement les
États-Unis – ce qui serait d’ailleurs
impossible -, mais plutôt d’encourager
Washington à jouer un rôle bien plus
constructif dans les affaires mondiales.
Et parmi toutes les options, nous
suggérons que les élus américains
commencent en premier lieu à sortir de
cette pernicieuse impasse.
Liu Chang, agence Xinhua
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