Al
Manar
Affaire Khashoggi : pourquoi la Turquie
ne montre
pas les enregistrements qu’elle dit
détenir ?
Leila Mazboudi
Mercredi 17 octobre 2018
Quelques jours à peine après le début de
l’affaire Khashoggi, la Turquie s’est
mise à assurer détenir des
enregistrements sonores ou vidéos sur
les circonstances de son assassinat
présumé. Sans jamais les montrer.
Naturellement, elle aurait dû en libérer
le contenu lors d’un point de presse.
Or, via ses médias, elle livre comme
argent comptant et au compte-goutte les
informations censées émaner de ces
enregistrements. Elles sont toutes plus
horribles les unes que les autres.
La dernière de ces présumées révélations
est que le journaliste saoudien Jamal
Khashoggi a été décapité. Bien entendu,
elle n’est pas contradictoire avec celle
que son cadavre a été découpé avec une
scie. Le choix de la scie comme arme du
crime est certes judicieux, car il verse
dans l’horreur.
Un autre détail est dument propagé sur
la scène du crime: « l’équipe de
combat a coupé les doigts de Khashoggi
puis sa tête », écrit le quotidien Yeni
Shafak qui s’est partagé la
diffusion des détails de l’assassinat
présumée avec Sabah news.
Il est dit aussi
selon ce dernier que son assassinat a eu
lieu en présence du consul Mohamad al-Otaïba
qui aurait protesté qu’il soit perpétré
dans son bureau, puis a été sommé de se
taire.
« Si tu veux arriver en Arabie saoudite
et vivre là-bas, tais-toi », lui aurait
dit l’un des auteurs de l’assassinat,
révèle le journal turc, à la foi bien
sur des enregistrements détenus par les
forces sécurité turques.
Le journal réitère
que la victime a été torturée « très
douloureusement » auparavant. Ces
derniers jours, a version de
l’acide qui aurait été utilisé pour
faire fondre son corps a aussi été
avancée.
Des détails d’une
nature différente sont aussi divulgués.
Entre autre sur les auteurs de l’acte :
il s’agirait de l’un des gardes du corps
personnel du prince héritier Mohammad
ben Salmane qui l’aurait abattu de ses
propres mains.
La semaine passée,
il a été question dans les médias turcs
que c’est grâce à la montre Apple de M.
Khashoggi, connectée sur son portable,
via le programme ICloud et gardée auprès
de sa fiancée que les enregistrements
ont été réalisés. Un détail de grande
valeur car il réconforte l’histoire des
enregistrements.
Force est de
constater que les innombrables détails
donnés par la presse turque, se
complètent et ne se contredisent pas. Il
y a dans leur divulgation progressive un
effort destiné à tenir le destinataire
en laisse : l’Arabie surtout. Mais tant
que les enregistrements ne sont pas
montrés en bonne et due forme, on peut
douter de leur existence.
La Turquie peut se
permettre de donner des détails les plus
affreux, sans que les saoudiens, les
seuls à même de savoir ce qui s’est
réellement passé, ne puissent ni
démentir ni confirmer.
Le fait que les
Turcs n’aient pas divulgué
officiellement les enregistrements ni
n’en ont exposé le contenu laisse à
penser sur leurs réelles intentions.
Soit ils veulent faire chanter les
Saoudiens avec lesquels les relations
n’étaient pas au beau fixe, pour obtenir
un traitement de faveur, bien arrosé.
Soit ils n’ont
aucun enregistrement et feignent en
avoir, usant de leur imagination pour
illustrer le scénario le plus plausible
qui aurait pu avoir eu lieu. Le but
serait peut-être de pousser les
Saoudiens à reconnaitre les faits qui
ont eu lieu sur leur sol, et n’en
constituent pas moins un affront que
seul Mohammad Ben Salmane a le toupet de
faire.
Le sommaire de Leila Mazboudi
Le dossier Hezbollah
Le
dossier Liban
Les dernières mises à jour
|