Le Saker
Comprendre pourquoi ils mentent
et
pourquoi ils s’en tirent
The Saker
Mardi 25 février 2020 Par The Saker − Le
12 février 2020 − Source
Unz Review via
thesaker.is
Au lieu d’une
introduction normale, voici
l’estimation, en constante évolution,
des dommages causés par l’attaque
iranienne contre la base militaire US en
Irak.
Le Pentagone a
recommencé.
Grâce à CNN, bien sûr. Voici les
«dernières nouvelles» :
Plus de 100
militaires américains ont été
diagnostiqués avec de légères lésions
cérébrales traumatiques à la suite de
l'attaque iranienne au missile du 8
janvier sur la base militaire d'Al Asad
en Irak, selon un responsable américain
connaissant les dernières informations.
Sur son site
Internet, le colonel Cassad a
proposé, disons, une
« évolution » de la vérité telle que
rapportée par les États-Unis, au fil des
jours :
X signifie
«victimes survivantes» Y signifie
«morts»
-
X = 0, Y = 0
-
X = 11, Y = 0
-
X = 34, Y = 0
-
X = 50, Y = 0
-
X = 64, Y = 0
-
X = 109, Y = 0
-
X> 200, Y> 80 ?
Cette dernière
ligne est, bien sûr, hypothétique, mais
au moment de la rédaction, nous sommes
déjà à
109 victimes !
Notez que si le
nombre de blessés survivants augmente
régulièrement, il n’y a pas
d’augmentation correspondante du nombre
de morts, pour eux tout ce que nous
avons, ce sont des «accidents
d’avion» – tous, nous dit-on,
accidentels. Demandez à n’importe quel
spécialiste, ou historien militaire,
il vous dira que ce type d‘«évolution»
est extrêmement improbable – voir
ici pour une discussion. En termes
simples – ce genre de chiffres est à
l’évidence impossible, ce qui signifie
qu’à partir du moment où l’Idiot en
chef a tweeté «jusqu’ici tout va
bien», les États-Unis mentaient
déjà :
Tout va bien ! Des
missiles ont été lancés depuis l'Iran
sur deux bases militaires situées en
Irak. L'évaluation des pertes et des
dommages est en cours. Jusqu'ici tout va
bien ! Nous avons de loin les militaires
les plus puissants et les mieux équipés
du monde ! Je ferai une déclaration
demain matin.- Donald J. Trump
(@realDonaldTrump)
8 janvier 2020
Y a-t-il vraiment
quelqu’un par ici qui niera que le
gouvernement américain ment à peu près
sur tout et n’importe quoi ? Et ce n’est
pas seulement le pouvoir exécutif, le
Congrès ment peut-être encore plus – les
deux partis, bien sûr. En fait, je
dirais que mentir est à la fois
nécessaire et attendu de tout
politicien américain. Quand quelqu’un,
comme Tulsi Gabbard ou Ron Paul, ne
respecte pas cette règle, les médias le
disqualifient immédiatement comme «agent
de Poutine» ou quelque chose de tout
aussi insipide.
Le fait est que
le mensonge est devenu la norme du
discours politique occidental.
C’est déjà assez
mauvais en soi. Mais il y a pire.
Le pire n’est
pas que les politiciens occidentaux
mentent, le pire est que tout le monde
s’en fout.
C’est vraiment
effrayant.
Pourquoi ?
Parce que dans
une société qui s’attend à ce que tout
le monde mente, les faits n’ont plus
d’importance.
Voilà donc la
question clé : nous en soucions-nous ou
pas ?
Eh bien, certains
s’en soucient encore clairement. Sinon
nous n’aurions pas les livres d’Howard
Zinn ou les films d’Oliver Stone parmi
les best-sellers. Nous n’aurions pas non
plus un mouvement dynamique sur la
vérité du 11 septembre. Vous voulez plus
de preuves ? Sûr ! Qu’en est-il de tous
ceux qui sont prêts à s’exiler – ou être
emprisonnés ! – pour défendre les droits
des historiens à enquêter librement sur
l’histoire de la Seconde Guerre
mondiale ? Qu’en est-il d’Edgar Snowden,
de Julian Assange ou de Bradley
Manning ? Qu’en est-il des millions de
personnes en Occident qui sont
descendues dans la rue pour protester
contre les différentes guerres contre
la terreur ? Non, il y a clairement
beaucoup de gens qui s’en soucient.
Le problème est que
leur impact est minime, et c’est ce que
je veux examiner aujourd’hui.
Les faits et la
vérité sont-ils devenus inutiles ?
Je doute qu’il y
ait beaucoup de personnes qui lisent ces
lignes et qui ne savent pas déjà que
Kennedy n’a pas été tué par un seul
tireur. De même, nous connaissons tous
la vérité sur l’incident du «golfe du
Tonkin». Ensuite, il y a ceux qui se
rendent compte que quelque chose à
propos de l’attaque de Pearl Harbor pue
jusqu’au ciel. Certains se souviennent
même de l’USS Liberty. La plupart
des spécialistes connaissent le réseau
GLADIO. Et je pourrais continuer
encore et encore. Le fait est que la
plupart des pires mensonges du 20e
siècle ont été démystifiés hors de tout
doute raisonnable, vraiment.
Chris Hedges a
vraiment touché le point sensible quand
il a
écrit l’«Empire of Illusions».
Il nomme les types d’illusions
suivants : l’illusion de
l’alphabétisation, l’illusion de
l’amour, l’illusion de la sagesse,
l’illusion du bonheur et
l’illusion de l’Amérique. Le
livre est très intéressant et je le
recommande vivement. Mais je pense qu’il
y a un aspect crucial de l’Empire en
tant qu’«Empire des Illusions» et
c’est l‘illusion de la réalité.
Qu’est-ce que je veux dire par là ?
Je veux dire ce qui
suit : la plupart des gens sont
conscients qu’il existe une sorte de «réalité»
quelque part. Bien sûr, beaucoup de gens
savent combien il peut être difficile de
déterminer ce qu’est vraiment la
«réalité réelle», ils préfèrent donc
affirmer avec prudence que la vérité est
une entreprise très difficile. Ce sont
des gens qui en savent assez pour savoir
qu’ils ne savent vraiment pas
grand-chose. Mais il y a aussi ceux qui
interprètent mal cette prudence comme
signifiant qu’il n’y a vraiment pas de
réalité du tout et tout ce qu’il y a,
c’est la somme de notre perception
subjective de la réalité qui est.
Rapidement nous avons glissé de :
-
La réalité est souvent très
difficile à établir,
à
-
La réalité est impossible à
établir
à
-
La réalité n’existe pas du tout
– ou, si elle existe, cela n’a pas
vraiment d’importance.
Bien sûr, la
plupart des gens ne déclarent pas
directement que la réalité n’existe pas
– ils agissent simplement comme si elle
n’existait pas.
Tout a commencé il
y a des siècles par une indifférence
assez redoutable à la Vérité de la part
des dirigeants de la papauté. Ces gens
étaient uniquement concernés par le
pouvoir, donc si la religion pouvait le
leur donner, alors la religion était
bonne, mais quand la religion imposait
des limites à ce que les Latins
pouvaient, ou ne pouvaient pas, faire –
disons comme lors de la fameuse «Controverse
de Valladolid» en
1550 – soudainement la religion est
devenue un obstacle qui a dû être
«réformé». Et, en effet, une fois
que le christianisme d’origine a été
« réformé » – que ce soit par la
Réforme ou la Contre-Réforme – tout le
ciel s’est écroulé sur la plupart de
l’humanité, l’ère de l’impérialisme a
été pleinement inaugurée et l’ancienne
devise « exitus acta probat » [la
fin justifie les moyens] est devenue
de facto la mesure de la
moralité.
Puis vint le
premier coup de la révolution
scientifique de la fin de la Renaissance
qui laissa très peu de crédibilité à la
papauté.
Le coup suivant est
venu pendant la Seconde Guerre mondiale
lorsque la papauté a vu son tout dernier
hourra se dissiper, assez
rapidement en fait – cela a duré aussi
longtemps que le «Reich millénaire»
d’Hitler, soit 12 ans. À la fin de la
guerre, le christianisme occidental
était une ruine et, pire encore, aucun
des vainqueurs de la Seconde Guerre
mondiale – Anglo
saxons réformés, Soviétiques athées,
Juifs – laïques ou non, etc. – n’avait
de sentiments chaleureux pour le
christianisme – à vrai dire, Hitler ou
Mussolini non plus. À ce stade, la
papauté a décidé de se suicider et a
organisé le Concile Vatican II,
qui doit être la reddition de valeurs civilisationnelles
la plus massive jamais tenue pour sacrée
dans l’histoire. Cette tentative mal
avisée de montrer «le catholicisme
romain à visage humain» a abouti à
un échec total. Ceux qui détestaient la
papauté n’étaient pas impressionnés et
ne la détestèrent que plus. Quant à la
hiérarchie confuse des «catholiques
romains», que j’appelle «latins»,
ils se sont retrouvés avec l’énigme
suivante : si le pape est infaillible,
ce qu’il est selon le Premier concile
du Vatican de 1868, comment peut-il
si clairement contredire les
enseignements de sa propre Église ? Sans
parler des enseignements de ses
prédécesseurs présumés
infaillibles ! Certains ont déclaré que
le pape était un hérétique, d’autres ont
simplement déclaré que le
«Saint-Siège» était
inoccupé («sedevacantisme»),
mais la plupart ont tout simplement
abandonné dans un dégoût total – les
scandales sexuels n’ont pas aidé ! Ils
ont simplement cessé de demander
« qu’est-ce que la vérité » ?
Lorsqu’une église
qui s’était déclarée « L’Église »
– toute en majesté, et à l’exclusion de
toutes les autres – pendant 910 ans
– presque un millénaire ! – agit soudain
comme si toutes les religions étaient
également « vraies », c’est
logiquement impossible, mais peu
importe, et quand un «Saint-Père»
autrefois puissant et
Vicaire du Christ – rien que ça
! – devient juste une autre figure
people, quelque part entre Kim
Kardashian et Greta Thunberg, vous savez
que quelque chose de très important
s’est produit.
Quelque chose de
très mauvais aussi.
La vérité n’est
pas seulement malvenue, elle n’existe
même pas, d’accord ?!
Les deux guerres
mondiales ont été la manifestation d’un
immense effondrement civilisationnel. La
Première Guerre mondiale a vu
l’effondrement des monarchies et empires
européens traditionnels. La Seconde
Guerre mondiale et son explosion de
haine absolument sans précédent, à tous
niveaux, politique, classe sociale,
race, langage, religion, etc., a vu
l’Europe, autrefois au centre de notre
planète, soumise à un bain de sang
monstrueux, bien que hautement
prévisible, et tomber entre les mains de
deux pouvoirs non-européens divisant le
monde en deux sphères d’influence – du
moins c’était le plan. Plus intéressant
encore, alors que les dirigeants et les
pays nominalement «chrétiens» ne
pouvaient pas ouvertement plaider en
faveur de la terreur de masse, les laïcs
«éclairés» n’avaient aucun
problème de ce type. Il suffit de lire
la prose du brillant et si clairement
satanique, Trotsky,
dans « Dictature contre
démocratie » ou le cinquième
chapitre d’Hitler
dans Mein Kampf –
ici en allemand si vous le pouvez !
Dostoïevsky et
Soljenitsyne ont tous deux prédit ce qui
arriverait inévitablement dans un monde
dans lequel règne le nihilisme.
Dostoïevsky a très simplement résumé
tout cela quand il a écrit, dans les
Frères Karamazov, « S’il n’y a pas de
Dieu, alors tout est permis ». Les
nihilistes ont simplement conclu
logiquement que s’il n’y a pas de Dieu,
et que tout est permis, alors rien
n’existe vraiment, certainement pas les
réalités «réelles» (objectives).
Même les notions de «bien» et de
«mal» n’ont absolument aucun sens
en l’absence d’un système de référence
absolu.
Bertrand Russel, et apparemment
aussi Voltaire, a un jour brillamment
écrit que «Dieu a créé l’homme à Son
image et l’homme Lui a rendu la
pareille». Des mots incroyables,
vraiment ! Si nous ne sommes pas la
création de Dieu, mais que Dieu est
notre création, cela nous rend très
semblables à Lui, n’est-ce pas ? Et, en
tant que «dieux» – ne
méritons-nous pas de définir nous-mêmes
ce qui est «bon» et ce qui est
«mauvais» ? Bien sûr, nous le
faisons ! Une fois que la vie et
l’existence n’ont plus de sens,
comment des concepts tels que le «bien»
ou le «mal» pourraient-ils en
avoir un ? Et c’est exactement ce que
nous avons fait, en particulier notre 21e
siècle post-moderne nihiliste !
Retour au point
de départ – évaluer l’argument du
«Il n’y a plus de vérité ? Et alors ?»
J’ai déjà mentionné
à plusieurs reprises l’hypocrisie
hallucinante des Dems [Parti
démocrate US ] qui détestent tous
Trump pour sa prétendue défense «Et
alors quoi ?» [So What ?] – ce qui,
soit dit en passant, est une mauvaise
caricature, sa défense était beaucoup
plus solide et logique – mais [les
Dems] n’ont absolument aucun
problème avec des gens comme Obama ou,
mieux encore, les Clinton à côté
desquels Trump ressemble presque à un
parangon d’honnêteté, d’intégrité avec
un sens aigu de la décence. Je veux
dire, vraiment, les Clinton ont fait
paraître des mafieux violents – italiens
ou juifs – comme purs et innocents. Et
quand ils mentent, ce n’est absolument
pas grave. Mais quand Trump ment, il
suscite le genre de rage aveugle,
impuissante, qui dans l’Évangile est
décrite par les mots «pleurant et
grinçant des dents». C’est peut-être
à cela que les libéraux américains font
référence lorsqu’ils parlent du «syndrome
de dérangement de Trump» ?
La vérité est
simple : nous savons tous que Trump a
menti. À propos de la contre-attaque
iranienne et de bien d’autres choses.
Nous savons également qu’Obama a menti.
Et bébé-Bush aussi. Et Clinton et ses
cigares sans sexe
1… Et nous nous souvenons
aussi de «Lisez sur mes lèvres, pas
de nouvelles taxes» aussi bien que
de «Nous n’avons pas, je le répète,
pas échangé d’armes ou quoi que ce soit
d’autre (en Iran) contre des otages, et
nous ne le ferons jamais». Alors
oui, on s’en souvient.
Nous ne nous en
soucions plus, tout simplement.
Nous avons été
complètement désensibilisés non
seulement à la vérité, mais même à la
réalité.
Et après, ok ?
Et les conséquences
sont terribles en effet !
Conclusion : la
vie dans un monde sans réalité
Le fait que nous,
qui vivons à l’intérieur de l’Empire,
sommes dans un monde sans réalité a un
impact énorme sur les actions de nos
dirigeants. Après tout, si personne ne
croit vraiment à la réalité ou ne s’en
soucie pas vraiment, alors pourquoi nos
dirigeants devraient-ils se soucier
d’améliorer la réalité, en particulier
pour nous ? Il est beaucoup, beaucoup
plus simple de présenter benoîtement un
message «de bonne humeur» sur la
formidable «Amérique» – du
genre : «Nous avons les militaires
les plus puissants et les mieux équipés
du monde, et de loin !». Et peu
importe que les militaires les plus
puissants de la Galaxie ne puissent même
pas protéger leurs propres soldats alors
qu’ils savaient exactement quand et où
la contre-attaque iranienne allait se
produire.
Bien sûr, avec le
temps, tout l’édifice de mensonges
construit par les politiciens américains
et européens s’écroulera, soit à la
suite d’une défaite militaire impossible
à cacher, soit à cause d’un choc
économique majeur. Ce sera totalement
inattendu pour ceux qui choisissent de
vivre dans un monde sans réalité.
The Saker
Traduit par jj,
relu par Kira pour le Saker Francophone
Notes
-
Allusion à la défense utilisée par
Clinton lorsqu’il a déclaré qu’il
n’avait pas eu de relation sexuelle
avec Monica Lewinsky, sa secrétaire,
car il l’aurait pénétrée avec un
cigare
↩
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