Syrie
Syrie. La fracture de la ligne de front
marque le début
de la bataille décisive
pour Idlib
Moon of Alabama
Samedi 17 août 2019 Par
Moon of Alabama – Le 15 aout 2019
Au cours des
derniers mois, le gouvernement syrien a
un peu progressé dans la partie nord du
gouvernorat d’Hama, à la frontière du
gouvernorat djihadiste d’Idlib. La
brèche ainsi créée dans les lignes de
défense djihadistes doit maintenant être
utilisée pour lancer une vaste campagne.
Les cartes
montrent les progrès réalisés entre le
15 mai 2019 et aujourd’hui (rouge –
contrôle gouvernemental ; vert –
contrôle djihadiste).
Front au nord de
Hama – 15 mai 2019
via
LiveUAmap
Front au nord de
Hama – 15 août 2019
via
LiveUAmap
L’opération
actuelle est un mouvement de pinces sur
les côtés ouest et est de Khan Shaykhun.
Elle est faite pour encercler les villes
djihadistes d’Al Lataminah, Kafr Zayta,
Khan Shaykhun et Morek.
Le nord des
gouvernorats de Hama et d’Idlib est
occupé par Hayat Tahrir al Sham (HTS),
un groupe aligné sur Al-Qaida. Le HTS a
vaincu plusieurs groupes « rebelles »
soutenus par les Turcs et les a chassés
de la zone qu’il dirige. Du côté syrien,
la Force du Tigre et la 4ème division
sont les unités principales impliquées
dans le combat actuel.
La première phase
de l’opération, qui a débuté il y a
trois mois et a été interrompue par
plusieurs cessez-le-feu, s’est avérée
difficile. Les djihadistes disposent
d’un bon équipement incluant un grand
nombre de missiles antichars TOW,
fournis par les États-Unis, d’une portée
de 5 000 mètres. Ils disposent également
d’un nombre important de lance-missiles
d’artillerie. Leurs attaques étaient
bien préparées et ils ont défendu chaque
maison avec acharnement. Ils ont aussi
contre-attaqué avec un certain succès en
utilisant des véhicules conduits par des
kamikazes.
Les pertes de
l’armée syrienne au cours de la première
phase ont été inacceptables. Cela a
conduit à un changement de tactique. Les
forces aériennes syriennes et russes ont
lancé une vaste campagne de bombardement
avec des centaines de frappes aériennes
et d’artillerie par jour contre les
positions djihadistes. Des drones ont
été utilisés pour trouver les
lance-missiles mobiles cachés dans des
plantations fruitières et pour diriger
l’artillerie et les bombardiers vers ces
objectifs. ANNA News a publié
plusieurs vidéos de cette vaste campagne
(1,
2,
3 – sous titres en anglais). La
campagne aérienne a coûté aux
djihadistes une quantité importante de
matériel et de combattants. Un seul
avion de l’armée, un SU-22 syrien, a été
perdu au combat.
L’armée syrienne a
également commencé à mener des attaques
nocturnes d’envergure. Ses nouveaux
chars T-90 et T-72 modernisés ont une
excellente vision thermique nocturne et
peuvent détruire des cibles à longue
distance. L’infanterie peut avancer sous
leur protection. Au lieu de se battre le
long des routes d’une ville à l’autre,
l’armée s’est d’abord déplacée sur les
hauteurs et a poursuivi son avance à
partir de là. Grâce à des opérations
d’attaque aux flancs, les troupes ont
franchi plusieurs lignes de défense
pourtant bien préparées. Les djihadistes
sont maintenant en fuite. Cette
vidéo de l’ANNA (sous titres
en anglais) montre l’opération de
libération de la ville d’Al Habit (Al
Hobeit), menée la semaine dernière, et
donne une bonne impression des nouvelles
tactiques. L’armée s’est depuis déplacée
plus au nord-est d’Al Habit et a pris
Kafr Ayn et Tell As.
L’approche au nord
de Khan Shaykhun encerclera l’endroit
dans les prochains jours. Les
djihadistes qui seront restés dans cette
poche auront peu de chances de survivre.
Il est plus probable qu’ils s’enfuient
vers le nord, le long de l’autoroute M5.
La situation
actuelle
via
ISWnews
Cette zone bientôt
encerclée abrite également l’un des
postes d’observation du cessez-le-feu
tenus par les Turcs. Bien que ces postes
soient censés superviser ce
cessez-le-feu sans cesse rompu, ils
servent en fait de centres
d’approvisionnement et de renseignements
pour les forces djihadistes. Il sera
intéressant de voir la réaction turque
lorsque l’armée syrienne frappera à la
porte de ce poste d’observation.
Il y a toujours de
profondes divisions sur le front
anti-syrien. Le HTS a repoussé les
tentatives turques de contrôler la zone
qu’il détient. Il
a rejeté les différents
cessez-le-feu auxquels la Turquie, la
Russie et l’Iran sont parvenus dans le
cadre du processus d’Astana. Lorsque ses
lignes de défense se sont brisées, il
a refusé les offres d’aide faites
par les gangs de l' »Armée
nationale », sous contrôle turc.
Lorsque les
factions de l'armée nationale ont
récemment tenté d'envoyer des
combattants à Idlib, le HTS a repoussé
tout le monde, du sultan Murad à Firka
Hamza, Sultan Suleyman Shah et Jaysh al
Islam. Une délégation de 20 personnes de
Jaysh al Islam venant négocier un droit
de passage a été emprisonnée par HTS
La Russie et la
Syrie continueront d’utiliser cette
division entre les différents groupes
que la Turquie soutient officiellement
ou officieusement pour inciter à
davantage de luttes intestines dans la
zone « rebelle« . Cela s’est
avéré être l’une de leurs meilleures
armes.
La récupération de
la zone et de Khan Shaykhun, une ville
qui comptait 35 000 habitants avant la
guerre, sera une victoire significative.
Mais cette opération n’est que le début
d’une plus vaste campagne. La brèche,
d’abord assez lente, du front va
maintenant se transformer en une
campagne dynamique. Le plan plus vaste
qui sous-tend ce projet est probablement
d’origine russe :
Les Soviétiques ont
développé le concept de bataille en
profondeur et, en 1936, c’était devenu
partie intégrante du Règlement de
campagne de l'Armée rouge. Les
opérations en profondeur comportaient
deux phases : une bataille tactique en
profondeur, suivie de l'exploitation de
ce succès tactique, connue sous le nom
de Conduite des opérations de bataille
en profondeur. Une bataille en
profondeur envisage de briser les
défenses avancées de l'ennemi, ou zones
tactiques, par des assauts d'armes
combinées, qui seraient suivis par de
nouvelles réserves opérationnelles
mobiles non engagées, envoyées pour
exploiter la profondeur stratégique d'un
front ennemi. Le but d'une opération en
profondeur est d'infliger une défaite
stratégique décisive aux capacités
logistiques de l'ennemi et de rendre la
défense de son front plus difficile,
impossible, voire inutile. Contrairement
à la plupart des autres doctrines, la
bataille en profondeur met l'accent sur
la coopération en matière d'armement à
tous les niveaux : stratégique,
opérationnel et tactique.
L’armée syrienne
poursuivra les djihadistes en fuite le
long de l’autoroute M5 avec de fortes
forces blindées à l’avant et sous le
couvert des bombardements de l’aviation.
Les villes défendues le long de la route
peuvent être enveloppées d’est en ouest,
encerclées et laissées à l’infanterie
suivante pour le nettoyage. Cette
avancée ne doit pas s’arrêter avant que
les forces n’atteignent Saraquib, à la
jonction de l’autoroute M4 et M5. La
bataille tactique en profondeur peut
alors être utilisée davantage pour
récupérer tout le gouvernorat d’Idlib.
Le gouvernorat
d’Idlib – 15 août 2019
via
LiveUAmap
Pour soutenir
l’avancée venant du sud, des fronts
supplémentaires doivent être ouverts à
l’ouest d’Alep, le long de la M5, et de
Latakia, à l’ouest, le long de
l’autoroute M4 à travers Jish ash Shugur
et jusqu’à Saraqib. La bataille pour
percer la ligne de front à Lattaquié se
poursuit depuis un certain temps, mais
aucune percée décisive n’a encore été
réalisée.
La réappropriation
des autoroutes M4 et M5 est d’une
importance capitale pour l’économie
syrienne. La Syrie, la Russie et l’Iran
devraient résister à tous les appels
lancés par les États-Unis et la Turquie
pour qu’ils cessent leur campagne avant
que ce travail ne soit fini.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan,
relu par Jj pour le Saker Francophone
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