Le Saker
La campagne américaine pour affaiblir
« l’axe de résistance » en Iran est en
échec
Moon of Alabama
Mercredi 11 décembre 2019
Par Moon of Alabama
− Le 9 décembre 2019 Lorsque le
Premier ministre israélien Benjamin
Netanyahu a été inculpé de plusieurs
crimes, nous avions
prédit qu’il deviendrait plus
dangereux :
Netanyahu se battra
bec et ongles pour gagner et conserver
son immunité. Il essaiera de délégitimer
le juge et il utilisera toutes les
astuces disponibles pour rester en
fonction.Cela le rend encore
plus dangereux qu'il ne l'est
habituellement.
Il pourrait même
décider de faire quelque chose, comme
commencer une grande guerre, pour
empêcher son éviction du pouvoir.
Le Liban, la Syrie
et l'Iran doivent faire attention.
Maintenant,
l’ancien agent et diplomate du MI6,
Alastair Crooke,
détecte une nouvelle tentative
israélienne pour déclencher une guerre
contre l’Iran :
"Il s'agit d'une
opportunité historique", a
chuchoté cette semaine un des
proches de Netanyahu à Ben Caspit - un
grand journaliste israélien : ...Quelle sorte
d'histoire cela pourrait-il être ?
Pourquoi six mois ? Eh bien, Caspit le
souligne : «Les fidèles de Netanyahu,
dirigés par le ministre Yuval Steinitz,
déclarent clairement qu’une guerre
généralisée est susceptible d’éclater au
cours des six prochains mois entre
l’Iran et ses adversaires dans la
région, y compris Israël». Et le
nouveau ministre de la Défense, Bennett,
menace l'Iran presque quotidiennement.
"Peut-être que
Netanyahu a simplement besoin d'une
guerre avec l'Iran pour survivre
politiquement", a déclaré l'un des
dirigeants
Bleus et Blancs à Caspit : "C'est
effrayant et dangereux ...".
Il n’y a rien de
nouveau à cela pourrait-on nous
rétorquer. Netanyahu a depuis des années
comploté pour déclencher une guerre
américaine contre l’Iran. Mais jusqu’à
présent, il n’y avait aucune raison pour
que les États-Unis en fassent une. La
guerre a besoin d’un narratif, d’une
histoire qui peut être vendue aux gens
qui devront payer pour cela. Crooke en
voit une possible dans les récentes
émeutes en Iran et ailleurs :
Eh bien, voici le
narratif : «Pendant longtemps, il
semblait que la propagation de
l'influence iranienne à travers le
Moyen-Orient était imparable.
Maintenant, toute l'entreprise
d'hégémonie iranienne est en danger. Des
manifestations se déroulent en Irak et
au Liban depuis des semaines, mettant
leurs économies à l'arrêt et forçant
leurs premiers ministres, adoubés par
l'Iran, à démissionner. Il n'y a pas de
fin en vue pour les manifestations… ».Et par conséquent,
la poussée israélienne - dirigée par le
nouveau ministre de la Défense, Bennett,
qui prétend que c'est maintenant -
précisément - le moment pour les
États-Unis d'agir contre l'Iran. Ceci
est le narratif pour la guerre.
L’idée est donc que
les turbulences actuelles dans les pays
de «l’axe de la résistance» –
Liban, Syrie, Irak et Iran – ont
tellement affaibli l’Iran qu’il peut
être attaqué.
Mais un regard sur
chacun de ces pays montre que la
véracité du récit est douteuse.
Le Liban traverse
une crise monétaire parce que les
États-Unis ont sanctionné les envois de
fonds des expatriés – environ 8
milliards de dollars par an – vers le
pays. Cela a déclenché l’effondrement
d’un stratagème frauduleux, utilisé par
les riches au Liban, pour augmenter la
dette publique tout en canalisant
l’argent de l’État, via la Banque
centrale du Liban, dans leurs
propres poches :
La Banque du Liban
a émis des bons du Trésor à des taux
d'intérêt très élevés ; la majeure
partie de cette dette a été achetée par
d'autres banques libanaises. Jad
Chaaban, professeur à l'Université
américaine de Beyrouth, a découvert que
«des individus étroitement liés aux
élites politiques contrôlent 43% des
actifs du secteur bancaire commercial
libanais». Il a également calculé
que, pour prendre un exemple, la famille
Hariri avait gagné 108 millions de
dollars entre 2006 et 2015 sur les
intérêts de la dette publique.
L’idée derrière les
sanctions américaines était de nuire
économiquement au Hezbollah, de
déclencher une guerre civile contre lui
et de l’évincer du gouvernement
libanais. Mais le plan a
échoué. Alors que la livre libanaise
a perdu quelque 40% de sa valeur, le
Hezbollah a augmenté le salaire de ses
militants :
Aujourd'hui, aucun
citoyen libanais n'est en mesure de
disposer de sa propre épargne, ou des
actifs de son entreprise dans les
banques, en raison de restrictions sur
les retraits et d'un «contrôle des
capitaux» efficaces. Seuls de petits
montants peuvent être livrés aux
titulaires de compte - environ 150 à 300
$ par semaine dans un pays où les
paiements en espèces prévalent. Personne
n'est autorisé à transférer un montant à
l'étranger, sauf pour les frais
universitaires ou les demandes spéciales
d'importation de biens de première
nécessité.Cependant, le
Hezbollah, la principale cible
américano-israélienne, n'a pas été
affecté directement par les sanctions
américaines et par les nouvelles
restrictions financières. Les militants
ont été payés, comme c'est le cas
mensuellement, en dollars américains
avec une augmentation de 40% (en raison
de la dévaluation de la monnaie locale)
avec les compliments de «l'Oncle Sam».
Comme de nombreuses
banques et industries syriennes ont
utilisé le système bancaire libanais, la
crise monétaire au Liban a également
entraîné une forte baisse de la livre
syrienne. C’est un problème pour la
Syrie, mais ses alliés aideront à en
atténuer les effets.
Les sanctions
américaines contre le Liban n’ont pas eu
l’effet souhaité. Il n’y aura pas de
guerre civile contre le
Hezbollah. Celui-ci, et son arsenal de
missiles, qui agit comme dissuasion
contre Israël, sont toujours prêts.
Les manifestations
en Irak sont authentiques et ont fait
tomber le gouvernement. Mais les
tentatives des États-Unis pour les
utiliser contre les Forces de
mobilisation populaire (al-Ḥashd
ash-Shaʿbi), créées en 2014 par l’Iran
pour vaincre État islamique, échouent
également. La position américaine en
Irak est faible. Elle ne peut pas
concurrencer
l’influence de l’Iran :
Le président Barham
Salih a entamé des pourparlers,
immédiatement après la démission
d'Abdul-Mahdi, avec différents blocs
politiques. Le général iranien Qassim
Soleimani, chef de la force d'élite
iranienne Quds et architecte de son
appareil de sécurité régional, est
également venu à Bagdad pour rencontrer
des responsables clés.
Les bases
militaires américaines en Irak
subissent de plus en plus
d’attaques.
De sincères
protestations contre la hausse des prix
du carburant en Iran ont été suivies un
jour plus tard par des attaques
déclenchées prématurément par des
groupes clandestins contre les
infrastructures et les banques du pays.
L’Iran a immédiatement réagi pour les
éliminer. Comme Crooke le
décrit :
Les forces de
sécurité ont réagi militairement -
arrêtant et tuant de nombreux insurgés.
Et oui - Internet a été fermé. Mais pas
l'internet iranien - seulement
l'internet mondial. Ainsi, l'équivalent
iranien de WhatsApp et
Telegraph, et les chaînes
d'information iraniennes étaient
toujours accessibles - bien que
l'internet mondial ne l'était pas. La
colère déclenchée à l'étranger par la
fermeture de l'Internet externe reflète
peut-être la surprise et l'irritation
que l'Iran ait cette capacité.
Probablement, ce n'était pas une
capacité que l'Iran était censé
posséder.Que se passait-il
donc ? Le gouvernement iranien,
semble-t-il, avait déjà eu connaissance
de plans visant à organiser des attaques
de «militants», dans le cadre
d’un plan de perturbation - établi et
financé à l’extérieur. Mais le plan
d'origine indiquait que ces actions
aurait lieu au début de l'année
prochaine.
Ce qui semble
s’être produit, c’est que lorsque les
manifestations de hausse de carburant
ont commencé, ces «militants» ont
reçu le feu vert pour «saisir le
moment». En d'autres termes, ils ont
activé prématurément tous leurs plans
pré-préparés. C'était exactement ce que
les forces de sécurité iraniennes
voulaient et avaient cherché. Cela leur
a permis de «déjouer» le complot
et d'arrêter ou de tuer les chefs de
file.
La construction du
réseau clandestin d’insurgés en Iran a
dû prendre des années. Cela a
probablement été fait par la CIA en
collaboration avec la
secte MEK. Les militants étaient
censés être dirigés, comme les émeutiers
de Hong Kong, via des services de
messagerie Internet. Lorsque ces lignes
de commandement et de contrôle ont été
coupées, les services de sécurité
iraniens n’ont eu, comme nous l’avions
prédit, aucun problème pour éliminer
les groupes militants.
Les États-Unis ont
tout essayé contre l’Iran, sauf mener
une guerre pure et simple. Mais leurs
plans contre l’Iran et ses amis échouent
partout.
Vendredi, la
campagne de pression des États-Unis
contre l’Iran a fait l’objet d’une
conférence de presse du Département
d’État au cours de laquelle Matt Lee de
Associated Press a contesté
l’affirmation du secrétaire adjoint
Schenker selon laquelle la campagne
était un succès :
Secrétaire
adjoint Schenker : Les Iraniens ont
souvent, ou ont certainement dans le
passé, pris des mesures agressives
lorsqu'ils se sentent sous pression.
On le voit dans la réponse, par exemple,
à la campagne de pression maximale qui a
fonctionné au cours des mois. Au cours
des cinq ou six derniers mois, l'Iran
est devenu de plus en plus agressif. C'est
une trajectoire, vraiment, où ils ont
d'abord augmenté le rythme opérationnel
des Houthis contre les Saoudiens, puis
augmenté la rhétorique et fait monter la
température en Irak contre le personnel
américain, passant, de là, à saborder
des bateaux à Fujairah, puis à les
kidnapper, puis à tirer et abattre les
drones américains dans l'espace aérien
international, et plus récemment Abqaiq,
visant directement avec leurs propres
missiles les installations pétrolières
saoudiennes. ...Question :
Et vous semblez suggérer dès
maintenant que la campagne de pression
maximale est un succès car elle a
entraîné une plus grande agression
iranienne et abattu des drones
américains.
Secrétaire
adjoint Schenker : Moi ? non.
Question :
Eh bien, si -
Secrétaire
adjoint Schenker : C'est peut-être
ce que vous avez déduit.
Question :
Non, non, non, c'est - c'est comme
ça, eh bien, non, je pense que c'est
comme ça -
Secrétaire
adjoint Schenker : La campagne de
pression fonctionne. Ils sont clairement
sous pression, ils ont peur, et ils se
déchaînent. Ils sont aussi -
Question :
Oui, mais si c'est ça un succès, je
veux dire -
Secrétaire
adjoint Schenker : Ils connaissent
également une croissance négative à deux
chiffres.
Question :
Très bien, et alors ...
Secrétaire
adjoint Schenker: Les gens dans les
rues protestent contre le régime pour sa
corruption et sa mauvaise gestion
économique -
Question :
Oui, mais il y a sûrement -
Secrétaire
adjoint Schenker : ... pour avoir
dépensé tout l'argent du peuple iranien
dans des milices à l'étranger, comme
dans -
Question : Sûrement
le critère - sûrement le
critère du succès de la politique
américaine, sa politique étrangère
n'importe où, pas seulement avec l'Iran,
c'est que le pays - l'autre pays soit
moins agressif et moins susceptible
d'abattre des drones américains ou
d'attaquer des bases américaines ou de
menacer -
Secrétaire
adjoint Schenker : Il y a - non,
Matt, il y a - pour être juste, là -
les choses empirent parfois avant de
s'améliorer en ces termes.
Les États-Unis
surestiment constamment leurs capacités
à mettre l’Iran à genoux. Alors que le
PIB de l’Iran baisse par manque de
ventes de pétrole, l’économie interne
est florissante et l’emploi est en
hausse alors que les importations
sont remplacées par la production
locale :
La hausse du dollar
apporte un grand changement dans la
structure des prix en Iran, ouvrant des
opportunités substantielles pour une
production rentable dans les secteurs
non pétroliers qui emploient 99% de la
main-d'œuvre. Ce sont ces secteurs qui
sont submergés par des importations bon
marché lorsque les revenus pétroliers
abaissent leurs prix.Ainsi, à contrario,
et comme le lisent les manuels
économiques, lorsque les revenus du
pétrole baissent et que les prix des
importations augmentent, la demande
passe des produits étrangers aux
produits domestiques, encourageant les
entreprises à embaucher des travailleurs
et à accroître la production. Par
exemple, lors de mes précédentes visites
en Iran, j'aurais peut-être acheté une
boîte de céréales Kellogg parce qu'elle
avait meilleur goût que la marque
iranienne et n'était que deux fois plus
chère. Mais l'été dernier, la
dévaluation ayant augmenté le ratio des
prix à quatre ou cinq, j'ai décidé
d'acheter la marque iranienne.
Étonnamment, elle avait meilleur goût,
soit parce que la qualité s'était
améliorée, soit parce que les prix
déterminent le goût des habitants
d'Ispahan !
L’inflation en
Iran, causée par les sanctions
américaines, revient à des niveaux
supportables. Le nouveau budget du
gouvernement devrait
dépendre pour moins de 10% des
ventes de pétrole :
Rouhani a déclaré
au Parlement que le budget de 4 845
milliards de rials, soit 36 milliards
de dollars au taux actuel, avait été
conçu pour aider le peuple iranien à
surmonter les difficultés. ...Rouhani a déclaré
qu'en dépit des sanctions américaines,
son gouvernement s'attendait à gagner
près de 455 milliards de rials - 3,4
milliards de dollars - grâce aux
exportations de pétrole.
Mais il a également
déclaré que l'économie iranienne non
pétrolière serait "en croissance"
l'année prochaine.
Alors que l’Iran et
ses alliés sont sous pression, ils ne
risquent certainement pas de
s’effondrer. Le narratif israélien pour
une guerre est frauduleux.
Netanyahu peut
vouloir une guerre, ne serait-ce que
pour éviter la prison. Mais la guerre
n’est pas populaire aux États-Unis et
Trump n’en déclenchera pas une au cours
d’une année électorale.
Ce dont Trump a
besoin, c’est d’une sortie de son
agression ratée contre l’Iran. Il a
besoin de pourparlers avec l’Iran mais
le pays insiste sur le fait qu’il doit
d’abord lever les sanctions.
Je m’attends à ce
qu’il ne le fasse qu’après sa
réélection.
Moon of Alabama
Traduit par jj,
relu par Wayan pour le Saker Francophone
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