Le Saker
Syrie : la saga des armes chimiques,
corruption et manipulation …
Moon of Alabama
Dimanche 1er décembre 2019 … l’Organisation
pour l’interdiction des armes chimiques
(OIAC) a fabriqué un prétexte pour la
guerre en éliminant ses propres
recherches scientifiques.
Par
Moon of Alabama − 29 novembre 2019
Des fuites de
l’OIAC indiquent que sa direction a
ignoré, ou manipulé, les informations
que sa mission d’inspection des faits
avait fournies sur l’incident de la
Douma survenu en avril 2018 en Syrie.
L’histoire de
l’incident de la Douma et de l’OIAC
ainsi que la manipulation des médias qui
l’entoure sont disponibles
auprès du Groupe de travail sur
la Syrie, la propagande et les médias
sous le
titre : Comment l’enquête de
l’OIAC sur l’incident de Douma a été
trafiquée.
La direction de
l’OIAC a ignoré le fait que les analyses
techniques, chimiques et médicales de
ses propres spécialistes ont innocenté
le gouvernement syrien de l’allégation
selon laquelle il aurait empoisonné une
quarantaine de personnes à Douma en
larguant des bidons de chlore par
hélicoptère.
Le personnel
scientifique de l’OIAC a constaté que le
fait de laisser tomber les bidons
n’aurait pas pu causer les dommages
constatés. Ces bidons doivent avoir été
placés à la main. La quantité de
produits chimiques organiques chlorés
trouvés sur les deux scènes était très
faible et il est très peu probable
qu’ils résultent d’une réaction avec le
chlore gazeux. Les symptômes médicaux
des victimes, comme le montrent diverses
vidéos au moment des faits, étaient
incompatibles avec le décès par
inhalation de chlore.
La direction de
l’OIAC a déformé les rapports,
intermédiaire et
final, de l’incident afin de donner
l’impression que le gouvernement syrien
était coupable d’avoir largué des bidons
de chlore. L’analyse technique interne
détaillée a été ignorée. Elle a été
remplacée par une analyse externe
provenant de sources inconnues qui ont
affirmé le contraire de ce que les
ingénieurs et les chimistes de l’OIAC
ont découvert. Le libellé du rapport
suggère que des concentrations élevées
de produits chimiques organiques chlorés
ont été détectées sans donner les très
faibles concentrations – en parties de
milliards – qui ont été réellement
trouvées. L’analyse médicale interne a
été éliminée du rapport officiel.
Des
courriers électroniques et des
documents de l’OIAC ont été
divulgués et des lanceurs d’alerte se
sont
présentés pour parler à des
journalistes et à des
avocats internationaux. Le
journaliste vétéran Jonathan Steele, qui
a parlé aux lanceurs d’alerte, a écrit
un excellent
article sur ces questions. Peter
Hitchens, chroniqueur du journal Mail
on Sunday, a relevé le problème
et en a
parlé sous l’en tête Un
nouveau dossier trafiqué : un courrier
électronique explosif a fuité, il
affirme que le rapport de l’organisme de
contrôle de l’ONU faisant état d’une
attaque au gaz toxique par Assad avait
été falsifié – était-ce pour justifier
les tirs de missiles britanniques et
américains sur la Syrie ?
Les
«journalistes citoyens» de
l’organisme de propagande financé par le
gouvernement américain Bellingcat,
tentèrent de manière risible de
réfuter les affirmations du lanceur
d’alerte. Caitlin Johnstone les a mis
en pièces.
Hitchens a
également
réagi à l’escroquerie de
Bellingcat : Bellingcat ou Chien
de garde de l’establishment ?
Citant
Bellingcat, Peter Hitchens (PH)
écrit :
Bellingcat:
Cependant, une comparaison des points
soulevés dans la lettre par rapport au
rapport final sur Douma montre
clairement que l'OIAC a non seulement
traité ces points, mais a même modifié
la conclusion d'un rapport précédent
afin de refléter les préoccupations
dudit employé.PH : Mis à
part les mots «une» et «la»,
tout le contenu du paragraphe ci-dessus
est, pour le dire poliment, erroné. Les
Bellingcat ont été si impatients
de ridiculiser la fuite de l'OIAC
qu'ils se sont précipités - comme
beaucoup l'ont fait lorsque l'attaque a
été rendue publique - pour juger sans
attendre les faits. Les lanceurs
d'alerte de l'OIAC en savent plus long
que ce qui a été publié, mais les
procédures de vérification ont ralenti
sa publication. J'espère que d'autres
documents seront bientôt révélés.
L’un, que j’ai vu,
est très intéressant. C'est un
mémorandum de protestation, rédigé
plusieurs mois après le courriel de
protestation publié ce week-end.
Celui-ci a été envoyé au Directeur
général de l'OIAC, Fernando Arias - il y
a un doute sur le fait que cela lui soit
jamais parvenu - par un enquêteur de
l'OIAC, l'un de ceux qui se sont rendus
à Douma, le 14 mars 2019. Il m'a été
communiqué par des sources fiables
jusqu'à présent. Cela fait presque deux
semaines après la publication du
rapport «final» du vendredi 1er
mars 2019 censé avoir dissipé les doutes
des dissidents.
Dans sa discussion
sur le problème, Hitchens mentionne
également notre blog :
La revendication
suivante dans le rapport de l’OIAC :
«Divers produits chimiques organiques
chlorés ont été trouvés dans des
échantillons des emplacements 2 et 4,
ainsi que des résidus d’explosif. Ces
résultats figurent à l’Annexe 3. Les
travaux de l’équipe visant à établir
l’importance de ces résultats sont en
cours», a donné lieu à des
reportages remarquables dans les médias.
Ceux-ci sont présentés
ici.Bellingcat
et ses partisans n’apprécient peut-être
pas la source, et je ne l’aime pas
beaucoup moi-même, mais c’est un
enregistrement unique, autant que je
sache, de la réponse initiale des médias
à la question du rapport du 6 juillet.
J'ai fait vérifier ces affirmations
auprès de Reuters et de la BBC
et ils ne contestent pas ce qui est dit,
bien qu'ils aient ensuite corrigé le
résultat.
C’est triste,
Peter, que tu n’aimes pas trop ce blog
mais j’ai peur de ne rien pouvoir faire
pour toi.
Il y a quelques
heures, Hitchens a publié un autre
article En défense du journalisme
– les » journalistes citoyens » n’en
sont pas. Il s’en prend de nouveau à
Bellingcat et à d’autres
« journalistes citoyens » et
« chercheurs » pour révéler que
lui-même avait maintenant parlé à un
lanceur d’alerte de l’OIAC :
"Heureusement
pour moi [le lanceur d'alerte], j'ai le
soutien de personnes qui savent, au fond
d'elles mêmes, que le journalisme doit
prendre des risques pour être bon.
Quelqu'un a dû me dire «d'accord» quand
je suis parti à la dernière minute il y
a quelques jours, pour aller dans une
maison sûre quelque part dans une grande
ville du continent européen.Quelqu'un a dû
débourser mes billets de train et
d'hôtels pas chers. Quelqu'un a dû avoir
le courage de me laisser raconter mon
histoire à propos de ce que j'ai
découvert quand je suis arrivé là-bas -
comme un honnête homme tourmenté."
Son travail
consistait à dire la vérité et il était
empêché de le faire. Alors je pouvais
l'aider. En quatre décennies de
journalisme, je me suis rarement senti
plus proche du Saint Graal, de la vérité
à raconter et de la vérité qui ferait
trembler le pouvoir. C'était donc ça.
Un prétexte pour la guerre avait été
fabriqué par la suppression de
l'enquête.
Le « prétexte
pour la guerre » ne peut pas faire
référence à la
frappe de missile F-UK-US lancée le
16 avril 2018, huit jours après
l’incident de Douma et
avant que des inspecteurs de l’OIAC
ne se soient rendus sur le site.
Hitchens doit faire
référence à une guerre imminente censée
être basée sur le rapport désormais
disgracié de l’OIAC.
Il y a en effet un
chemin possible vers la guerre.
L’accord initial
concernant les enquêtes de l’OIAC en
Syrie stipulait que celle-ci rendrait
compte des résultats de ses
enquêtes dans le cadre d’un
mécanisme d’enquête conjointe (JIM)
des Nations Unies, suite auquel le
Conseil de sécurité imputerait la
culpabilité à l’une ou l’autre des
parties au conflit. Les États-Unis ont
tenté d’utiliser le processus JIM pour
imputer au gouvernement syrien des
incidents chimiques douteux en Syrie. La
Russie a mis son veto à ces tentatives.
Les États-Unis ont alors décidé de
contourner le processus des Nations
Unies.
En 2018, les
États-Unis et leurs mandataires ont
manipulé le statut de l’OIAC et lui ont
ajouté la tâche consistant à
identifier le coupable d’incidents
chimiques et le mettre à l’ordre du jour
de l’OIAC :
[La décision]
appelle également le secrétariat [de
l'OIAC] à prendre des dispositions «pour
identifier les auteurs de
l'utilisation d'armes chimiques en
République arabe syrienne en identifiant
et en rendant compte de toutes les
informations potentiellement pertinentes
pour l'origine de ces armes chimiques,
dans les cas où la
mission d'établissement des faits de
l'OIAC détermine, ou a déterminé, qu'un
ou plusieurs usages ont eu lieu, et les
cas pour lesquels le mécanisme d'enquête
conjoint OIAC / ONU n'a pas établi de
rapport».La décision
affirmait en outre que, chaque fois que
des armes chimiques étaient utilisées
sur le territoire d'un État partie, il
fallait identifier "les auteurs, les
organisateurs, les sponsors ou les
autres personnes impliquées" et
soulignait "la valeur ajoutée du
Secrétariat menant une enquête
indépendante sur une prétendue
utilisation d'armes chimiques en vue de
faciliter l'attribution universelle de
toutes les attaques par des armes
chimiques".
Le rapport manipulé
de l’OIAC, qui omettait les conclusions
de ses propres scientifiques,
constituera désormais le document de
base que le nouveau groupe de l’OIAC,
l’Équipe d’enquête et d’identification,
utilisera pour déclarer le gouvernement
syrien coupable. Ce verdict de
culpabilité peut ensuite être utilisé
pour justifier publiquement une guerre
contre la Syrie sans autre intervention
du Conseil de sécurité des Nations
Unies.
C’est ce que veut
dire Hitchens lorsqu’il écrit qu ‘« un
prétexte pour la guerre avait été
fabriqué par la suppression de
l’enquête ».
La Russie, la Chine
et plusieurs autres gouvernements ont
protesté contre le changement de statut
de l’OIAC. La déclaration russe à la
conférence de cette année sur la
Convention sur l’interdiction des armes
chimiques (CWC)
dit :
La décision
d'attribuer au secrétariat technique de
l'OIAC des fonctions d'identification
des parties responsables de
l'utilisation d'armes chimiques, adoptée
en juin 2018 lors de la CSP-SS-4 en
violation de la Convention, est
illégitime. Cette innovation imposée à
l'OIAC dépasse le cadre de la CWC et de
l'Organisation. La décision elle-même a
été adoptée en violation de la
Convention et sa mise en œuvre n'est
rien d'autre qu'une ingérence dans la
compétence exclusive du Conseil de
sécurité des Nations Unies.Comme résultat
prévisible de cette décision discutable,
des problèmes fondamentaux se sont
posés, à savoir le manque de
transparence et de responsabilité du
mécanisme "d'attribution", aux
organes directeurs de l'OIAC, de
l'équipe d'enquête et d'identification.
Les États parties doivent encore se
renseigner sur le mandat de cette
entité, ses conditions de
fonctionnement, ses critères de
sélection des "incidents" sur
lesquels enquêter ou les sources et
modalités de son financement.
Les scientifiques
de l’OIAC ont trouvé des preuves
sérieuses que le gouvernement syrien ne
peut pas être coupable de l’incident
de Douma. Sous la pression des
États-Unis, la direction de l’OIAC
supprima les rapports techniques de ses
scientifiques ou les remplaça par ceux
d’experts externes pour donner
l’impression que le gouvernement syrien
était à l’origine de l’incident. Le
nouveau groupe d’attribution de l’OIAC
utilisera ce rapport manipulé pour
déclarer la Syrie coupable de
l’incident. Les États-Unis et d’autres
pouvaient alors utiliser ce verdict de
culpabilité comme prétexte pour
déclencher une guerre.
Nous n’avons appris
l’existence de ce plan que parce que des
scientifiques et des ingénieurs
courageux de l’OIAC ne veulent pas que
leur organisation soit maltraitée pour
trouver des prétextes pour mener des
guerres contre des innocents. Ils se
sont manifestés et ont dit au public ce
qu’il devait savoir. Ils méritent notre
gratitude.
Moon of Alabama
Traduit par jj,
relu par Hervé pour le Saker Francophone
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