Algérie
Le hirak devient
un mouvement de protestation structurel
Lahouari Addi
Dimanche 12 janvier 2020
Le 47èm vendredi vient de montrer que la
protestation va durer dans le temps. Ni
la mort de Gaid Salah, ni le scrutin du
12 décembre n'ont eu d'incidence sur la
mobilisation hebdomadaire. La population
n'est pas satisfaite par le changement
dans le régime et demande un changement
de régime. Pour l'instant, la
protestation vise à boucler la date
anniversaire d'une année avec le 53èm
Vendredi qui tombe un 21 février. En
attendant, les autorités essayent la
carotte et le bâton pour normaliser une
situation de contestation inédite. Il y
a eu la libération conditionnelle de
près d'une centaine de détenus
d'opinions et l'annonce d'une refonte de
la constitution. Cela n'a pas pour
autant réconcilié les deux parties en
conflit. Il y a eu aussi une répression
sévère le vendredi 47 en début des
manifestations. Des policiers en tenue
et en civil ont pourchassé des dizaines
de manifestants dans une tentative
d'étouffer le début de la mobilisation.
La stratégie a échoué après quelques
heures face au nombre impressionnant des
jeunes venant de Babel Oued et La Casbah
aux cris hostiles aux généraux. Les
services de sécurité ont appris à leurs
dépens, qu'au-delà d'un certain nombre
de manifestants, il est impossible de
réprimer. Un policier peut disperser 10
manifestants avec son bâton, mais pas
cent. Le hirak le sait instinctivement
et c'est pourquoi il va continuer à
défier le régime jusqu'à la satisfaction
de ses revendications. A moins de sortir
les chars et de tirer sur la foule, ce
qui entrainera une dislocation violente
du régime.
Désormais, le mouvement va s'installer
dans la durée sans gêner la vie sociale
quotidienne puisqu'il n'y a ni grèves ni
violence. Les Algériens ont
collectivement, inconsciemment trouvé le
moyen de mettre le régime dans une
impasse. Le président ne pourra faire
aucune tournée dans le pays; ses
ministres ne peuvent pas se rendre sur
le terrain; les walis sont coupés de
leurs administrés. C'est un couple en
crise où l'un des deux conjoints veut le
divorce et l'autre le refuse.Pourtant,
la fameuse formule du 3èm talat talaq a
été dépassée depuis longtemps. On est au
47èm talaq qui a rendu illicite ce
gouvernement. La légalité du régime a
atteint ses limites parce que pour
qu'une légalité soit plus ou moins
efficace, il faut un minimum de
légitimité. Or le régime algérien n'a
pas le minimum de légitimité qui assure
la survie politique. .
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