Russie politics
Affaire S. Mironov: Pourquoi les Etats
Unis
veulent faire extrader un citoyen russe
par l'Arménie
Karine Bechet-Golovko
Mardi 30 août 2016
Malgré la pression des Etats Unis, la
justice arménienne a refusé de mettre
Sergueï Mironov en détention provisoire
pour une soi-disant affaire de trafic
d'armes et de blanchiment d'argent pour
avoir commander sans recevoir du
matériel pour la chasse sur internet. La
question de son extradition vers les
Etats Unis reste encore en suspend, même
s'il semble peu réaliste que l'Arménie y
satisfasse. Retour sur ce qui ressemble
à s'y méprendre à un coup monté.
Le 26
août, Sergueï
Mironov et sa femme atterrissent à
l'aéroport de Erevan, en Arménie, pour
passer quelques jours de vacances.
Seulement, au moment du contrôle de la
frontière, il apprend qu'il est
recherché par les Etats Unis, qui ont
lancé un mandat d'arrêt international en
mai pour violation de la législation
américaine.
Lorsqu'il fut déféré devant le tribunal
de première instance de Erevan, il a
fallu à peine 3h au juge pour rejeter la
demande de mise en détention provisoire
faire par les Etats Unis. Il fut libéré
dans la salle même du tribunal,
accompagné par son avocat et sous
protection de l'ambassade de Russie. Le
Procureur, qui agit sur demande des
Etats Unis, peut faire appel sous 5
jours. En ce qui concerne la demande
d'extradition, il y a 40 jours pour
faire flancher la justice arménienne.
Voici
ce qui est reproché à ce citoyen russe
en vacances en Arménie. Dans les années
2013-2014, sur demande d'un ami qui a vu
le prix particluièrement bas, S. Mironov
a tenté de commander sur internet du
matériel pour la chasse, notamment des
lunettes de vue de nuit. Ce qui n'a rien
à voir avec des armes ou de la
technologie militaire. Ce matériel est
en vente libre aux Etats Unis, il n'est
pas interdit en Russie. Aucune
restriction particulière n'est indiquée
par le vendeur. Or, la législation
américaine prévoit l'interdiction de
l'exportation de ce type de matériel.
Des
choses toutefois surprenantes se
produisent. Il paie les 50 000 dollars
demandés, mais il reçoit un colis avec
n'importe quoi dedans, des choses qui
n'ont rien à voir avec ce qu'il a
commandé. Mais comme il a payé et a reçu
un colis, pour les Etats Unis, le
contrat est rempli et l'infraction est
donc constituée ... Du coup, S. Mironov
est soi-disant coupable, selon la
législation américaine, de tentative de
violation de la loi sur l'exportation
d'armes, sur le contrôle de
l'exportation des technologies
militaires, de tentative de blanchiment
d'argent et de blanchiment d'argent. Le
paiement devenant automatiquement
constitutif de blanchiment.
Maintenant précisons que, certes, S.
Mironov travaille comme programmeur dans
une entreprise de sécurité russo-biélorusse,
dans la succursale de Moscou. Mais cette
entreprise a des clients un peu
particulier, comme le service fédéral
russe des prisons ou des entreprises
stratégiques.
Précisons aussi que
Interpol n'a aucune trace de ce
trafiquant de technologie militaire dans
ses archives, ni dans ses listes de
personnes recherchées ...
L'interpelé estime qu'il peut s'agir
d'une provocation, d'autant plus qu'il
n'a reçu aucun document lui signifiant
la commission d'une infraction à la
législation américaine par la justice
américaine. Le prix volontairement bas,
l'absence d'indication d'interdiction
d'exportation par le vendeur vont en ce
sens. Sans oublier la fausse livraison.
Il est
également surprenant que la justice
américaine en ne retourne pas contre le
site qui organise l'exportation de
matériel dont l'exportation est
interdite par la législation nationale,
sans informer ses acheteurs. Surprenant
que ce site se porte bien ...
Certains estiment également que le
contexte politique n'est pas étranger à
la situation, les Etats Unis tentant de
refroidir les relations entre l'Arménie
et la Russie, ce qui n'est pas la
première fois.
Il
faut dire que les Etats Unis sont des
habitués de l'extraterritorialité: toute
personne qui contrevient n'importe où
dans le monde à la législation
américaine, même s'il n'est pas au
courant, doit être incarcéré et
condamné, pardon jugé, aux Etats Unis,
ce qui conduit les services spéciaux
américains à littéralement
enlever des gens qui se "réveillent"
sur le territoire américain.
En ce
qui concerne l'affaire de S. Mironov, il
est libre, mais ne peut quitter
l'Arménie. Les interprétations
divergent. Son avocat déclare que si le
procureur ne les convoque pas, il
prendra l'avion demain, le 31 août,
comme son billet retour le prévoit. L'association
juridique russo-arménienne déclare qu'il
ne pourra pas quitter le territoire
pendant 40 jours, le temps que la
question de l'extradition ne soit
formellement fermée.
Quoi
qu'il en soit, le caractère fabriqué de
cette affaire laisse peu de place au
doute.
Le sommaire de Karine Bechet-Golovko
Le
dossier Russie
Les dernières mises à jour
|