Russie politics
Occident: quand l'hystérie antirusse
est signe de faiblesse
Karine Bechet-Golovko
Mardi 26 juillet 2016
L'hystérie antirusse continue à être
entretenue par les organisations
occidentales. Manifestement, la violence
de la propagande occidentale, son
évidente radicalisation ces derniers
temps, met en doute la solidité de la
société dans laquelle nous vivons. Entre
l'UE qui trouve dans la Russie un
prétexte pour renforcer une propagande
pro-UE primaire et l'OTAN qui se
gargarise d'une possible et improbable
invasion russe de la Pologne pour
justifier le renforcement de sa présence
en Europe, nos sociétés sont malades.
Elles dérivent faute de véritables
dirigeants.
Le capital confiance dont bénéficiait
l'UE est en train de fondre. Une
étude a été menée début juillet pour
faire le point sur la satisfaction des
populations européennes face aux
politiques menées suite au Brexit.
Aujourd'hui, le taux d'insatisfaction
est de 47%. L'on pourrait se rassurer en
le trouvant encore en-dessous de la
majorité. Mais l'évolution fait
réfléchir:
il y a un peu moins de dix ans, le taux
de satisfaction envers l’UE était en
moyenne de 80% entre la Pologne,
l’Italie et l’Espagne. Depuis 2007, ce
taux a diminué de 20%.
L'écart entre les pays est très
significatif. La Pologne, qui a tiré
bénéfice de l'adhésion, reste
majoritairement positive à plus de 70%.
Dans une position diamétralement opposée
se trouve la Grèce, qui paie très cher
son appartenance et plus de 70% des
personnes interrogées ont une opinion
négative de l'UE. Le rapport note
également la baisse constante du soutien
populaire des pays fondateurs, comme en
Allemagne ou en France.
Par ailleurs, il y a aussi un désaccord
sectoriel, face à certaines politiques.
La gestion par l'UE du flux migratoire
massif qui touche l'europe joue très
fortement sur les populations locales:
Les pays les plus touchés par la crise
des migrants ont, sans surprise, les
plus hauts niveaux de désapprobation
quant à la manière dont l’UE l’a gérée.
En Grèce, pays d’entrée d’une majorité
écrasante des migrants, 94%
désapprouvent l’approche de l’UE face à
cette crise. En Suède, qui a accordé
l’asile à environ 200.000 migrants, 88%
désapprouvent l’approche de Bruxelles.
Ce sont les Pays-Bas qui voient
l’approche de l’UE le plus positivement,
mais quand même près de deux tiers (63%)
des néerlandais désapprouvent la
politique adoptée.
Et sur le plan économique, c'est un peu
mieux, mais pas favorable dans
l'ensemble:
Huit des dix pays interrogés ont une
vision négative de la manière dont l’UE
a géré les problèmes économiques – le
plus important étant la crise de l’euro
en cours. (...) L’Italie, la France et
l’Espagne présentent un niveau
d’insatisfaction similaire de 66% en
moyenne. Même en Suède, Etat membre hors
zone euro, l’insatisfaction est
majoritaire (59%).
Sans entrer plus dans le détail, il est
évident que le projet UE est un échec.
C'est un échec car cette structure n'est
pas apte à relever efficacement les
défis qui se présentent à elle. Sans
parler des différentes sorties de ses
dirigeants, comme Juncker qui s'inquiète
de ce que les Premiers ministres des
pays membres n'écoutent trop leurs
électeurs. Je ne reviendrai pas sur
toutes les déclarations
anti-démocratiques, elles sont largement
connues et commentées ... et n'ont
strictement aucune incidence sur la
carrière politique de leurs auteurs.
L'impunité anti-démocratique des
dirigeants européens laisse pantois.
Dans ce contexte, l'UE est face à une
alternative somme toute assez simple:
soit en tirer les conséquences et
adapter et ses politiques et son mode de
fonctionnement, soit renforcer le
système de propagande pour influencer
l'opinion publique. Le système est
incapable de se restructurer car il est
en place pour réaliser une idéologie qui
est rejetée par la majorité de la
population (il suffit de voir le soutien
apporté à la réforme du droit du travail
en France et de se souvenir des
manifestations géantes contre le mariage
pour tous). S'il change d'orientation,
il remet en cause cette idéologie et ne
présente donc plus aucun intérêt pour
les forces qui le soutiennent.
Le choix a donc été fait de jouer sur la
propagande. Pour cela, il faut un ennemi
fédérateur et la Russie fait l'affaire.
Un rapport vient d'être pondu par le
Martens Centre, une fondation européenne
qui fournit régulièrement des analyses
sur les sujets européens. Un des
derniers rapports concerne la Russie et
s'intitule "L'ours dans une peau de
mouton". Non, ce n'est pas une
plaisanterie de mauvais goût. cela
montre simplement le niveau de la
réflexion.
En quelques mots, la ligne de conduite
est simple. La mauvaise image de l'UE
vient de la propagande
diffusée en Europe d'organismes
russes, comme RT, Russia beyong the
Headline ou quelques Think tanks comme
le Club Valdaï, le Conseil russe pour
les relations internationales, etc. Ces
organes propagent tout à la fois une
image positive de la politique russe et
insistent sur l'échec de la politique
européenne, contestent l'échelle des
valeurs défendues par l'UE. Pour lutter
contre la source du problème, il faut
donc que les médias européens prennent
le contre-pied et insistent sur les
bienfaits de l'UE, sa défense des droits
de l'homme, son efficacité. L'UE doit
également renforcer le soutien à la
société civile "pro-européenne" et
diffuser des "informations objectives"
en russes. Evidemment "objectives".
Autrement dit, l'indépendance des médias
est clairement étrangère à la politique
européenne, elle qui prétend défendre
des valeurs et des droits. Si chacun le
savait, maintenant, c'est clairement
affirmé. Ensuite, le rapport n'envisage
le problème que superficiellement. Une
contre-propagande peut être utile
lorsqu'elle s'attaque réellement à une
propagande, c'est-à-dire à la diffusion
d'une vision déformée de la réalité. Or,
le problème est réel: il y a un réel
mécontentement des populations, un
mécontentement qui ne va pas se calmer
si on fait un lavage de cerveau. Ou
alors il va falloir le faire à grande
échelle, mais en sacrifiant les "valeurs
européennes".
Il faut dire que ce rapport intervient
dans le contexte d'une ambiance délétère
faisant de la Russie une menace
militaire potentielle. Cette position
est défendue par l'OTAN, comme chacun le
sait. Mais elle est entretenue par
différents Centres de réflexion, qui
doivent entretenir la pression,
puisqu'il n'est pas
possible de faire continuellement des
manoeuvres militaires aux frontières de
la Russie.
Ainsi, le Atlantic Council a sorti un
rapport expliquant que la Russie peut
envahir la Pologne en très peu de temps.
la ritournelle est connue, mais le
Conseil innove dans le panel des
"mesures défensives" proposées. L'on y
voit l'attaque cybernétique de la chaîne
russe RT (décidément, elle est dans le colimateur), l'attaque du métro de
Moscou (donc un cible civile) et du
réseau électrique de Saint Pétersbourg
(qui est également un ouvrage non
militaire). Il est également prévu
d'envoyer des forces spéciales à
Kaliningrad.
En lisant ces différents rapports l'on
comprend bien à quel point la Russie est
un danger pour l'Europe. Enfin, plutôt
pour l'UE. Car elle est le signe vivant
de sa faiblesse. Ce qui est
inacceptable.
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