France-Irak
Actualité
Kirkouk libérée…
Gilles Munier
Massoud
Barzani devrait se retirer
Lundi 23 octobre 2017
On ne peut que
se féliciter de la reprise de Kirkouk
par l’armée irakienne et les
Hachd
al-Chaabi. A la surprise générale,
l’opération s’est déroulée en douceur,
sans faire trop de victimes et, ce qui
est nouveau sur la scène irakienne :
sans destructions.
C’est une victoire
pour le Premier ministre Haïdar al-Abadi,
et une défaite d’autant plus humiliante
pour Massoud Barzani, président du
Gouvernement Régional Kurde (GRK)
qu’il a également été contraint de
retirer ses peshmerga des zones
qu’il voulait kurdiser, en particulier
le Sinjar
yézidi, la plaine de
Ninive et le pays
turkmène. C’est aussi un coup dur
pour Israël et l’Arabie saoudite, seuls
pays à avoir soutenu ouvertement la
tenue du référendum sur l’indépendance
du Kurdistan irakien.
Pour les Kurdes
barzanistes, la perte de Kirkouk est le
résultat d’une « trahison
historique », d’un complot ourdi par
la famille Talabani – leur ennemie de
toujours - et par l’Iran.
Jalal Talabani,
aujourd’hui décédé, ancien président
kurde de la République irakienne
(2005-2014), s’était rendu
le 10 juillet dernier à Téhéran –
bien que très gravement malade –
pour discuter, notamment, du référendum
d’indépendance proposé un mois plus tôt
par Barzani. Conscient des dangers que
faisait courir ce projet à la région, et
de l’ascendant qu’un « Oui »,
inévitable, donnerait à son rival d’Erbil,
il avait sans doute avalisé l’idée de le
court-circuiter.
Dans le nuit de
dimanche à lundi dernier, face à
l’offensive gouvernementale, son fils
Bafel, commandant une des brigades
défendant Kirkouk, et Hero, veuve de
Jalal Talabani, qui dirige une
importante faction de l’Union
Patriotique du Kurdistan (UPK) – le
parti talabaniste – ordonnèrent le
« repli tactique » de leurs
partisans, provoquant l’effondrement du
front kurde. Sur
France 24, Bafel
Talabani a nié les accusations de
trahison portées contre lui.
Ce qui est
pratiquement certain, c’est que la
libération de Kirkouk est à mettre
au crédit du général iranien Suleimani.
Les Turkmènes et les Arabes qui ont subi
l’occupation de leur ville par les
Kurdes lui en sont reconnaissants.
Pour l’opposition
kurde, la chute de Kirkouk est
l’occasion de demander à Massoud Barzani
de se retirer. C’est ce qu’il aurait de
mieux à faire. Mais, comme Israël
et les néoconservateurs américains
comptent sur lui pour déstabiliser
l’Iran, il peut encore trouver un moyen
de s’incruster.
Jalal Talabani,
caméléon politique
La rivalité
sanglante entre les Barzani et les
Talabani remonte à 1964, quand ce
dernier – minoritaire au sein du
Parti Démocratique du Kurdistan (PDK)
- s’est réfugié en Iran. Déçu par le
Chah à qui il avait proposé ses
services, mais qui – conseillé par la
CIA et le Mossad - préférait
soutenir Mustapha Barzani, chef
légendaire de la rébellion kurde, Jalal
Talabani vira de bord. Il créa une
milice kurde au service du régime de
Bagdad, alors présidé par le général
Abdelrahmane Aref. Surnommés Jash
(bourricots) par ses adversaires,
les mercenaires talabanistes firent la
chasse aux peshmerga barzanistes
jusqu’aux Accords d’Alger (1975)
qui mirent fin au soutien de l’Iran et
des Etats-Unis à la rébellion kurde.
Jalal Talabani a
ensuite fondé l’UPK à Damas et
pris, cette fois, fait et cause pour
l’Iran dans la guerre Iran-Irak. Cela ne
l’a pas empêché d’aller à Bagdad donner
l’accolade au président irakien juste
après la Première guerre du Golfe !
Chassez le naturel, il revient au galop…
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