France-Irak
Actualité
Combats entre milices chrétiennes
dans la plaine de Ninive
Gilles Munier
Hadi al-Amiri
- secrétaire général de la puissante
organisation chiite Badr -
leader officiel des
Hachd al-Chaabi
Vendredi 21 juillet 2017
Pour la première
fois – du moins officiellement -
des combats entre milices chrétiennes se
sont produits à Baghdeda, dans la région
de Qaraqosh – à l’est de Mossoul
- le 15 juillet dernier. Responsables :
les Unités de protection de la plaine
de Ninive (NPU) – financées par
des Assyriens résidant aux Etats-Unis et
dans le monde - qui ont arrêté 6
membres des Brigades de Babylone
– autre milice chrétienne mais qui fait
partie des Hachd al-Chaabi (Unités de
mobilisation populaire, force
paramilitaire majoritairement chiite).
Leurs prisonniers sont accusés d’avoir
saccagé des maisons et des églises
chrétiennes, dont le monastère syriaque
de Mar Behnam datant du 4ème
siècle. Comme il fallait s’y attendre,
les Brigades de Babylone ont
entrepris de les libérer… Les accusations
portées contre les Brigades de
Babylone sont extravagantes. Tout le
monde sait que ce sont Les Lions de
Babylone, comme on les appelle aussi,
qui ont repris en novembre dernier le
monastère de Mar Behnam occupé depuis
juillet 2014 par les forces djihadistes,
et qu’après les combats les bâtiments se
trouvaient dans un triste état.
Ce clash entre
milices chrétiennes fait suite à des
interventions médiatisées de Sa
Béatitude Louis Raphaël 1er Sako,
patriarche de tous les Chaldéens, qui
s’en est pris à plusieurs reprises,
nommément, à Ryan Salem al-Kildani
(le chaldéen) - chef des Brigades de
Babylone –, déclarant qu’il
ne représente pas les chrétiens et
exhortant ces derniers à ne pas
s’engager dans sa milice. Le patriarche
semble avoir choisi son camp. On ne l’a
pas entendu se plaindre de l’encadrement
des
milices chrétiennes basées au Kurdistan
par d’anciens militaires occidentaux…
Les
Hachd al-Chaabi
redorent leur image grâce aux
minorités
Ryan
al-Kildani, chef des
Lions
chrétiens
des
Brigades de Babylone
En fait, les chefs
de ces milices - sous influence
américaine, kurde ou israélienne –
n’acceptent pas que des chrétiens
irakiens, suivis par des membres
d’autres minorités religieuses,
combattent au sein des Hachd al-Chaabi.
Pourquoi ? Simplement parce qu'ils se
positionnent du côté kurde, américain et
anti-iranien dans la perspective des
affrontements qui risquent
de se produire prochainement à Kirkouk
et dans les territoires contestés,
c’est-à-dire occupés par les
peshmerga. Les chrétiens
mésopotamiens ont la mémoire courte: à
chaque fois qu’ils se sont alliés à des
envahisseurs étrangers au Proche et
Moyen-Orient, cela s’est mal terminé
pour eux.
A vrai dire, les
Hashd al-Chaabi ne sont plus tout à
fait une organisation chiite. Le 13 juin
2014, la fatwa du Grand ayatollah Ali
Sistani appelant au combat contre l’Etat
islamique s’adressait à tous les
Irakiens, quelle que soit leur
appartenance religieuse ou ethnique. Il
a été en partie entendu : outre les
chrétiens des Brigades de Babylone,
des sunnites – membres de
tribus victimes d’Al-Qaïda en Irak, puis
de l’Etat islamique (EI) – sont dans
leurs rangs. Ces trois dernières années,
ils ont participé aux batailles livrées
dans la région d’Al-Anbar.
Les Hachd
ont profité de leur présence dans la
plaine de Ninive pour recruter des
combattants dans toutes les communautés
religieuses et ethnies : turkmène,
yézidie, shabak, y compris des Kurdes
réfractaires aux injonctions de Massoud
Barzani.
Complots contre
les Hachd
Logo des
Hachd al-Chaabi
(Unités de mobilisation populaire)
Quoi que disent les
porte-paroles du gouvernement de Bagdad
et de la Division d'or, les
Unités de Mobilisation Populaire ont
participé à la bataille de Mossoul. En
février dernier, le cheikh Youcef, un
des dirigeants des Hashd, m’a
certifié à Téhéran - où il
intervenait à la Sixième conférence de
soutien à l’intifada palestinienne -
qu’aucun assaut sérieux de l’armée
irakienne contre les positions de l’Etat
islamique n’avait lieu sans elles.
Pourquoi le cacher aujourd'hui?
Dans sa conférence
de presse à Bagdad, le 13 juillet
dernier, Hadi al-Amiri - secrétaire
général de la puissante organisation
chiite Badr -, leader officiel des
Hachd al-Chaabi, n’a pas manqué
de reprocher au Premier ministre Haïdar
al-Abadi d’avoir « oublié » de
rendre hommage aux Hachd pour
leur rôle dans la libération de Mossoul
et
fait état de complots ourdis contre
elles. On sait que les Américains
poussent Abadi à les dissoudre, voire
que le Pentagone aurait constitué une
force spéciale nommée « Les Tigres »
pour localiser les membres du
Haut-commandement des Hachd... et
les éliminer.
A suivre…
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