Lecture
Livre: "Yasser Arafat, un homme, un
combat"
Gilles Munier
Mardi 16 octobre 2018
Par Gilles Munier (revue de
presse : La Nouvelle République
(Algérie) – 16/10/18)*
Le « Yasser
Arafat», de Chérif Abdedaïm, qui
vient de paraitre en Algérie** -
préfacé par le poète palestinien
Ziad Medoukh - répond à bien des
questions que j’aurai aimé poser à
l’homme que j’ai approché à plusieurs
reprises à Bagdad du temps de Saddam
Hussein.
Certes, il existe
beaucoup d’ouvrages sur « Abou
Ammar », mais j’avoue n’en avoir lu
aucun. Partisan de la lutte armée pour
décoloniser la Palestine, je respectais
et admirais le combattant, mais
n’approuvais pas vraiment sa stratégie
pour y parvenir.
Cela dit, la
libération de la Palestine est d’abord
l’affaire des Palestiniens. Il était
président de l’Organisation de
Libération de la Palestine (OLP) et
tout ce qu’il décidait avait une portée
historique. On ne pouvait que soutenir
le symbole qu’il représentait quand il
était assiégé par l’armée de Hafez al-Assad
à Beyrouth, ou par l’armée israélienne à
Ramallah même si l’on n’avait pas
approuvé les accords d’Oslo.
D’abord un
feddaï
Chérif Abdedaïm
n’apporte pas seulement des informations
inédites sur sa naissance et sa
jeunesse dans l’entourage de Hadj Amin
al-Husseini, mufti de Jérusalem, il le
présente d’emblée comme un feddaï en
puissance avec sa participation à
l’organisation militaire Al Jihad Al
Moukaddas Al Moussallah (La lutte sainte
et armée), dirigée par le légendaire
Abdelkader al-Husseini, puis à une
unité combattante dans le Néguev.
Démoralisé un temps
après la défaite des armées arabes et la
signature d’un armistice avec les
Israéliens, il a poursuivi ses études au
Caire où il a rencontré des étudiants
ayant les même convictions que lui, avec
qui il formera plus tard le Fatah.
Titulaire d’un diplôme d’ingénieur
civil, il n’en participait pas moins à
des opérations anti-britanniques organisées
par les Frères musulmans, puis se
rapprocha des Officiers libres
qui porteront au pouvoir le colonel
Nasser.
Chérif Abdedaïm
nous fait vivre presque dans le détail
l’histoire de la création du Fatah
et des premières organisations
palestiniennes. Toutes plaçaient comme
priorité la libération de la Palestine
« de la Méditerranée au Jourdain ».
La guerre de libération algérienne était
pour elles un exemple à suivre. On en
est loin aujourd’hui, depuis qu’elles
ont déposé les armes.
L’auteur nous
rappelle les démêlés des nationalistes
palestiniens avec les régimes arabes qui
cherchaient à les instrumentaliser et
qui les percevaient comme des empêcheurs
de tourner en rond, ce qu’ils faisaient
– eux – admirablement bien…
En février 1969, ce
fut la consécration pour le Fatah :
Yasser Arafat étant élu président du
Comité exécutif du Conseil national
palestinien, c’est-à-dire de l’OLP.
De Septembre
noir aux accords d’Oslo
J’ai résumé
jusqu’ici les premiers chapitres de
l’ouvrage, mais pour la suite des
événements : il faut lire « Yasser
Arafat, un homme, un combat »**,
bien documenté et passionnant, notamment
les passages consacrés à Septembre noir,
au massacre de Sabra et Chatila, au
déclenchement de la première Intifada,
à la relation d’Arafat avec Cheikh
Yassin – fondateur du Hamas -, à
l’assassinat de ses compagnons à Tunis
par le Mossad… etc… etc… jusqu’à son
terrible accident dans le désert libyen
et, enfin, aux accords d’Oslo qui
auraient dû déboucher sur la création
d’un Etat palestinien… sur une partie de
la Palestine.
Yasser Arafat était
conscient du double jeu israélien. Les
accords d’Oslo ne signifiaient pour les
sionistes que la création d’ « un
bantoustan palestinien en faisant
miroiter à Arafat et à la direction de
l’OLP les prérogatives et les privilèges
du pouvoir». Et c’est ce qui est
advenu, avec en prime l’implantation de
nouvelles colonies et l’empoisonnement
« présumé » de Yasser Arafat.
L’auteur y consacre un chapitre qui ne
laisse aucun doute sur son assassinat.
L’annexion de la
Cisjordanie est programmée
Aujourd’hui, en
Israël, après la proclamation de
Jérusalem capitale d’Israël par Donald
Trump, il est question d’annexion de la
Cisjordanie. Et après, quoi ? Progresser
vers l’Euphrate : qui sait ?
Israël – comme
en son temps les royaumes croisés
d’Orient - joue la montre. Mais rien
n’est jamais définitif. Yasser Arafat en
a fait partiellement la preuve. Qui
achèvera la mission que s’étaient donnés
« Abou Ammar » et ses
compagnons ?
Avec son
« Yasser Arafat », Chérif Abdedaïm
nous fait finalement aimer un homme qui
restera comme l’a écrit Nelson Mandela
« un symbole d’héroïsme pour tous les
peuples du monde qui luttent pour la
justice et la liberté »… même si,
comme moi, on n’a pas approuvé les
accords d’Oslo !
Chérif Abdedaïm, psychopédagogue de
formation, essayiste, poète, est
chroniqueur et éditorialiste du
quotidien algérien «La Nouvelle
République». Il est l’auteur de
plusieurs ouvrages, dont « De
la mythologie sioniste à la tragédie
palestinienne ».
*Source :
La Nouvelle République (en PDF –
pages 1 et 4)
**Éditeur Dar
el Wassit - Alger - 2018 - 266
pages.
L’ouvrage sera
présenté et dédicacé par l’auteur au
21ème Salon International du Livre
d’Alger (29/10 au 10/11/18).
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