Tendances de
l'Orient
La guerre contre la Syrie et l'illusion
des compromis
Ghaleb Kandil
Photo:
D.R.
Lundi 3 février 2014
Certains milieux politiques pensent que
la Russie et les Etats-Unis se sont
entendus sur des compromis dans la
région, et que tout ce qui se passe sur
les plans politique et militaire en
Syrie fait parti d'un scénario pour
mettre en œuvre ces arrangements. En
fait, les relations internationales
passent par une période transitoire qui
verra se dessiner les contours des
nouveaux équilibres. Ceux-ci ont pu
émerger grâce à la résistance de l'Etat
syrien face à l'agression coloniale
conduite par les Etats-Unis. Il est
clair que l'ère post-domination
unilatérale américaine est en
construction. Les règles de la nouvelle
guerre froide ne sont pas encore
définitivement dessinées. La
reconnaissance par les Etats-Unis de la
fin de l'hégémonie unilatérale
s'accompagne de tentatives continues
pour influencer les nouvelles équations
et équilibres qui sont en train
d'émerger. C'est dans ce cadre que
s'inscrivent les pressions et les
ingérences américano-occidentales dans
l'arrière-cour de la Russie. La crise en
Ukraine est la meilleure illustration de
cette attitude, au même titre que la
poursuite du partenariat entre les
Etats-Unis et l'Arabie saoudite, pour
prolonger le bain de sang en Syrie, dans
l'espoir de modifier à l'avantage de
leurs agents les rapports de force qui
sous-tendent tout compromis politique à
venir. Telles sont les réalités qui
ressortent de la Conférence de Genève
II, où les Américains ont négocié,
indirectement, avec la délégation
officielle syrienne, à travers une
délégation mise sur pied par leur
ambassadeur à Damas Robert Ford. C'est
dans ce même cadre que s'inscrit la
décision d'écarter l'Iran de cette
conférence, et qui était un message
destiné à la Russie, digne de l'époque
de l'hégémonie unilatérale, à travers
des ordres donnés au secrétaire général
des Nations unies. La réforme de cette
organisation et le rééquilibrage des
rapports de force en son sein sont
d'ailleurs des conditions inévitables
pour établir une monde multipolaire.
Dans cette période transitoire, la
confrontation continue pour
l'élaboration des nouveaux rapports de
force entre les puissances
internationales, et la Syrie constitue
le miroir des nouvelles réalités
internationales. Aussi, le fait de
croire à l'existence de supposés
arrangements internationaux et au
sérieux des Américains dans la lutte
contre le terrorisme, est une pure
illusion. Pire, cela peut fausser les
calculs et produire des analyses
erronées. Ce sont les Etats-Unis qui ont
exporté vers la Syrie le terrorisme
qaïdiste, en coopération avec le régime
saoudien, la Turquie et le Qatar. C'est
Washington qui a hébergé et couvé les
Frères musulmans, et il continue de le
faire bien qu'il sache que cette
confrérie promeut la pensée takfiriste
et le terrorisme dans le monde musulman.
Le refus américain de considérer la
lutte contre le terrorisme comme une
priorité en Syrie, comme l'a réclamé la
délégation officielle syrienne, est un
aveu de Washington de sa détermination à
utiliser le terrorisme pour saigner
l'Etat syrien. Les arguments présentés
par Barak Obama, lors d'un entretien au
New Yorker, pour expliquer les raisons
de son soutien au Front islamique,
illustrent parfaitement cette réalité.
Il a qualifié de "jihadistes" les
combattants de cette organisation
terroriste, appelant à faire une
distinction entre eux et Al-Qaïda. Ce
Front est un pur produit
américano-saoudien qui est actif
uniquement à l'intérieur de la Syrie et
ne constitue pas une menace terroriste,
comme le prétend la revue Foreign Policy
dans un article publié il y a quelques
jours. La revue a couvert de louanges le
chef de Brigades "Ahrar al-Cham", Abou
Khaled le Syrien, en tentant de
minimiser l'importance de propos de ce
terroriste rendant hommage à Oussama Ben
Laden. La prochaine étape sera
caractérisée par une recrudescence des
combats sur le terrain et la poursuite
du soutien américano-saoudien, qatari,
britannique et français aux mouvements
extrémistes. En dépit de la dernière
manœuvre verbale de Recep Tayyeb Erdogan,
lors de sa visite à Téhéran, qui ne
s'est accompagnée d'aucune mesure
concrète sur le terrain, la Turquie va
également poursuivre son appui aux
terroristes. L'administration américaine
a reconnu l'échec de son pari de la
destruction de l'Etat syrien, sous
couvert de la chute du régime. Sa
nouvelle stratégie consiste à installer
durablement des lignes de démarcations
entre l'Armée arabe syrienne et les
rebelles, à travers un soutien massif en
armes, argent, renforts en hommes et en
conseils techniques. Certains milieux à
Washington évoquent ouvertement le
partage de la Syrie en séparant les
provinces d'Idleb, d'Alep, de Raqqa, de
Deir Ezzor et de Hassaka, de l'Etat
central. D'autres projets parlent de la
division de la Syrie en trois régions:
la première, sous le contrôle de l'Etat
central et de ses forces armées; la
deuxième sous l'hégémonie des groupes
armés; et la troisième sous la
domination des Kurdes. L'armée arabe
syrienne combat donc pour l'unité de la
Syrie et pour son indépendance. Les
Américains et leurs agents découvriront
que tous leurs plans ne sont que des
mirages, car quand c'est l'unité et
l'indépendance de leur pays qui est en
jeu, le peuple syrien son armée sont
prêts à consentir autant de sacrifices
qu'il le faut.
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