ITRI
Retrait immédiat des USA exigé
pour avoir violé l’accord conclu avec
l’Irak
et bafoué la souveraineté du pays
Elijah J. Magnier
Vendredi 24 janvier 2020
Traduction : Daniel G.
Le parlement
irakien a décidé d’appeler au retrait
immédiat de toutes les forces étrangères
du pays pour violation des conditions
relatives à leur présence. Les USA n’ont
pas respecté leurs obligations
contractuelles envers le gouvernement de
Bagdad et ont bafoué la souveraineté de
l’Irak, mettant ainsi en péril sa
stabilité. Des sources au bureau du
premier ministre ont affirmé que « la
demande de retrait est imminente. Les
forces US ont violé l’accord, qui
devient ainsi caduc. L’accord prévoit
donner aux forces US un avis d’un an,
mais comme les USA ont violé les
conditions de l’accord, cette échéance
ne tient plus ».
Le premier ministre
Adel Abdel Mahdi a informé tous les pays
ayant une présence militaire en Irak
(les USA et leurs partenaires de la
coalition, dont la G.-B., le Canada, la
France, la Belgique et le Danemark) de
l’urgence d’amorcer leur retrait le plus
tôt possible. Jusqu’à maintenant,
m’a-t-on dit, aucun pays n’a répondu
favorablement à la requête via les
canaux diplomatiques. Seuls les USA ont
répondu au gouvernement irakien, en
signifiant ouvertement leur refus de
partir. Une pression intense et de
l’intimidation sont exercées auprès du
gouvernement pour le persuader de ne pas
mettre à exécution la décision
constitutionnelle votée par la majorité
parlementaire.
« Je ne vois qu’une
seule solution : informer le pays que
les États-Unis défient la volonté du
peuple irakien et déclarer que les
militaires US constituent une force
d’occupation quand tous les moyens
diplomatiques sont épuisés », a déclaré
la source.
Les responsables
américains refusent ouvertement
d’obtempérer à la décision légale et
démocratique du parlement, la même
démocratie que les USA prétendent avoir
importée au pays en 2003, et insistent
pour rester en Irak. Le secrétaire
d’État des USA Mike Pompeo a qualifié la
décision irakienne de « non
contraignante ». Il n’en demeure pas
moins qu’aucune force militaire
étrangère ne peut rester dans une
société qui lui est hostile, malgré
toutes les bases militaires et l’immense
puissance militaire sous son contrôle.
Les chiites
irakiens, qui forment 66 % de la
population irakienne comptant 40
millions de personnes, expriment leur
animosité à l’endroit des forces US en
particulier et de toutes les forces
étrangères en général. L’Irak voudrait
les voir partir pour de bon, ce qui
mettrait fin à l’influence des USA en
Mésopotamie et en Asie occidentale. Une
manifestation monstre est prévue ce
vendredi 24 janvier, sous la direction
de Sayyed Moqtada al-Sadr qui avertit
ainsi les USA des conséquences de faire
fi de la décision parlementaire. Ce
devrait être la plus grande
manifestation de l’histoire de l’Irak.
Mais cette protestation n’est que le
début.
Les forces US ont
commis des crimes graves en Irak. Le
premier ministre Adel Abdel Mahdi a
affirmé que l’ambassadeur américain à
Baghdad l’avait informé qu’Israël était
responsable des cinq attaques commises
contre les forces de sécurité irakiennes
au milieu de 2019 et de l’assassinat par
drone d’un commandant des forces de
sécurité à la frontière entre la Syrie
et l’Irak. Les forces US étaient au
courant de ces attaques israéliennes et
les ont autorisées, en permettant à
Israël de violer l’espace aérien de
l’Irak et de tuer des membres de ses
forces de sécurité. Ces attaques ont
fait des USA, qui assurent le contrôle
de l’espace aérien irakien, le complice
d’Israël dans son attaque de l’Irak,
pays hôte des USA.
En décembre 2019,
l’administration Trump a commis un autre
crime, sans égard pour le gouvernement
irakien, en tuant d’autres Irakiens
intentionnellement sans justification
légale. Des avions américains ont alors
attaqué des positions des forces
irakiennes à la frontière avec la Syrie,
tuant et blessant 79 officiers et
membres des forces armées irakiennes et
des brigades 45 et 46 des Forces de
mobilisation populaire (FMP). Les USA
ont alors visé un campement des forces
de sécurité irakiennes basé à la
frontière afin de pourchasser les
militants de Daech qui se déplacent dans
le désert syro-irakien.
Ces forces sont
sous le commandement direct du premier
ministre Adel Abdel Mahdi. Les USA ont
accusé les soldats irakiens de ce
campement d’avoir attaqué sa base K1,
540 km plus loin. Les États-Unis
n’avaient aucune preuve que la dizaine
d’officiers tués par le bombardement
subséquent de la US Air Force étaient
responsables de la frappe ayant tué un
sous-traitant américain d’origine
irakienne à la base K1. Les USA ont même
refusé de fournir la moindre preuve de
leur accusation en réponse à la demande
du premier ministre irakien avant
l’attaque.
Les USA avaient
donc déjà violé les conditions de leur
mandat en 2019. Puis ils ont commis un
autre crime contre l’Irak en assassinant
un commandant irakien, Abou Mahdi al-Muhandes,
et trois officiers irakiens à l’aéroport
de Bagdad. Ils ont en outre montré leur
mépris du droit international en
assassinant un major général iranien,
Sardar Qassem Soleimani, et quatre
officiers iraniens (le brigadier général
Hossein PourJafari, le colonel Shahroud
Mozaffarinia, le major Hadi Taremi et le
capitaine Vahid Zamanian), malgré le
fait que les USA n’ont pas déclaré la
guerre à l’Iran. Trump s’est vanté de
l’assassinat, en disant en avoir « tué
deux pour le prix d’un ».
Une autre preuve du
mépris des USA à l’égard du protocole
diplomatique a été fournie par le
premier ministre Abdel Mahdi, lorsqu’il
a déclaré que le président Trump lui
avait téléphoné pour solliciter sa
médiation afin de désamorcer la tension
avec l’Iran. Abdel Mahdi a dit que «
Soleimani est arrivé en Irak à ma
demande afin de recevoir une réponse de
l’Arabie saoudite à une initiative de
paix de l’Iran. Trump a tué un officier
étranger dans un territoire qu’il est
censé protéger et un émissaire pour la
paix qui a atterri à la demande du
premier ministre ». Mais ce n’est pas
tout. Il est de notoriété publique,
comme l’a déclaré le ministre des
Affaires étrangères Ibrahim al-Jaafari
(le 11 juin 2016), que Soleimani
jouissait d’une immunité en Irak à titre
de conseiller (à la demande officielle
de l’Irak) dans la lutte contre Daech.
Il est inexact de
dire que « Soleimani complotait contre
des citoyens américains comme il le
faisait depuis des années ». Le
président Trump et son administration
n’ont fourni aucune preuve d’une telle
prétention. Les politiciens et les
intellectuels bellicistes nous ramènent
à l’occupation de l’Irak par les USA et
au soutien de Soleimani à la résistance
irakienne, en accusant Soleimani d’avoir
eu « du sang de soldats US sur les mains
pendant l’occupation militaire de l’Irak
par les USA ».
Cependant, « le
Conseil de sécurité n’a pas
explicitement condamné les attaques
contre les forces de la coalition, car
cela aurait amoindri le droit
intrinsèque à la légitime défense contre
une invasion et une occupation
étrangères ». Certains allèguent que «
l’invasion de l’Irak constituait un acte
d’agression illégal et que ceux qui en
sont responsables sont des criminels de
guerre » (Mandel, 2004: McGoldrick,
2004).
Par conséquent, la
résistance armée contre les forces
d’occupation en Irak à ce moment-là
était parfaitement légitime. La réaction
de la résistance et ses conséquences
pour les forces occupantes dirigées par
les USA, qui ont reconnu eux-mêmes en
2003 qu’ils constituaient une force
d’occupation, ne peuvent être qualifiées
d’acte de terrorisme. Le major général
iranien Qassem Soleimani ne peut être
tenu responsable de crimes contre un
occupant qui n’a jamais trouvé les «
armes de destruction massive » ayant
servi de prétexte à son invasion. Les
USA ont envahi l’Irak sans aucun
fondement légal, causant du même coup
une destruction massive de la population
irakienne et de l’infrastructure du
pays, qui a fait des centaines de
milliers de morts parmi les Irakiens.
Nous avons
maintenant appris de la bouche même de
Trump pourquoi il a tué Soleimani. C’est
parce que le major général iranien avait
dit « des choses méchantes » à propos
des USA. « Combien de temps est-ce qu’on
doit encore écouter cette merde? », a
demandé Trump à ses bailleurs de fonds.
Les USA continuent
de permettre au premier ministre
Benyamin Netanyahou de violer l’espace
aérien irakien en permettant aux avions
israéliens de bombarder la Syrie à
partir de la zone frontalière
irako-syrienne occupée par les forces US
à al-Tanf. Des responsables à Bagdad ont
dit que « les forces US ne respectent
pas du tout leur accord avec l’Irak.
Depuis quelque temps, ils se comportent
comme une force d’occupation. Ce n’est
pas la première fois que ça arrive. Nous
en informons la Syrie chaque fois que
cela se produit ».
Les nombreux crimes
commis par les USA au Moyen-Orient et
leur violation du droit international et
de la souveraineté irakienne en
particulier n’ont pas commencé avec
Trump. Mais Trump et son équipe ont
poussé les choses à un autre niveau en
2018 en abandonnant l’accord sur le
nucléaire iranien connu sous le sigle
JCPOA et qui fait partie de la
résolution 2231 du Conseil de sécurité
de l’ONU. Trump n’aimait pas cet accord
parce que c’était l’« accord de Barack
Obama ». Trump a ainsi rendu le
Moyen-Orient encore plus instable et
amené la région à deux doigts d’une
guerre. Comme il insiste pour maintenir
les forces US en Irak, il aura tôt fait
d’avoir à expliquer pourquoi des soldats
américains meurent sous les coups de la
résistance à l’occupation des USA.
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