Algérie
« Démilitariser l’Etat »
Djamil Mesrer
Photo:
D.R.
Mardi 8 septembre 2015
Le Secrétaire général du Parti du
FLN, Amar Saadani, invité, hier 7
Septembre, à intervenir lors d’une
émission débat de la BBC arabic a, entre
autre, estimé que toutes les mesures
prises par le Président de la République
pour redimensionner le format, le rôle
et la place du DRS dans le nouveau
paysage institutionnel du pays, ont
toutes pour objectif de démilitariser
l’Etat.
En effet, Saadani n’a pas cessé
d’appeler à l’instauration d’un « Etat
civil », une revendication inédite
venant du dirigeant du plus important
parti du pays. Un tel sujet appelle
normalement une attention particulière
dans le processus d’élaboration en cours
de la nouvelle Constitution qui est
censée reformer le mode de gouvernance,
tant décrié, prévalant dans notre pays.
Les propos de Amar Saadani relatifs
au retrait total de l’ANP, DRS compris,
du champ politique, doivent être médités
en relation avec l’évolution de
l’édifice politique algérien depuis le
19 Juin 1965.
Malgré l’existence d’une Constitution
et d’institutions d’inspiration
moderniste, la vie politique est restée,
dans notre pays, fortement dominée par
l’influence pesante d’un régime de type
oligarchique tirant son pouvoir de la
légitimité révolutionnaire.
Après le passage à la légitimité
constitutionnelle, à la faveur de
l’adoption de la Constitution de 1996 et
des élections présidentielles de 1997
puis les suivantes, la praxis politique
a quelque peu évolué tout en demeurant
caractérisée par l’intervention de fait
des militaires dans la sphère politique
et leur emprise sur le fonctionnement
des institutions de souveraineté en
particulier.
L’Etat militaire est le contraire de
l’Etat à caractère civil, c’est-à-dire
démocratique dirigé par des civils où
l’Armée, comme les autres corporations
de fonctionnaires, n’a pas
d’attributions constitutionnelles
particulières; l’Etat où les militaires
ne jouissent pas de la prééminence sur
les civils.
En Algérie, l’Etat à été, de 1965 à
1979, dirigé par une oligarchie
militaire constituée du chef de l’Etat,
chef de l’armée, et d’un groupe
d’officiers à la retraite ou en
activité, un Etat où l’Armée ne rend pas
compte aux institutions du pays et leur
impose sa volonté. L’Armée a, depuis
l’indépendance, toujours placé l’homme
de son choix à la tête de l’Etat.
Sous Boumédiène qui, aidé par un
parti unique, d’avant-garde peu
représentatif au sein de la société,
développa le culte de sa personnalité et
imposa sa figure à titre d’incarnation
de l’Etat et de la nation aussi bien à
l’intérieur qu’à l’extérieur de ses
frontières.
L’Algérie était devenue une
autocratie militaire où le premier rôle
était joué par la Sécurité Militaire,
aujourd’hui le DRS. Elle a vécu, depuis,
sous un régime qui s’apparente à un
régime de loi martiale ou d’un état
d’urgence permanent, en tout cas un
régime peu respectueux des droits de
l’homme qui n’admet pas l’idée qu’il
puisse y avoir une opposition et qui
utilise tous les moyens pour réduire au
silence les opposants politiques.
Depuis le milieu des années 1990, les
militaires semblent ne plus s’impliquer
dans la gestion politique en Algérie,
mais tous les leviers du pouvoir
demeurent en réalité entre les mains du
DRS qui exerce indirectement, sans être
responsable, le pouvoir de nomination,
voire d’intervention dans la gestion, et
dispose d’un réseau d’agents au sein de
la société, dans tous les rouages de
l’Etat et des partis politiques et même
des entreprises économiques.
C’est cet état de chose que le
président de la république, Abdelaziz
Bouteflika, veut, semble-t-il, voir
cesser dans l’Algérie du 21ème Siècle et
c’est ce que Amar Saâdani ne cesse de
répéter.
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