Algérie en phase
avec le mouvement du monde
Mort de Claude Lanzmann :
Un sacerdoce au service d'Israël
Chems Eddine Chitour
© Chems
Eddine Chitour
Vendredi 13 juillet 2018
« Si cette
immigration des Juifs en Palestine avait
eu pour but de leur permettre de vivre à
nos côtés, en jouissant des mêmes droits
et en ayant les mêmes devoirs, nous leur
aurions ouvert les portes, dans la
mesure où notre sol pouvait les
accueillir. Tel a été le cas pour les
milliers d'Arméniens et de Circassiens
qui vivent parmi nous en tant que frères
et citoyens bénéficiant des mêmes
droits. Mais que le but de cette
émigration soit d'usurper notre terre,
de nous disperser et de faire de nous
des citoyens de deuxième catégorie,
c'est là une chose que nul ne peut
raisonnablement exiger de nous. C'est
pour cela que, dès le début, notre
révolution n'a pas été motivée par des
facteurs raciaux ou religieux. Elle n'a
jamais été dirigée contre l'homme juif
en tant que tel, mais contre le sionisme
raciste et l'agression flagrante».
Yasser Arafat , ancien président de
L'OLP L'intellectuel et
réalisateur Claude Lanzmann est mort le
5 juillet à Paris Dans ce qui suit nous
allons tracer le parcours d'un
intellectuel qui a traversé le siècle et
qui fut dans l'essentiel de sa carrière
entièrement voué à la défense d'Israël
Quelques dates d'une vie bien remplie
Cette brève
biographie permet de situer le parcours
atypique de Claude Lanzmann qui a eu
deux vies celle d'un homme de gauche ;
période d'une dizaine d'années et
ensuite de toute une carrière consacrée
à l'apologie de l'Etat d'Israël. Nous
lisons: « Alors que sa famille a des
origines juives, Il était né le 27
novembre 1925 à Bois-Colombes dans une
famille d'origine juive d'Europe de
l'Est, immigrée en France à la fin du
XIXe siècle. Claude Lanzmann grandit «
[sans] l'ombre de l'ombre de quelque
éducation juive que ce soit, ni
religieuse, ni culturelle », avant de
découvrir Israël en 1952 et y être
désormais «viscéralement attaché » (1)
« À la rentrée 1943, Claude entre en
lettres supérieures (hypokhâgne) au
lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand
comme interne. Après la Libération, sa
famille revient vivre à Paris. Lanzmann,
qui a retrouvé sa mère est admis en
janvier 1945 en première supérieure
(khâgne) au lycée Louis-le-Grand.
Il devient pigiste pour France Dimanche,
dans le groupe de presse de Pierre
Lazareff pendant vingt ans, pIl publie
finalement la série d'articles
(L'Allemagne derrière le Rideau de fer)
dans le journal Le Monde. Cette série
est remarquée par Sartre qui lui demande
de collaborer à sa revue » (1).
En 1967, il prend
une grande part à l'élaboration du
fameux numéro des Temps modernes
intitulé Le conflit israëlo-arabe. À
partir de 1970, Claude Lanzmann se
consacre au cinéma. Son premier film,
Pourquoi Israël, sort en 1973 et
détaille déjà la méthode Lanzmann (…),
Lanzmann lui-même, est autant acteur que
metteur en scène. Dès qu'il a fini ce
film, Lanzmann se plonge dans ce qui va
devenir Shoah : il y consacre 12 ans de
travail Neuf ans plus tard, en 1994,
sort le film Tsahal dont le
questionnement est : l'armée israélienne
est-elle une armée comme les autres ? En
2011, il publie un numéro spécial des
Temps Modernes sur les anciens harkis,
où il revient sur des propos tenus en
1961, les appelant «les chiens de
l'humaniste Papon»(1).
Le combat premier : Engagement
anticolonialiste
En mai 1958, le journaliste Lanzmann
se rend en Corée du Nord. Puis, le 27
avril 1959, il publie un long article
sur la fuite du dalaï-lama du Tibet,
cette fois-ci dans Elle. Son engagement
anticolonialiste s'affirme. Il fait
notamment partie des dix inculpés, parmi
les signataires du « Manifeste des 121
», qui dénoncent la répression en
Algérie en 1960.
Les films reportage des Claude
Lanzmann : Propagande
Pour Christophe
Carrière : « Avec «Shoah», le
cinéaste, qui refusait toute fiction sur
le sujet, a inscrit le génocide juif
dans la mémoire collective. (….) Car le
mot Holocauste ne lui convenait pas non
plus. En lui préférant «Shoah» qui, en
traduction littérale de l'hébreu
signifie catastrophe, il a gravé dans le
marbre le terme pour définir dans son
ensemble l'horreur de la «solution
finale». Un cauchemar sur lequel il ne
cessera de revenir à travers d'autres
films comme Un vivant qui passe,
Sobibor, 14 octobre 1943, 16h, Le
Dernier des injustes ou encore Les
Quatre sœurs, sorti la veille de sa
mort ».
« Infatigable, prolifique, doté d'une
mémoire éléphantesque, Lanzmann refusait
de céder à la fiction pour tout ce qui
touchait à la Shoah (…)Il en sera de
même lors de la sortie de La Liste de
Schindler, de Steven Spielberg,
notamment pour le faux suspense organisé
autour d'une douche imposée à des
déportées, et bien entendu à l'occasion
de La Vie est belle, pourtant présentée
dès le générique comme une fable. Il
n'en demeure pas moins que l'ultime
référence lui appartient. Au même titre
que les vingt-cinq minutes de Nuit et
brouillard d'Alain Resnais, les 10h13 de
Shoah demeurent l'œuvre mémorielle
inégalée et inégalable sur le sujet ».
(2)
Dans une présentation des combats de
Lanzmann nous lisons dans cet exposé
éloge : « La parution des Réflexions sur
la question juive, de Sartre, en 1947,
est pour lui un événement majeur.
L'ouvrage devient le socle d'un
séminaire sur l'antisémitisme que
Lanzmann organise en Allemagne à la
demande de ses étudiants. Engagement
anticolonialiste (…) Il rencontre en
1952 Simone de Beauvoir et Jean-Paul
Sartre, qui lui proposent de participer
au comité de rédaction des Temps
modernes, fondé en 1945. (…)En avril
1952, il publie son premier article dans
Les Temps modernes, « La Presse de la
liberté », puis part pour la première
fois en Israël. « Numéro après numéro,
dossier après dossier, la revue n'a pas
cessé de s'approfondir et de
s'améliorer, délimitant et marquant de
plus en plus clairement le territoire
unique qu'elle occupe dans la politique
et la culture de gauche en France »,
souligne Claude Lanzmann ». (3)
« En 1967, il prend une grande part à
l'élaboration du fameux numéro des Temps
modernes intitulé « Le Conflit
israélo-arabe ». L'édition paraît en
mai, à la veille de la guerre des
Six-Jours, lui conférant une
exceptionnelle actualité. Un article de
80 pages intitulé « Israël, fait
colonial ? », signé du sociologue et
historien Maxime Rodinson, a constitué à
lui seul un corpus historique et
théorique qui a fondé l'engagement
politique de toute une génération en
faveur des droits des Palestiniens.
Jusqu'en 1970, Claude Lanzmann partage
ses activités entre Les Temps modernes
et diverses collaborations
journalistiques. S'intéressant toujours
à Israël, Lanzmann tourne également
Tsahal (1994), considéré comme le
dernier volet d'une trilogie après
Pourquoi Israël et Shoah. En
2018, il revient sur la question juive.
Dans Les Quatre Sœurs » (3)
« En devenant secrétaire de Jean-Paul
Sartre, Claude Lanzmann, le jeune
journaliste se voit proposer d'écrire
dans les colonnes de la revue Les Temps
modernes , dirigée par Sartre Il fait la
rencontre de la philosophe De Bauvoir.
Il a 27 ans, elle en a 44. (…) Dès le
départ, «j'ai aimé aussitôt le voile de
sa voix, ses yeux bleus, la pureté de
son visage et plus encore celle de ses
narines». (…) Jean-Paul Sartre qui a
également partagé la vie de Simone de
Beauvoir n'était pas jaloux de cet amour
entre son jeune secrétaire et sa
compagne. Une relation
intellectuellement très riche, et
«unique». » (4)
Claude Lanzmann ne
s'embarrasse pas d'éthique, il a vendu
une correspondance intime à l'université
de Yale les 112 lettres intimes que lui
a écrites Simone de Beauvoir La maison
Christie's qui a procédé à la vente aux
enchères a annoncé la vente pour un
montant qui n'a pas été dévoilé comme
c'est l'usage pour une « vente privée ».
.
Défenseur
acharné de la cause d'Israël
Dans les années
1970, Claude Lanzmann s'ouvre au cinéma
avec des films documentaires
principalement basée sur la façon de
donner une visibilité à la cause
d'Israël en commençant par Pourquoi
Israël (1973) et Shoah. D'une durée de
neuf heures et demie, ce dernier est
réalisé à partir de trois cent cinquante
heures de prises de vues, effectuées
entre 1974 et 1981. C'est à se demander
comment le financement a pu être
mobilisé si ce n'est en mutualisant les
contributions et autres dettes
éternelles que chaque pays occidental
doit à Israël pour la faute commise par
l'un des leurs La publicité faite ce
film documentaire est considéré comme
une réussite
« Le lièvre de Patagonie » nous fait
découvrir l'homme
Bernard Gensane qui
a lu l'un des derniers ouvrages de
Claude Lanzmann : « Le lièvre de
Patagonie » décrit un être ambivalent Il
s'en explique : « Au fil des années,
j'ai de moins en moins aimé Claude
Lanzmann. Autant j'avais été subjugué
par Shoah, autant les prises de position
de Lanzmann ces vingt dernières années
m'ont souvent fortement déplu.(..)
Lanzmann est un être bourré de
contradictions, mais qui ne les assume
pratiquement jamais comme telles. (…)
Dire que l'ego de Lanzmann est
boursouflé est indulgent. Il est le
meilleur en tout, le plus beau, le plus
intelligent. Aux grandes heures du
groupe France-Soir, il était « devenu
une sorte de journaliste vedette dans le
groupe de Pierre et Hélène Lazareff. »
Quand il montre un premier montage de
son film Pourquoi Israël, les invités
sont « emballés ». Il repère « d'un œil
d'aigle » la disposition des demeures où
il va interviewer les nazis pour Shoah »
(5).
«A côté de Jean
Paul Sartre et Simone de Beauvoir contre
la guerre d'Algérie, pour
l'indépendance. Il fera partie de la
revue Esprit fondée en 1945 par Jean
Paul Sartre .« De 1952 à 1962, Israël
disparaît de ses préoccupations car la
lutte des classes existe en France Il
déplore avec lucidité un monde « étrange
et lugubre où l'inhumaine indifférence
de l'homme pour l'homme semble un fait
de nature accepté comme tel, où le rejet
des faibles dans les oubliettes de
l'Histoire paraît aller de soi. (…)
Mais, dès lors que sa posture vis-à -vis
d'Israël se précise, il ne fait plus
dans la nuance et fonce tête baissée
dans une admiration inconditionnelle de
son nouveau modèle. Seulement � et c'est
là l'un des problèmes centraux de ce
livre � une armée est une armée (même si
ses soldats ont les cheveux longs), une
occupation est une occupation, un peuple
qui se veut biblique tout en étant,
pendant trente ans, le complice de
l'apartheid, la pire abjection politique
du monde de l'après-Deuxième Guerre
mondiale, est un peuple qui ne saurait
s'ériger en parangon de la conscience
universelle » (5).
«Jugeant le film Tsahal, Bernard Gensane
poursuit : « Prenant prétexte de la «
réappropriation de la force et de la
violence [sic] par les Juifs d'Israël »,
Lanzmann veut nous faire croire, dans
son film Tsahal, à une armée « pure, qui
[…] ne tue pas d'enfants », pétrie de «
valeurs » et faisant « peu de victimes
palestiniennes ». Neuf ans après Shoah,
il est subjugué par des officiers
israéliens au bras tatoué par les nazis
qui, fatalement, au nom d'une répression
systématique, finissent par violer les
droits de l'homme. Lui, l'homme de
gauche, oublie en cours de route cette
donnée valable pour toutes les armées du
monde : elles sont au service d'un
pouvoir. Ici, en l'occurrence, une
entreprise de spoliation des
Palestiniens, à commencer par leur droit
à l'eau potable. Jamais Lanzmann ne
reconnaît la légitimité de l'existence
même du peuple Palestinien, alors qu'il
est, plus que d'autres, « rejeté dans
les oubliettes de l'Histoire ». En
outre, son film, pourtant bien long, ne
consacre pas un plan au conflit sanglant
de la guerre du Liban (des dizaines de
milliers de morts), une guerre de huit
ans contestée par une forte minorité
d'Israéliens. Le signataire du Manifeste
des 121 en 1960 (Lanzmann y côtoyait
Leiris, André Breton, Sartre, Théodore
Monod) qui soutenait l'insoumission en
Algérie, ne donne pas la parole aux
pacifistes qui ont refusé d'envahir
Beyrouth ».(5)
«C'est un fait
poursuit Bernard Gensane : l'empathie
avec Tsahal est totale, au point d'en
devenir tragi-comique : « J'ai également
partagé la vie quotidienne des équipages
de tanks, participé à leurs exercices,
(…) Lanzmann justifie le sionisme de la
même manière que les Afrikaans ont
justifié leur mainmise sur le sud de
l'Afrique : par le fantasme permettant
tout, celui du mythe du kibboutz sauveur
de l'humanité. Pour lui, Israël devait
être « un désert, une terre vierge à
conquérir, où chacun serait le premier
homme et recommencerait le monde à mains
nues, dans une fraternité et une égalité
encore inconnues. » D'ailleurs, de quoi
se plaignent les Palestiniens ? Quand
Lanzmann accompagne Sartre dans les
camps de réfugiés palestiniens, les rues
sont proprettes et les riches Gazaouis
se délectent de mets abondants » (5)
En étant l'intime d'un Sartre Claude
Lanzmann est arrivé à graduellement
l'amener à adopter un philosemitisme
comme nous le lisons dans cette
contribution de l'intellectuel Farouk
Mardam-Bey : « En 1967, Jean-Paul Sartre
était incontestablement l'écrivain tous
genres confondus � le plus célèbre dans
le monde, y compris le monde arabe. Des
traductions de ses œuvres, de La Nausée
aux quatre premiers volumes de
Situations, en passant par L'Être et le
néant et les Chemins de la liberté,
avaient été publiés à Beyrouth ou au
Caire, et il faisait l'unanimité dans
les milieux intellectuels de gauche,
aussi bien chez les marxistes que les
chez les nationalistes. (…) C'est
pourquoi une profonde déception a suivi
la publication, dans Le Monde du 1er
juin, de la déclaration signée par une
quarantaine d'intellectuels français,
dont Sartre et Simone de Beauvoir,
exprimant leur solidarité avec Israël et
le refus « de l'identifier à un camp
impérialiste ». (….) Ce qui frappe
d'abord dans ces propos, c'est qu'ils ne
découlent pas de l'analyse rationnelle
de Sartre telle qu'on la lit dans ses
Réflexions sur la question juive,
publiées en 1946, et qui consistent pour
l'essentiel en une description
phénoménologique de l'antisémitisme. On
y trouve en particulier ces deux
affirmations qui ne pouvaient que
heurter la sensibilité des nationalistes
juifs : « Il n'y a pas d'histoire juive
» et « C'est l'antisémite qui fait le
Juif (...) qui contraint le Juif à se
choisir juif malgré lui. » (….) (6)
D'où vient donc cet élan « spontané »
de solidarité avec le projet sioniste ?
« Dans un livre,
poursuit Farouk Mardam-Bey écrit il y a
plus de quinze ans avec Samir Kassir,
Itinéraires de Paris à Jérusalem, nous
l'avons attribué [c'est l'auteur de
l'article qui écrit] à ce que nous
avions appelé « la tyrannie des idées
simples » : le philosémitisme comme
seule réponse possible à
l'antisémitisme, l'État juif comme
réparation des crimes nazis, la
continuité présumée entre la résistance
au nazisme, en France et ailleurs, et le
combat sioniste en Palestine. D'où la
construction d'un contretype absolu de
l'antisémite : le Juif opprimé et
résistant, opprimé partout et résistant
partout. Jusqu'à la fin de sa vie,
Sartre pensait sincèrement que le
conflit en 1947-1948 opposait pour
l'essentiel sionistes et Britanniques.
Quant aux Palestiniens, ils n'existaient
pas à ses yeux, et l'on a vu comment,
dans sa bouche et sous sa plume, la «
cause palestinienne » renvoyait à celle
des sionistes, et « l'État palestinien »
à Israël.(…) Son proche entourage
comprenait des sionistes convaincus,
notamment Claude Lanzmann, rentré
d'Israël en état d'exaltation.(…) » (6)
« Ami d'Israël,
conclut Farouk Mardam-Bey Sartre se
voulait aussi ami du monde arabe et se
proposait même de jouer un rôle dans le
rapprochement entre les deux camps, ou
plutôt entre les forces de gauche arabes
et israéliennes. « Nous nous trouvons,
aujourd'hui que le monde arabe et Israël
s'opposent, comme divisés en nous-mêmes
et nous vivons cette opposition comme si
c'était notre tragédie personnelle. » Et
c'est sans doute dans cet esprit qu'il a
entrepris, en février-mars 1967, son
voyage au Moyen-Orient, en compagnie de
Simone de Beauvoir et de Claude
Lanzmann. Un numéro spécial des Temps
modernes était prévu, censé amorcer le
dialogue, d'abord indirect, qu'il
appelait de ses vœux, et il entendait de
son côté s'en tenir à la plus stricte
neutralité. (…) Pour conclure, on peut
dire que le seul élément constant chez
Sartre dans son approche du conflit
israélo-arabe est le philosémitisme,
perçu depuis la Seconde Guerre mondiale
comme compensation et investi dans
l'entreprise sioniste. Tout le reste, la
dépossession des Palestiniens,
l'occupation et l'annexion des
territoires arabes, la détresse des
réfugiés, apparaît ou disparaît en
fonction de la conjoncture. Si bien que
l'on peut se demander, avec Edward Saïd,
si l'élan naturel de solidarité avec
Israël ne se doublait pas chez lui d'une
absence élémentaire de sympathie à
l'égard des Arabes � et d'une totale
indifférence à leur histoire et à leur
culture ». (6)
Le parti pris
inconditionnel pour l'armée Israélienne
Claude Lanzmann
ayant défendu dans son film Tsahal
l'armée la plus pure au monde ne
pouvait que nier le meurtre en directe
d'un enfant palestinien de 12 ans,
Mohammed al-Durah, « tué par balles
alors que son père tentait de le
protéger, lors d'échanges de tirs entre
les Forces de sécurité palestiniennes et
l'armée israélienne, le 30 septembre
2000, au début de la seconde Intifada.
Le journaliste franco-israélien Charles
Enderlin a été le premier journaliste à
commenter les images à la suite du film
des événements pris par son caméraman.
Son reportage était diffusé le soir même
sur France 2 au JT de 20 h et repris à
travers le monde. (…) et suscite une
émotion considérable. L'armée
israélienne reconnaît dans un premier
temps sa responsabilité, et publie des
excuses officielles : le général Giora
Eiland déclare à la BBC le 3 octobre que
« les tirs venaient apparemment des
soldats israéliens postés à Netzarim »
répète ces propos sur CNN («
apparemment, l'enfant a été tué par
l'armée israélienne »), et dit également
: « Autant que nous puissions savoir,
l'enfant a été touché par nos tirs »
(cité par Haaretz le 25 janvier 2002).
Ces propos sont ensuite confirmés par le
général Moshe Ya'alon. (…) La montée des
réactions provoquées par les images et
la crainte de leur possible
instrumentalisation, écrit Hervé
Deguine, conduisent l'armée à revenir
sur ses positions » Encore une fois
Claude Lanzmann se signala par sa
partialité , il prit position et
s'exprima à propos du preneur d'images
palestinien de Charles Enderlin (Talal
Abou Rahma) dans le journal Le Monde en
ces termes : « Ce qui me révolte
personnellement dans cette histoire,
c'est que cette mort a été filmée en
direct par le cameraman arabe d'une
chaîne française de télévision » (7)
A l'en croire la
chaine n'avait pas à recruter un
caméraman arabe il sous entend qu'il
serait complice dans le complot contre
l'armée israélienne qui elle a
initialement reconnu sa responsabilité.
Ce qui intéresse Claude Lanzmann ce
n'est pas la mort de l'enfant ni la
justice mais la fidélité sans faille à
Israël Un tout autre point de vue
du philosophe Jacques Derrida qui
déconstruit selon nous l'holocauste en
lui enlevant sa singularité. Kadhim
Jihad Hassan parle justement de
l'objectivité de Derrida concernant le
problème israélo-palestinien : « On me
pardonnera si je ne nomme ici
l'holocauste, c'est-à-dire
littéralement, comme j'avais aimé
l'appeler ailleurs, le brûle-tout, que
pour en dire ceci : il y a certes
aujourd'hui la date de cet holocauste
que nous savons, l'enfer de notre
mémoire ; mais il y a un holocauste pour
chaque date, et quelque part dans le
monde à chaque heure. Chaque heure
compte son holocauste. L'écoute
attentive, de la part de Derrida, des
doléances des Palestiniens se trouve
surtout en superposition, en cohérence,
avec une critique quasi permanente de
certains entendements du judaïsme et des
politiques israéliennes successives,
voire de la façon même dont a été fondé
l'État moderne d'Israël. On se rappelle
en effet comment, dans son ouvrage
L'Écriture et la différence, paru en
1967, Derrida affirmait que le judaïsme
n'a pas besoin d'un État national et que
sa vocation réelle, ainsi que son
attachement à la liberté seraient mieux
sauvegardés dans une présence active à
travers le monde (…) » (8)
D’où proviennent
les financements des différents films ?
Au-delà de
l’appréciation sur la pertinence et la
valeur de ces films, il faut savoir que
que ce film qui a duré douze ans pour
son tournage ( 350 h de tournage,
pour n’en retenir que 10 heures), a du
bénéficier d’un budget exceptionnel
L’idée du film a été avancée par le
chef du département de l’information du
ministère [israélien] des Affaires
étrangères, à la veille de la campagne
électorale de 1977. Le ministère était
intéressé à produire un film
d’information historique et s’adressa à
Lanzmann pour le faire. L'origine du
film est une commande du gouvernement
israélien : « L'aventure
de Shoah commence ici : mon ami Alouf
Hareven, directeur de département au
ministère des Affaires étrangères
israélien, me convoqua un jour et me
parla avec une gravité et une solennité
que je ne lui connaissais pas. […] Il ne
s'agit pas de réaliser un film sur la
Shoah, mais un film qui soit la Shoah.
[…] Si tu acceptes, nous t'aiderons
autant que nous le pourrons8. » Mais
le film a rapidement épuisé les commanditaires,
tant par sa durée que par ses délais de
fabrication. Le réalisateur a dû trouver
d'autres financements : gouvernement
français et beaucoup de dons directs en
France.
Par contre, aucun
secours du Congrès
juif mondial ni d'aucun donateur
américain ! » (9)
Pour éviter qu’il
ne soit perçu comme un film de
propagande israélien, le financement du
metteur en scène fut transféré via une
société fictive créée à l’étranger à cet
effet », S’agissant des autres films
tels que Tsahal …Pourquoi Israël , on
apprend qu’il existe en France des
financements qui indirectement aident
Tsahal. Nous lisons cette contribution
de Laurent Bonnefoy chercheur au
CNRS : « Au regard de la loi, il suffit
qu'une association soit déclarée
d’intérêt général pour que cela donne le
droit à 60% de réduction d’impôts à ses
donateurs, dans la limite de 20% du
revenu imposable. Le problème, c'est
qu’au regard du droit international, les
colonies israéliennes sont illégales.
Mais il n'y a pas que cela. « On
trouve des associations qui financent
très directement des colonies ou qui
financent Tsahal. On a eu, par exemple,
l’une d’entre elles qui a lancé une
campagne pour financer des lampes
torches qui seraient fixées sur les
fusils M16 des soldats israéliens ».
Donc si vous êtes un particulier, 60% de
votre don sera déductible des impôts. Il
suffit pour cela de remplir un
formulaire, comme l’explique le
chercheur : « On peut obtenir ce que
l’on appelle un formulaire Cerfa, qui
permet d’obtenir les deux tiers de son
don en abattement fiscal. Ça va donc
pour une association qui intervient dans
le cadre aujourd’hui de l’effort de
guerre israélien sur Gaza. » (10)
Beaucoup de
critiques ont été faites pour ce
document Schlomo Sand professeur
d’Histoire l’université de Tel
Aviv « une subjectivité incisive
et orientée ». Il parle de mégalomanie
Avec le temps, les réserves, les
critiques ou les attaques se sont
multipliées Que répond Claude
Lanzmann ? « Moi, je suis l’auteur du
film Shoah, auquel j’ai consacré
onze années d’un travail acharné, mais,
depuis que j’ai fait ce film, je suscite
des haines que je n’imaginais pas du
tout ! Une jalousie terrifiante, une
volonté meurtrière que je constate,
particulièrement chez certains Juifs.
(….) Je vous signale par ailleurs que
[en France] le ministère de l’Education
nationale a adressé, cette année, un DVD
de trois heures d’extraits de Shoah aux
4 500 lycées de France. (…) Le Pape a
fait une déclaration officielle de
soutien à Shoah » (11).
Que dire en
définitive de Claude Lanzmann ?
Il aura marqué son
temps par sa faculté à arracher ce qu’il
veut à qui il veut. Il faut tout aussi
signaler qu'il a découvert le judaïsme
et Israël bien après la deuxième guerre
mondiale, il était lycéen pendant
l'occupation , il aurait de la
résistance. Il eut moins de chance dans
ses études ayant été recalé aux
différents concours. Rien à voir avec
Simone de Beauvoir lauréate de
l'agrégation de philosophie comme Jean
Paul Sartre. Sa proximité avec Sartre,
lui a permit de connaitre aussi et
d'approcher la révolution algérienne en
allant même à la rencontre de certains
responsables du FLN. En signant le
manifeste des 121 contre la torture il
aura de notre point de vue réalisé le
seul acte à son crédit.
Claud Lanzmann aura
réussi à faire changer d'avis à Jean
Paul Sartre concernant la cause
palestinienne ce qui a terni du même
coup la considération qu'avait Sartre
auprès de l'élite intellectuel arabe En
fait le vrai combat de Claude Lanzmann
pour lequel il a lutté est celui de la
défense d'Israël quel qu'en soit le prix
quels que soient les multiples erreurs ;
quelles que soient les souffrances des
Palestiniens lui l'homme prétendu de
gauche Il le dit lui-même il est
viscéralement lié à Israël.
Rien à voir avec la
position élégante du philosophe Jacques
Dérrida né à El Biar ( Alger) qui toute
sa vie, témoigna de sa tendresse pour
l'Algérie et qui en l'occurrence en tant
que juif s'agissant du conflit
palestinien eut une position plus
équilibrée. : « Je parle ici, écrit il
comme Algérien devenu français un moment
donné, ayant perdu sa citoyenneté
française, et l'ayant retrouvée. Parmi
toutes les richesses culturelles que
j'ai reçues, que j'ai héritées, ma
culture algérienne est parmi celles qui
m'ont le plus fortement soutenu.
L'héritage que j'ai reçu de l'Algérie
est quelque chose qui a probablement
inspiré mon travail philosophique. (…)
»(8)
Les mots de Yasser
Arafat sont plus que jamais d’actualité
car mettre en œuvre toutes les méthodes
pour faire apparaitre le conflit
israélo-palestinien sous un jour négatif
pour les Palestiniens, tôt ou tard , ne
fera pas illusion. Les centaines de
milliards de dollars versés par
l’Occident au nom de sa culpabilité
envers les Juifs, notamment en mettant
en œuvre des films de propagandes qui
passent constamment en boucle sur
toutes les chaines avec même des
documentaires sur les exactions du IIIe
Reich sont un tonneau des Danaïdes , l’industrie
de l’Holocauste -pour reprendre le
titre de l’ouvrage de Norman
Finkelstein dont les parents ,moururent
à Auschwitz, et qui fut scandalisé
par la pompe à finance- ne pourra rien
faire contre les faits. Un peuple veut
vivre sur 18 % de sa Terre originelle :
la Palestine. Il faut bien que la
communauté internationale – la vraie-
l’aide à recouvrer ses droits, rien que
ses droits, tout ses droits; Amen
Notes
1.https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Lanzmann
2.https://www.lexpress.fr/culture/cinema/claude-lanzmann-l-oeuvre-memorielle-inegalee_2023135.html?
3.https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/07/05/le-journaliste-et-cineaste-claude-lanzmann-est-mort_5326313_3382.html
4. Baptiste Savignac
http://www.lefigaro.fr/cinema/2018/07/05/03002-20180705ARTFIG00236-claude-lanzmann-et-simone-de-beauvoir-l-amour-fou.php
5.https://www.legrandsoir.info/mort-de-claude-lanzmann-retour-sur-le-lievre-de-patagonie.html
6. Farouk Mardam-Bey Sartre Israël et
les Arabes : la « détermination
affective Matériaux pour l'histoire de
notre temps 2009/4 (N° 96)
7.https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Mohammed_al-Durah
8.Kadhim Jihad Hassan Les Palestiniens
dans la pensée de Jacques Derrida ;
Collège international de Philosophie N°
89-90, 2016/2
9.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Shoah_(film)
10.http://www.rfi.fr/france/20140801-financer-armee-israelienne-tsahal-payer-moins-impots-france-fiscalite-dons-gaza-cisjordanie
11.Claude Lanzmann Paris Match p.12.
7 novembre 2012
Article de
référence
http://www.lequotidien-oran.com/?news=5263889
Prof. Chems Eddine
Chitour
Ecole Polytechnique
Alger
Le sommaire du Pr Chems Eddine Chitour
Le dossier
Monde
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