Les enjeux
de la vie internationale
Guerres en Irak. Causes et effets
Charles Enderlin
© Charles
Enderlin
Mercredi 25 juin 2014
Les chiffres de l’échec donnent le
vertige. Le bilan de la guerre en Irak,
de 2003 à 2011, est de 4486 morts et
32232 blessés américains. Près de 180
000 irakiens, civils et militaires tués.
Les Etats Unis ont dépensé 2,2 trillions
de dollars. Un chiffre qui pourrait
atteindre les 6 trillions au fil des
ans, en comptant les intérêts bancaires
et les retraites diverses payés aux
vétérans de ce conflit durant les années
à venir. Tout cela pour occuper et
reconstruire l’Irak et former une
nouvelle armée de 200 000 hommes, avec
500 000 policiers et des dizaines de
milliers de paramilitaires. Cet effort
gigantesque est parti en fumée ces
dernières semaines. Les djihadistes de
l’État islamique en Irak et au Levant
(EIIL, dont l’acronyme arabe est : «
Da’ech ») ont mis en fuite les soldats
entrainés par des conseillers
américains, conquis les villes de
Mossoul, Tikrit, Tal Afar, et
s’approchent de Bagdad.
Une vision quasi mystique
Et voilà ! L’Amérique qui s’était lancée
dans cette guerre pour désarmer Saddam
Hussein et « lutter contre Al Qaeda »,
se retrouve avec l’embryon de califat
bâti par les héritiers d’Osama Ben
Laden. George W. Bush et ses conseillers
néo-conservateurs voulaient, par le «
nation building », transformer la carte
géopolitique de Proche–Orient. Une
vision quasi mystique d’une démocratie -
sur le modèle européen- prenant souche
en Irak. A l’époque, les dirigeants
israéliens avaient applaudi. Pendant des
décennies, ils brandissaient la menace
d’un front oriental où les divisions
blindées irakiennes viendraient franchir
le Jourdain pour détruire l’État juif.
Ces même conseillers américains avaient,
en 1996, proposé à Benjamin Netanyahu,
une nouvelle stratégie fondée sur
l’abandon du principe « La terre contre
la paix » dans les négociations avec les
Palestiniens, et établir un nouvel
équilibre des forces dans la région en…
faisant disparaître Saddam Hussein. On
voit le résultat. (cf. mon livre : Les
années perdues, p. 33-35)
Des conseils à l'Amérique
Pour l’heure, Benjamin Netanyahu donne
des conseils à l’administration Obama.
Dans une interview récente à l’émission
« Meet the Press » de NBC, il a déclaré
: « Les Chiites radicaux soutenus
par l’Iran et les Sunnites extrémistes
menés par Al Qaeda sont des ennemis de
l’Amérique et lorsque vos ennemis se
combattent, ne renforcez ni l’un ni
l’autre ! » Surtout, il ne faudrait
pas, selon lui, que Washington coordonne
sa politique en Irak avec Téhéran car :
« L’objectif ultime au Proche Orient
doit être d’empêcher l’Iran de se doter
de l’arme atomique. » Et le Premier
ministre israélien de critiquer les
négociations qui se déroulent à ce sujet
entre les puissances mondiales (le P5+
1) et l’Iran. C’est sa principale
préoccupation.
Inquiétudes
L’armée israélienne, elle, suit de très
près les avancées des djihadistes de
l’EIIL, surtout vers le plateau du Golan
où ils ne sont pas encore parvenus en
nombre. Le dernier incident, au cours
duquel un adolescent israélien a été tué
par un tir de missile, a été provoqué
par les forces de Bashar Al Assad. La
situation en Jordanie est beaucoup plus
préoccupante, et, au ministère de la
Défense à Tel Aviv, certains experts
craignent une déstabilisation du Royaume
Hachémite. D’après ce que l’on sait, les
services des deux pays échangent leurs
analyses. La propagation de l’idéologie
de l’EIIL au sein de certaines
populations, en Jordanie et chez les
Palestiniens, les inquiète tout
particulièrement. Et, cela ne fait que
commencer…
Publié le 26 juin 2014
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