Les enjeux
de la vie internationale
Explicite
Charles Enderlin
© Charles
Enderlin
Mercredi 20 mai 2015
Un peu partout en Europe des hommes
politiques et des éditorialistes
accueillent le nouveau gouvernement
israélien en se lamentant ou en le
critiquant. Des réactions pour le moins
surprenantes. De fait, la communauté
internationale fait preuve, d’une belle
hypocrisie ou d’un refus psychanalytique
de la réalité.
Pour l’expliquer, il faut reprendre les
principes développés dans un éditorial
du New York Times par Anat Biletzki,
professeur de philosophie dans une
université américaine et à Tel Aviv.
Elle a présidé l’ONG israélienne de
défense des droits de l’homme, B’Tselem
entre 2001 et 2006.
Implicitement
Par exemple, lorsque Benjamin Netanyahu
a prononcé, pour la première fois les
mots « état palestinien », le 14 juin
2009 dans son fameux discours à
l’Université Bar Ilan, près de Tel Aviv,
cela sous entendait, pour les
responsables américains, et surtout le
Président Obama, qu’il acceptait
implicitement, le principe d’un accord
avec l’OLP. C’était ce qu’ils voulaient
entendre. Mais, pour les Palestiniens,
et surtout leurs négociateurs à
Ramallah, c’était tout le contraire.
Netanyahu venait de rendre la paix
impossible en y mettant des conditions.
Il exigeait d’eux qu’ils reconnaissent «
publiquement et catégoriquement
Israël en tant que patrie du peuple juif
». Jamais cela n’avait été exigé de
l’Égypte ou de la Jordanie lors de la
signature des traités de paix avec ces
pays. Ce n’est pas tout : «
L’Autorité palestinienne devra faire
régner la loi à Gaza et triompher du
Hamas, Israël ne prendra pas place
autour de la table de négociation avec
des terroristes résolus à détruire notre
pays. » Et Netanyahu d’annoncer que
« Jérusalem doit rester la capitale
unifiée de l’État d’Israël où la liberté
de culte de toutes les religions sera
scrupuleusement respectée. » Une
notion rendue encore plus explicite, ce
dimanche 17 mai lorsqu’il a déclaré lors
d’une cérémonie marquant « La journée de
Jérusalem » : « C’est depuis toujours
la capitale du peuple juif et d’aucun
autre peuple et le restera… L’avenir
appartient à Jérusalem unifiée qui ne
sera plus divisée »
Dream team de la droite israélienne
Pour son quatrième mandat à la tête du
gouvernement israélien, il a donc réuni
une coalition dans la droite ligne de sa
promesse électorale : « Si je suis réélu
il n’y aura pas d’état palestinien » Un
exemple : la nomination du rabbin Elie
Ben-Dahan (député du parti « foyer juif
») au poste de vice-ministre de la
Défense, en charge de l’administration
civile (qui est en fait militaire). A ce
titre, il est responsable de la
colonisation et … des palestiniens. A ce
propos voici ce qu’il en pense
explicitement : « Nous devons prendre
le contrôle total de la zone C (NDLR :
60% de la Cisjordanie) et y imposer la
loi israélienne. Je ne pense pas que la
communauté internationale aura une forme
quelconque d’emprise sur Israël si nous
le faisons. Lorsque nous avons annexé
Jérusalem-Est et le Golan, les États
unis ont protesté et suspendu leur
soutien (à Israël) pendant quelque
temps, mais, finalement ils ont compris
que nous étions un état souverain et
qu’en fin de compte qu’il n’y avait pas
d’alternative à notre contrôle du Golan.
Le reste de la Judée Samarie restera
sous contrôle civile et sécuritaire
palestinien, mais il n’y aura pas de
solution permanente ou d’état souverain
(palestinien) »
Le premier aout 2013, le rabbin Ben-Dahan,
qui était alors vice ministre des
affaires religieuses, a explicité sa
vision des palestiniens : « Ce sont des
bêtes, pas des êtres humains » a-t’il
dit dans une interview à la station de
radio « Radious ». Et d’ajouter: «Le
peuple palestinien n’est pas éduqué pour
la paix. Il ne veut pas la paix »
Explicitement
Benjamin Netanyahu savait parfaitement
ce qu’il faisait en accordant le
portefeuille de la justice à Ayelet
Shaked, laïque, annexionniste, membre,
elle aussi, du « Foyer juif ».
Passons sur l’affaire de son post sur
Facebook où elle avait repris un texte
d’Ouri Elitzour justifiant le
bombardement de civils palestiniens.
Cela avait fait scandale. Ce n’est pas
cela qui l’a poussé a devenir garde des
sceaux.. En 2014, députée, elle a été à
la pointe du combat contre la cour
suprême avec une proposition de loi
devant permettre au Parlement d’annuler
une loi rejetée par la Haute cour. Selon
les juristes, cela devait permettre à
une majorité parlementaire de droite
d’amender les textes de défense des
droits de l’homme et des minorités. Elle
va donc pouvoir la remettre sur la table
en tant que projet de loi
gouvernemental. Madame Shaked est aussi
présidente de la commission
ministérielle des lois et pourra ainsi
décider quel texte sera soumis au vote
de la Knesset. Ce n’est pas tout, elle a
aussi la présidence de la commission de
nomination des juges… Sans oublier
qu’elle est entend faire adopter le
projet de loi constitutionnel
redéfinissant Israël comme l’état nation
du peuple juif…
Curieusement, à Washington, à Paris et à
Bruxelles on continue à parler de la
solution à deux états comme la seule
possible… Les diplomates ont visiblement
du mal à comprendre l’explicite..
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