Politique
Fillon et Macron,
le parti du pognon
Bruno Guigue
Samedi 4 février 2017
Le plus étonnant,
dans l'affaire Fillon, c'est
l'étonnement qu'elle provoque. La droite
a toujours été liée aux puissances
d'argent, elle en est le porte-parole
naturel. Cette droite dont le notable
sarthois présente le visage, qui plus
est, n'est pas n'importe quelle droite.
C'est la droite libérale, orléaniste,
celle dont l'exhortation adressée à ses
pairs par François Guizot, en 1840,
résumait la vision du monde : «
Enrichissez-vous ! ». D'un François à
l'autre, du premier ministre de
Louis-Philippe à celui de Nicolas
Sarkozy, cette bourgeoisie qui tient le
haut du pavé concentre la richesse et
monopolise le pouvoir. C'est sa raison
d'être.
On a dit que M.
Fillon s'était fort mal défendu. C'est
vrai. On l'accuse d'avoir payé sa femme
à ne rien faire avec de l'argent public.
Il répond qu'il a aussi payé ses enfants
! La seule explication à cette
plaidoirie suicidaire, c'est que M.
Fillon ne voit pas le problème. Ce qu'il
a fait, à ses yeux, est dans l'ordre des
choses. Arrogance de riche ? Oui, bien
sûr, mais surtout bonne conscience de
ceux que leur proximité avec le capital
dote d'un sentiment d'immunité. S'il n'y
a rien d'étonnant à ce que les
représentants des riches aiment
l'argent, il n'y a rien d'étonnant non
plus à ce qu'ils trouvent normal de
s'enrichir à leur tour par tous les
moyens.
Quand vous êtes en
difficulté et qu’on prend votre défense,
il y a toujours un imbécile qui vend la
mèche. Parmi les défenseurs du candidat
de droite, Gérard Longuet s’est
distingué par sa finesse. la dotation
allouée aux parlementaires, a-t-il dit,
n'est pas de l'argent public. Une fois
attribuée aux élus, elle est libre
d'emploi, non affectée à ceci ou à cela.
Juridiquement faux, l'argument vaut son
pesant de cacahuètes. Il signifie
qu'entre les mains des politiciens
l'argent public se privatise, qu'il
s'affranchit de l'intérêt général. Ce
n'est plus une enveloppe à dépenser dans
l'exercice de ses fonctions, mais un
complément de rémunération pour toute la
famille. Le pognon de Pénélope ? Très
simple. C'est une allocation familiale
de luxe pour commis de la bourgeoisie.
Le plus cocasse,
c'est qu'en face du châtelain
orléaniste, les médias ont propulsé sur
la scène un produit à peine décongelé
qui dégage le même parfum de billets de
banque. Car Emmanuel Macron, lui aussi,
est un homme d'argent. Prévoyant, ce
jeune vautour du CAC40 s'est constitué
un petit matelas de quelques millions
d'euros qui l'autorise à dire que les
Français, ces illettrés aux mains sales,
ne travaillent pas assez. L'ex-trader de
chez Rothschild n'est pas un notable au
sens classique, mais un affairiste
polyglotte, symbole de cette élite
mondialisée dont ses supporters Alain
Minc et Jacques Attali ânonnent le credo
à longueur d'antenne. Candidat de la
bourgeoisie branchée et friquée, c'est
un pur produit de la caste.
C'est pourquoi les
médias asservis aux neuf milliardaires
ont lancé sur le marché cette nouvelle
offre politique comme on fait la
publicité d'une savonnette. Macron,
c'est le véritable plan B de la droite.
Elle a fait une erreur de casting, elle
a parié sur le mauvais cheval, mais la
candidature du bébé Rothschild résout le
problème. Elle pare à la défaillance du
Sarthois, ce cheval de bât qu’on a pris
pour un cheval de course. Macron, dont
la campagne a été financée par les
crédits du ministère des Finances, est
un adepte de la privatisation des fonds
publics, lui aussi. Comme Fillon, il ne
voit pas le problème. Son budget de
campagne est abondé par la City ?
Faisons fi des frontières ! Il ne paye
pas l’ISF ? Qu’importe ! Il va supprimer
cet impôt scandaleux qui a transformé la
France en démocratie populaire.
Fillon et Macron,
c'est le Janus à double face d'une
bourgeoisie d'affaires qui sait, de
toute façon, qu'elle tirera son épingle
du jeu électoral, cette farce dont nous
sommes les dindons. Fillon et Macron,
c'est le même parti, le parti du pognon.
L'élection présidentielle de 2017 est
pipée d'avance. Face à un Front national
dont la seule fonction est de jouer les
épouvantails (ses partisans devraient au
moins une fois dans leur vie se demander
pourquoi), le candidat du système
passera la rampe. Adoubé par les médias
au service de l'oligarchie, ce candidat
au profil de chouchou des belles-mères
ne sera pas l'élu du peuple, mais du
bourrage de crânes.
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