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Pourquoi Moncef Marzouki va-t-il être battu

Aziz Krichen

Vendredi 12 décembre 2014

Le premier tour de l’élection présidentielle tunisienne de 2014 a eu lieu le 23 novembre 2014, la première depuis la Révolution de 2010-2011. Aucun candidat n’a remporté la majorité absolue au premier tour un second tour aura lieu le 21 décembre entre Béji Caïd Essebsi, chef de Nidaa Tounès, ancien ministre sous Habib Bourguiba et président du parlement sous Ben Ali, et le président sortant Moncef Marzouki, chef du Congrès pour la République et proche du parti néo-islamiste d’An Nahda.

Pourquoi Moncef Marzouki va-t-il être battu.

Par Aziz Krichen

Je fais une lecture très positive du résultat des dernières élections législatives. Le paysage politique partisan a enfin commencé à se clarifier et s’équilibrer. C’est une bonne chose pour tout le monde. C’est une bonne chose pour Nahdha, qui ne peut plus se laisser aller à ses penchants hégémoniques. C’est une bonne chose pour Nidaa Tounes qui, même s’il est arrivé en tête et même s’il le voulait, ne pourrait pas se permettre de reproduire les pratiques d’exclusion de l’ancien régime. Et j’ajouterai, paradoxalement, que c’est une bonne chose pour l’avenir du mouvement démocratique.

L’effondrement électoral des partis se réclamant de ce mouvement ne marque pas la mort d’un idéal ; il annonce au contraire que la voie est maintenant libérée pour construire une alternative politique mature, capable de transcender les clivages identitaires.

Tels sont, selon moi, les acquis, effectifs ou potentiels, dégagés par le scrutin du 26 octobre. Dans cette optique, l’élection présidentielle ne présente qu’un intérêt mineur, dans la mesure où le mode de gouvernement est devenu essentiellement parlementaire.

La bataille principale a déjà eu lieu et a livré son verdict. Cette nouvelle élection constitue cependant un moment de vérité, et il est important de l’apprécier à la lumière de la perspective qui vient d’être dessinée. La question qui se pose est la suivante: la campagne présidentielle va-t-elle confirmer ou infirmer la tendance à la stabilité et à l’apaisement? Va-t-elle constituer une étape supplémentaire dans la normalisation politique ou, au contraire, marquer un brutal retour en arrière?

A première vue, la qualification de Moncef Marzouki au deuxième tour semble signifier que l’affaire est mal engagée. Mais il ne faut pas se laisser abuser par les apparences. L’espèce d’agressivité frénétique dans laquelle le candidat sortant s’est jeté, en en espérant une victoire électorale, n’a aucune chance de succès. Pour une raison très simple: le jeu politique est déterminé par ses acteurs principaux, et lui n’est qu’un second couteau.

La logique d’une élection présidentielle à deux tours obéit à des règles élémentaires, que l’on peut ramener à la formule suivante: au premier tour, on se démarque, on se différencie, on mobilise d’abord son camp; au deuxième tour, on adopte un discours d’ouverture et d’unité, pour rassembler au-delà de ses partisans et réunir une majorité.

Etudions les possibilités objectives de Moncef Marzouki par rapport à la mise en œuvre de ces principes de base.

Chacun sait qu’il ne s’est qualifié qu’en réactivant à son profit la bipolarisation. Il a pu ainsi mobiliser l’électorat du CPR, son propre parti, celui du Tayyar, une scission du CPR, et celui d’Ennahdha. Ces trois formations réunies avaient totalisé 1.085.768 voix aux législatives. Moncef Marzoukia réalisé 1.092.418 voix au premier tour de la présidentielle.

Sa rhétorique d’affrontement lui a donc permis de rassembler l’essentiel du potentiel électoral de «son»1 camp.

Pour espérer obtenir une majorité de suffrages et l’emporter au second tour, il lui faut changer de registre, ratisser plus large, s’ouvrir notamment aux courants démocratiques et progressistes – bref: passer d’une logique d’attaque bloc contre bloc à une logique d’entente et de réconciliation.

Peut-il le faire? Il suffit de poser la question pour connaître la réponse. Moncef Marzouki est incapable d’opérer pareille mutation, parce qu’il est pris dans une contradiction insurmontable: d’une part, il s’est trop discrédité depuis trois ans aux yeux de l’électorat non islamiste pour le séduire aujourd’hui uniquement en pacifiant son discours; d’autre part, et dans l’hypothèse où il abandonne sa phraséologie guerrière, il est sûr de perdre une grande partie des soutiens collectés au premier tour, qui l’avaient appuyé en raison précisément de son extrémisme verbal.

De fait, la seule issue disponible devant lui, c’est la poursuite de la fuite en avant, la radicalisation encore plus outrancière de son discours sectaire, la surenchère dans la fitna. Un discours où il ciblerait, en désespoir de cause, non pas les électeurs des candidats non qualifiés au second tour, mais les abstentionnistes du premier tour, pour les convaincre de venir voter le 21 décembre. Une attitude qui ne lui apportera pas grand-chose au bout du compte, mais qui fera monter la tension et la violence dans le pays.

C’est ce que l’on appelle la politique de la terre brûlée – une sortie de scène bien peu glorieuse pour quelqu’un qui se réclamait naguère des droits de l’homme…

En face, malgré plusieurs handicaps, le candidat Beji Caïd Essebsi paraît capable de rassembler beaucoup plus que son électorat partisan (1.279.941 voix pour Nidaa Tounes aux législatives, 1.289.384 voix pour BCE à la première manche des présidentielles). Il semble certain, en effet, qu’une grande majorité des voix recueillies par le Front populaire (255.529), l’UPL (181.407) et Afek Tounes (102.916) se reporteront sans états d’âme sur lui au second tour, selon une proportion d’environ deux sur trois. Il n’est pas même exclu que les supporters du Courant de l’amour (sic!) de Hechmi Hamdi (187.923 voix) se joignent à eux. Au total, BCE bénéficiera d’un différentiel de voix considérable et l’emportera avec un écart tel qu’il ne souffrira aucune contestation.

En conséquence, on peut estimer que la défaite de Moncef Marzouki est d’ores et déjà inscrite dans les chiffres. Mais il y a encore un autre facteur à prendre en compte, qui pourrait transformer la défaite en déroute.

Les Tunisiens se doutent que ce ne sont pas le CPR (72.942 voix aux législatives) ni le Tayyar (65.792) qui ont porté Moncef Marzouki au second tour, mais Ennahdha (947.034). Engagés dans une négociation musclée avec Nidaa Tounes à propos des conditions de leur cohabitation dans le système de pouvoir à mettre en place durant le prochain quinquennat, les islamistes ne tenaient pas à ce que BCE passe dès le premier tour, parce que cela les aurait privés d’une carte maîtresse dans le rapport de force qu’ils voulaient instituer. Or, le dimanche 23 novembre, à la mi-journée, c’est ce scénario qui était en train de s’imposer.

C’est alors que furent données les consignes appelant à aller voter massivement en faveur du candidat sortant, avec le résultat que l’on connaît. Mais cette décision du parti Ennahdha était purement tactique, uniquement valable dans le contexte du premier tour.

L’enjeu est totalement différent pour le second tour. Ennahdha ne se hasardera pas à pousser le bras de fer jusqu’à la rupture. Les dirigeants islamistes n’ignorent pas les contraintes intérieures et extérieures qui pèsent sur eux. Ils savent que ces contraintes les condamnent à suivre une ligne de prudence et de modération et à rechercher des solutions de compromis raisonnables avec Nidaa Tounes et BCE, qui détiennent dorénavant les principaux leviers de commande.

Dans cette optique, il n’y a aucune place pour l’actuel locataire du palais de Carthage.

Ceux qui spéculent sur le fait que la direction d’Ennahdha soit aujourd’hui débordée par ses militants se trompent grossièrement. Certes, cette direction est minée par des divergences internes et elle n’exerce plus un contrôle absolu sur la totalité de ses troupes et de ses clientèles – mais elle garde toujours une autorité incontestée sur ce qui constitue la base de masse du mouvement. En d’autres mots, le patron d’Ennahdha est Rached Ghannouchi; il n’est pas et ne sera jamais Moncef Marzouki, quoi qu’il fasse ou ferait pour donner le change.

Que va-t-il alors se passer durant cette campagne du deuxième tour ? On l’imagine sans peine. Les vrais partis, comme les vrais Etats, n’ont ni amitié ni alliance permanentes, ils n’ont que des intérêts.

Déjà au premier tour, les islamistes avaient lâché un nombre élevé d’«amis» et d’«alliés» – Mustapha Ben Jaafar, Nejib Chebbi, Kamel Morjane, Mohamed Frikha, Hamouda Ben Slama, Abderrahim Zouari, etc. -, dont ils avaient encouragé ou suscité la candidature, pour tuer dans l’œuf tout projet de constitution d’un troisième axe qui serait venu perturber le tête-à-tête bipolaire. Le 21 décembre, ce sera au tour du dernier «ami» et «allié» d’être abandonné au milieu du gué.

Plusieurs signes indiquent que le lâchage a déjà commencé. On peut parier qu’il ira en s’amplifiant. Au final, Moncef Marzouki se retrouvera livré à lui-même. Il sera battu et bien battu. Et il passera à la trappe, comme ses anciens compagnons piteusement éliminés au premier tour. Sauf que sa chute sera sans doute plus douloureuse que la leur, car il tombera de plus haut.

Illustration

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Reçu de René Naba pour publication

 

 

   

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Source : Madaniya
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