The Electronic
Intifada
Israël, parmi les pires geôliers de
journalistes au monde
Ali Abunimah
Des
journalistes palestiniens manifestant le
10 septembre à Hébron pour demander la
libération
de leurs confrères d’al-Sanabel Radio,
retenus en détention par Israël depuis
le mois précédent.
(Wisam
Hashlamoun – APA Images)
Vendredi 16 décembre 2016
Au 1er décembre, il y
avait 259 journalistes emprisonnés dans
le monde, selon le recensement annuel
effectué par le Comité pour la
protection des journalistes (CPJ) – le
nombre le plus élevé jamais enregistré.
Le groupe de loin le plus important,
81 journalistes, est celui des détenus
en Turquie, suivi de la Chine (38) et de
l’Égypte (25).
Israël détient 7 journalistes selon
le CPJ, ce qui le met à égalité avec la
Syrie et Bahreïn, juste derrière l’Iran
(8) et devant l’Arabie saoudite (6).
Parmi ces détenus actuels, il y a
Omar Nazzal, arrêté par l’armée
israélienne en avril au passage
frontalier entre la Cisjordanie occupée
et la Jordanie, alors qu’il se rendait à
une réunion de la Fédération européenne
des journalistes à Sarajevo.
Depuis, Nazzal est détenu sans
inculpation ni jugement. « Dans les
semaines qui précédaient son
arrestation, Nazzal diffusait des
communiqués sur Facebook critiquant la
répression d’Israël contre les médias
palestiniens, notamment la fermeture de
Palestine Today, une chaîne de
télévision affiliée au Jihad islamique »,
investie et fermée par l’armée
israélienne en mars 2016 selon le CPJ.
En novembre, Israël a renouvelé la
détention administrative de Nazzal pour
six autres mois.
Emprisonnés pour avoir
informé
Quatre des journalistes actuellement
détenus par Israël sont Ahmad Darawish,
Muhammad Imaran, Muntasir Nassar et
Nidal Amro, qui travaillent pour al-Sanabel
Radio. Tous ont été arrêtés par les
forces israéliennes lors d’un raid de
nuit sur leurs domiciles le 31 août,
dans le village de Dura, en Cisjordanie
occupée, près d’Hébron.
L’armée israélienne a inculpé ces
hommes pour « incitation » –
une accusation souvent lancée contre les
journalistes, utilisateurs de médias
sociaux et même professeurs d’université
et poètes palestiniens, qui expriment
des critiques ou rendent compte de
l’occupation par Israël.
Selon le CPJ, des cas de ces
prétendues incitations, telles que
citées par Israël, incluent des
reportages en direct sur les raids
nocturnes effectués par l’armée, et des
paroles de certaines chansons.
« Aucun cas d’employés usant d’un
langage incitant directement à une
violence imminente n’a été fourni dans
les actes d’accusation », déclare
le CPJ, mais on a trouvé des exemples de
paroles de chansons diffusées par
al-Sanabel Radio que l’armée
israélienne a qualifié d’ « incendiaires ».
Les deux autres journalistes
actuellement en détention cités par le
CPJ sont Adib al-Atrash, l’auteur de la
publication en ligne Palestine Post,
incarcéré en juillet, et Ali al-Iwiwe,
un animateur de la radio palestinienne
Radio 4, arrêté à son domicile
à Hébron, en octobre 2015.
« Le soir de l’arrestation d’al-Iwiwe,
Radio 4 était en train
d’informer sur les meurtres de Bashar et
Hussam al-Jabrai, deux cousins
adolescents abattus par (l’armée
israélienne) à Hébron, alors qu’un
soldat aurait été blessé » déclare
le CPJ. « Les autorités israéliennes
ont fait circuler des images montrant
les corps des garçons près de couteaux.
Les habitants palestiniens ont contesté
l’authenticité de ces images, affirmant
que les couteaux avaient été posés là ».
Des enquêteurs des droits de l’homme
ont rapporté que les deux garçons
étaient en train de demander à des
soldats israéliens de les aider à passer
le check-point pour pouvoir rentrer chez
eux, quand ils ont été abattus.
Enfermés pour vouloir
participer à une conférence
Le CPJ reconnaît que son recensement
est « un instantané de ceux qui sont
incarcérés » au 1er
décembre et que, par conséquent, « il
n’inclut pas les nombreux journalistes
emprisonnés puis relâchés tout au long
de l’année ».
En juin, l’organisation Addameer, qui
défend les droits des prisonniers
palestiniens, informait que 21
journalistes palestiniens étaient
derrière les barreaux israéliens.
Depuis lors, un certain nombre
d’entre eux ont été relâchés, dont Samah
Dweik, qui a terminé six mois de prison
en septembre pour avoir écrit sur la
situation et partagé une image sur sa
page Facebook en soutien aux
Palestiniens récemment assassinés par
les forces israéliennes.
Sami al-Saai, correspondant d’Alfajer
TV, a été arrêté en mars et il a
passé 9 mois en prison, accusé par
Israël d’ « incitation » sur
Facebook.
Mujahid al-Saadi, correspondant de la
chaîne de télévision Palestine Today,
a été arrêté dans la ville de Jénine, en
Cisjordanie, en janvier 2016. En
juillet, un tribunal militaire israélien
l’a condamné à sept mois de prison et à
une amende de 1300 dollars (près de 1250
€).
Al-Saadi, qui souffrirait de
multiples problèmes de santé, avait
précédemment passé un total de cinq ans
dans les prisons israéliennes.
Mais il y a au moins un autre
professionnel de la presse, toujours en
détention israélienne, et qui n’est pas
dans la liste du CPJ de ceux en cours de
détention.
Hassan Safadi, 24 ans, a été arrêté
le 1er mai alors qu’il
rentrait en Cisjordanie d’une conférence
de la jeunesse arabe en Tunisie, via la
Jordanie. Il a été interrogé de façon
musclée pendant 40 jours.
Safadi assure la coordination avec
les médias arabes pour Addameer. Ses
confrères et amis s’attendaient à ce
qu’il soit libéré ce mois-ci.
Mais au lieu de cela, les autorités
israéliennes ont prolongé sa détention
sans inculpation pour six mois
supplémentaires.
La peur de la vérité
En 2014, Israël était le deuxième
pays le plus meurtrier au monde pour les
journalistes, après la Syrie. Au moins
15 professionnels des médias ont été
tués durant l’agression d’Israël contre
Gaza cet été-là, 7 d’entre eux étaient
en mission.
« On pourrait croire qu’Israël,
prétendument l’État le plus démocratique
du Moyen-Orient, autorise la liberté
d’expression, mais ses violations de la
liberté de la presse sont alarmantes »,
a déclaré à The Electronic Intifada
le journaliste Mohammed Omer,
actuellement aux États-Unis. « S’en
prendre aux journalistes et aux équipes
de presse est un acte de lâches. Nul ne
doit avoir peur de la vérité ».
Les journalistes palestiniens
continuent d’être confrontés aussi à un
harcèlement et à des arrestations de la
part de l’Autorité palestinienne en
Cisjordanie occupée et des autorités du
Hamas dans Gaza occupée.
Parmi les sept journalistes sur la
liste du CPJ qui sont détenus en Syrie,
il y a la blogueuse Tal al-Mallohi,
arrêtée en 2009. En février 2011, elle a
été condamnée à cinq ans de prison par
un tribunal d’État pour la sécurité,
prétendument coupable de divulgation de
secrets d’État, mais sa libération a été
ordonnée en octobre 2013.
Pourtant, Al-Mallophi n’a jamais été
relâchée. « On ne sait pas vraiment
pourquoi al-Mallohi reste en prison en
dépit de l’ordre d’un tribunal de la
libérer » déclare le CPJ. « Sa
condamnation à cinq ans a expiré depuis
début 2016 ».
Le CPJ ajoute que le blog d’al-Mallohi
« se consacrait aux droits des
Palestiniens et critiquait la politique
israélienne. Il débattait aussi des
frustrations des citoyens arabes par
leurs gouvernements, et qu’elle
percevait comme une stagnation du monde
arabe ».
Ali Abunimah est cofondateur de
The Electronic Intifada et auteur
de « La bataille pour la justice en
Palestine ».
Traduction : JPP pour l’Agence Média
Palestine
Source:
Electronic Intifada
© 2011
Agence Media Palestine.
All Rights Reserved.
Publié le 19 décembre 2016
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