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Ha'aretz
Quand Tzipi Livni
cisèle ses formules
Zvi Bar'el
[la ministre des affaires étrangères
Tzipi Livni a de jolies formules pour parler d'un "axe modéré".
Pratique pour éviter de répondre à une question essentielle :
Israël est-il prêt, oui ou non, à se retirer des territoires
occupés?]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/810115.html
Ha'aretz, 7 janvier 2007
Devant l'Union des Autorités locales, la ministre des affaires étrangères
Tzipi Livni a innové : "Aujourd'hui, je peux placer des
parties qui partagent un dénominateur commun dans le même camp,
y compris certains Etats
arabes. La menace iranienne est une question qui inquiète également
les Etats modérés voisins de l'Iran." Il est donc temps de
nouer des alliances avec les Etats arabes modérés et aussi de
parler avec les Palestiniens
modérés, y compris dans une situation de terrorisme. Car, pense
Livni, "dans la situation d'aujourd'hui, la division entre
Arabes et Juifs, entre gauche et droite, est devenue obsolète. Le
[véritable] clivage est entre les
extrémistes et les modérés, à tous les niveaux."
Il s'agit effectivement d'une distinction séduisante, et qui évite
le cœur de la lutte entre nations. Comme s'il n'y avait en réalité
qu'un seul affrontement global, contre l'islam extrémiste
symbolisé par l'Iran, et que cet affrontement traversait les
frontières, évacuait les aspirations nationales des Palestiniens
et ôtait même tout sens aux différences entre droite et gauche.
L'Occident contre l'Orient, et rien d'autre. Formulation très
confortable pour un membre d'un gouvernement qui n'a pas raté une
occasion d'affaiblir ces mêmes modérés et de les pousser au désespoir.
Mais, alors que Tzipi Livni cisèle ses formules, comme quelqu'un
qui se considère digne de postuler au poste de premier ministre,
quelqu'un d'autre dirige l'Etat d'Israël. Le jour même où elle
faisait ses remarques, son patron Ehoud Olmert rencontrait Hosni
Moubarak pour parler de quelques dizaines de millions de dollars
de plus pour Mahmoud Abbas, de la libération de quelques
centaines de prisonniers, et, peut-être, peut-être seulement,
d'une rencontre quadripartite entre la Jordanie, l'Egypte, Israël
et Abbas. Cette discussion entre Olmert et Moubarak n'avait donc
rien d'une nouvelle initiative diplomatique ni d'une vision. Il
s'agissait tout simplement de troc.
Il ne manquait pas grand-chose pour dire que l'importance de cette
rencontre avec Moubarak résidai dans le fait même qu'elle ait eu
lieu, comme si Moubarak était un ennemi plutôt qu'un allié qui
attend depuis des années qu'Israël lui donne enfin quelque chose
afin qu'il puisse faire avancer les processus régionaux. Olmert
avait-il vraiment besoin de se rendre auprès de Moubarak pour
parler de 100 millions de $ qui, de toute façon, appartiennent
aux Palestiniens, ou de la nécessité pour les Egyptiens de
renforcer leur surveillance de l'axe Philadelphie (frontière
entre l'Egypte et la bande de Gaza)?
Mais quand d'importants dirigeants comme Moubarak et le roi
Abdallah de Jordanie ("modérés" selon la terminologie
de Livni, ayant osé signer un traité de paix avec Israël) sont
traités comme des apparatchiks, dont la seule fonction est
d'attendre au téléphone, ou quand une rencontre avec eux est
considérée comme un "geste", alors qu'une rencontre
avec le président Bush est qualifiée de "sommet", le
terme d'"axe modéré" perd de son sens.
De toute façon, quand dans la perspective de la guerre entre les
Enfants de la Lumière contre les Enfants des Ténèbres, on ne
remarque pas les colonies illégales ou la reprise de la
construction dans le marché de Hebron, la nouvelle thèse
orientaliste de Livni s'effondre sur cette division entre
"extrémistes et modérés à tous les niveaux". De
plus, cet "axe modéré" a une espérance de vie limitée.
Moubarak est en train de préparer l'Egypte à son héritier. Le
roi Abdallah d'Arabie saoudite n'est plus une jeunesse. La
Jordanie est bien un ami proche, mais elle n'a pas l'influence de
ses deux voisins. Les dirigeants syriens sont de toute façon désignés
comme des soutiens au terrorisme, même si Assad cherche à
reprendre les négociations. Abbas est occupé à mettre fin à la
guerre des gangs chez lui, et au lieu d'un plan diplomatique, tout
ce qu'il reçoit, c'est un baiser sur la joue de la part d'Olmert
et une livraison de fusils. Et le jour de la rencontre à Sharm
el-Sheikh, lui et Moubarak recevaient un petit coup à l'israélienne
: l'opération mortelle d'un commando à Ramallah (opération
qualifiée plus tard "d'erreur" par l'armée israélienne,
ndt).
La Ligue arabe, qui en 2002 avait accepté d'accorder à Israël
une ceinture de sécurité et une promesse de normalisation en échange
d'un retrait et d'une solution au problème palestinien, pense que
personne en Israël ne l'a prise au sérieux. Et, après 40 ans
d'occupation, les Etats arabes veulent savoir : Israël a-t-il oui
ou non l'intention de se retirer des territoires, de démanteler
les colonies, de descendre du Golan et de redessiner ses
frontières? Si la réponse est non, et si Israël ne souhaite
parler que de la libération de quelques centaines de prisonniers
et de quelques millions de dollars, il devra mener ses affaires
face aux organisations terroristes.
Trad. : Gérard pour La Paix
Maintenant
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