Selon une source diplomatique de haut rang et
proche des pourparlers entre la Syrie et Israël avec médiation
turque, les Etats-Unis se sont convaincus qu’ils devaient
prendre part aux négociations, mais que la France "s’est
poussée" en Syrie. La participation du président français
Nicolas Sarkozy aux pourparlers qui ont eu lieu à Damas ont
conduit les Etats-Unis à revenir pour le moment sur leur
décision.
Selon cette même source, le sous-secrétaire
d’Etat américain David Welch devait participer en tant
qu’observateur à la prochaine rencontre israélo-syrienne en
Turquie, mais Washington refusait d’être "à la traîne" des
Français, et la participation de Welch a été annulée. La source
a dit également que la participation de Welch aurait dû marquer
le lancement de conversations directes entre les Syriens et les
Israéliens et qu’aujourd’hui, on ignore quand pareilles
conversations commenceront.
Selon la diplomatie française, c’est le
président syrien Bachar Assad qui a invité la France à
superviser ces conversations directes. Les Etats-Unis ne peuvent
donc pas se plaindre s’ils ont hésité à le faire.
Sarkozy et Assad doivent se réunir aujourd’hui
[hier] à Damas avec le premier ministre turc Recep Tayyip
Erdogan et le dirigeant du Qatar, Sheikh Hamad bin Khalifa Al
Thani. Ce sommet est considéré comme une réussite majeure pour
Assad, la France présidant actuellement l’Union européenne et Al
Thani étant président du Conseil Coopératif du Golfe qui réunit
six pays.
Washington ne participant pas aux pourparlers
indirects, et peut-être pour renforcer la position de la France
tout en perçant l’isolation de la Syrie par les Etats-Unis,
Assad pourrait s’accommoder d’une supervision
franco-turco-qatarie des négociations directes avec Israël, au
moins jusqu’aux élections américaines. À ce moment, un
représentant des Etats-Unis pourrait s’y joindre. En tout cas,
Israël ne pourrait pas refuser des rencontres directes, même si
Washington décidait de ne pas y prendre part.
Il est à noter que la participation de Sarkozy
à ce sommet constitue un pied de nez à la résolution 1559 du
Conseil de sécurité des Nations unies initiée par la France et
les Etats-Unis il y a quatre ans. Cette résolution stipule que
toutes les forces étrangères devaient quitter le Liban et que
toutes les milices armées, y compris le Hezbollah, devaient être
dissoutes. Cette résolution avait provoqué la colère des
Syriens, et d’après un travail de recherche effectué par les
Nations unies, avait partiellement préparé le terrain pour
l’assassinat du premier ministre libanais Rafic Hariri, qui
avait œuvré à la promouvoir. La résolution 1701, qui mettait fin
à la seconde guerre du Liban, se fondait d’ailleurs sur cette
résolution 1559. Compte tenu de la grande réconciliation
franco-syrienne qui paraît sur les rails, il semble qu’il n’y
aura plus personne pour pousser à sa mise en œuvre.
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Par ailleurs, le Jerusalem Post, dans son
édition du 1er septembre 2008, apporte les compléments
d’information suivants :
Le cinquième round des pourparlers de paix
indirects entre la Syrie et Israël, qui devait avoir lieu jeudi
en Turquie, a été repoussé à lundi à cause de la démission du
négociateur en chef israélien de ses fonctions de directeur de
cabinet du premier ministre .
Du fait de sa démission, Yoram Turbowicz, qui
exerçait également les fonctions de conseiller principal pour
les affaires étrangères auprès d’Ehoud Olmert, a perdu
l’autorité juridique qui lui permettait de mener les
négociations au nom d’Israël. Il attend donc l’autorisation de
Menahem Mazouz, procureur général de l’Etat (et conseiller
juridique du gouvernement, ndt).
Selon la radio de l’armée (Galey Tsahal), ce
retard de l’arrivée de délégués en Turquie a conduit les
représentants turcs et syriens à se poser des questions sur les
intentions d’Israël. Certains ont affirmé que ce retard
intervenait à la suite de la récente visite de Bachar Assad en
Russie et de ses déclarations concernant l’intention de la Syrie
d’acheter des missiles russes.
Toutefois, selon Israël,
la seule raison de ce retard est d’ordre bureaucratique :
"Nous sommes engagés à poursuivre les
pourparlers avec la Syrie et ils reprendront dès que possible",
ont déclaré lundi des sources du cabinet d’Olmert.
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Par ailleurs encore, peut-être un autre effet
induit (et à vérifier) de cette visite de Sarkozy à Damas :
selon Ha’aretz, Khaled Mesh’al, le dirigeant du Hamas en exil à
Damas, aurait quitté la capitale syrienne pour s’installer au
Soudan.