Tunisie
Tunisie. «Kolna
Amal Aloui», la femme qui a dit non aux
salafistes extrémistes
Zohra
Abid
Vendredi 9 mars
2012
Un petit bout de
femme a pris le risque d’escalader les
murs de la faculté de la Manouba et
tenté d’empêcher la profanation du
drapeau national par un extrémiste
religieux. C’était la veille de la Fête
internationale de la Femme.
Par
Zohra Abid
C’était hier, le 7 mars 2012, un
moment qui restera gravé dans la mémoire
des Tunisiens et Tunisiennes. Le drapeau
sacré de la Tunisie a été remplacé par
une bannière noire sous des «Takbir et
Allahou akbar» (Dieu est grand) de
salafistes extrémistes. Dont une grande
partie, pour une affaire de niqab,
squatte la faculté depuis le 28 novembre
dernier et veut imposer leurs lois de
«TALIBAN» et empêche les étudiants et
les enseignants d'entrer en cours.
Serait-ce un
cauchemar ?
Il fallait voir la gravité de l’acte
commis. «C’était odieux, nous étions
tous comme tétanisés. Pourtant c’était
vrai et il fallait bien nous pincer la
peau pour dire qu’on n’était pas dans un
cauchemar, mais dans la réalité»,
raconte à Kapitalis un étudiant sur
place.
Comme cet étudiant, plusieurs ont été
tétanisés (voire impuissants) et cloués
sur place. A ce moment-là, il a fallu
qu’une femme se fraye un petit chemin
dans la foule en ire et offre le
meilleur spectacle de l’année.
Animée par une bonne dose de colère
(et de courage), une étudiante qui
s'appelle, selon les uns Amal et selon
d'autres Khaoula, grimpe le mur et
affronte l’homme barbu et en qamis
afghan qui a osé remplacer le drapeau
national par sa bannière noire, couleur
de deuil. Résultat : l’homme tout en
muscles s'est permis de mettre la fille
par terre (c’était sur le toit). A ce
moment-là, ses camarades ont rejoint,
sur le toit, l’extrémiste, renfort
obligé. A voir ce qui se passait, des
étudiants sont montés, à leur tour (sur
le toit sic !), pour secourir la
courageuse étudiante. Une rixe entre les
deux camps s’est déclenchée.
Réveillez-vous !
Ceci n’est pas un film. Ceci s’est
bien passé en Tunisie. Et nous sommes
bel et bien la veille du 8 mars, Journée
de la fête de la Femme. Journée de la
liberté, des libertés. Personne n’est
resté insensible.
Aussitôt, sur les réseaux sociaux,
les Tunisiens et Tunisiennes se sont
déchaînés. Ils ont tiré des archives
tant d’articles datant des années 1900 à
propos de l’histoire du drapeau
tunisien. Et ce n’est pas tout. Ils ont
fait de petites recherches, en guise de
rappel, à propos des symboles du
croissant (symbole de l’islam) et de
l’étoile (autre symbole des 5 piliers de
la religion du prophète Mohamed) qui
estampillent notre drapeau. Et ce n’est
pas fini !
Les couleurs de notre drapeau
national en rouge et blanc, rappellent
aussi la paix et le sang, celui des
martyrs… A ces extrémistes, les
internautes ont fait passer leur message
: ceux qui portent atteinte à ces
symboles n’ont qu’à aller s’instruire.
Car, ils ont touché au sacré : le
croissant et l’étoile, deux symboles de
l’islam. Et pour appartenir au pays, il
y a eu des martyrs qui sont tombés pour
que la Tunisie soit indépendante. Un
autre rappel : s’il n’y avait pas eu ces
martyrs pendant la révolution du 14
janvier (plus de 300 tombés sans compter
les 1000 blessés, aujourd’hui
handicapés), ces extrémistes n’auraient
eu aucune chance de sortir dans la rue
manifester librement dans toutes les
régions du pays.
«Kolna Amal,
Khaoula et toutes les autres»
C’est grâce aux hommes et aux femmes
morts pour le drapeau, que les Tunisiens
peuvent aujourd’hui manifester
librement. Dans un autre temps, ce
n’était pas possible, même pas dans nos
rêves. Les Tunisiens, sont vous et nous,
la majorité et les minorités de toutes
les idéologies et les confessions. En ce
jour du 8 mars, celui des droits de la
Femme, les internautes ont dit leur mot,
d’une seule voix : «Kolna Amal, kolna
Khaoula» (Nous sommes tous Amal, Khaoual).
En signe d’hommage à la femme, à toutes
les femmes d’ici et d’ailleurs.
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Publié le 9 mars 2012 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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