Opinion
La France et les
valeurs démocratiques
Soraya
Hélou
Jeudi 17 janvier
2013 A chaque nouveau test -même involontaire-
l’occident en général et la France en
particulier montre son véritable visage,
celui d’un pays qui ne reconnaît les
valeurs démocratiques que pour une
partie déterminée et qui établit des
distinctions entre ceux qui ont droit à
la démocratie et aux droits de l’homme
et ceux qui n’y ont pas droit. Le
dernier exemple a été donné par le cas
du militant Georges Ibrahim Abdallah.
Indépendamment de ce qu’on peut penser
de l’action de ce militant qui au début
des années 80 a participé à l’assassinat
d’un diplomate américain et d’un autre
israélien en France en riposte aux
agressions israéliennes répétées contre
les Palestiniens, le Liban et le monde
arabe en général avec l’appui des
Etats-Unis, cet homme a été condamné et
a purgé sa peine dans les prisons
françaises. Il y est même resté plus
longtemps que prévu, en dépit de son
comportement exemplaire selon les
rapports des administrations
pénitentiaires françaises. Mais au bout de 28 ans de détention (un
record en France où en général les
condamnés à long terme bénéficient
généralement d’une remise de peine au
bout de 20 ans), la Cour de cassation
française a enfin décidé que cela
suffisait et que Abdallah devait être
libéré. La plus haute autorité
judiciaire a donc donné sa décision.
Mais le ministre de l’Intérieur Manuel
Valls (le plus à droite des socialistes)
en a décidé autrement et il a donc
refusé de signer le «bon de sortie» du
militant. D’une part, le ministre de
l’Intérieur a violé le principe de
séparation des pouvoirs en vigueur en
France qui consiste à ce que le pouvoir
exécutif n’intervienne pas entre autres
dans le travail du pouvoir judiciaire,
mais de plus, il a bafoué les droits de
l’homme et le respect des libertés en
principe en vigueur en France. Pourquoi
? Tout simplement parce que la
porte-parole du Département d’Etat
américain Victoria Nowland a vivement
condamné les autorités judiciaires
françaises pour la décision de remettre
en liberté Georges Ibrahim Abdallah.
Pour Mme Nowland et l’administration
qu’elle représente, Abdallah doit
croupir en prison et y rester même après
sa mort pour avoir osé toucher à un
diplomate américain et à un autre
israélien, qui, eux, ont le droit de
couvrir les assassinats accomplis par
leurs soldats ou par leurs agents des
renseignements partout dans le monde
dans la plus totale impunité. Si Georges
Ibrahim Abdallah avait assassiné un
diplomate iranien, ou syrien ou encore
d’un pays qui n’est pas allié ou aligné
sur la politique américano-israélienne,
il aurait sans doute bénéficié d’une
rapide remise de peine, s’il avait été
jugé. Mais le plus probable est qu’il
aurait été rapatrié avec les honneurs
pour avoir commis un acte héroïque. Et
avec cela, ce sont ces Etats
prétendument démocratiques qui veulent
donner des leçons aux autres sur le
respect des lois et des libertés. Ce
sont ces mêmes Etats qui envoient leurs
avions de combat semer la mort et faire
couler le sang dans les autres pays. Ils
envoient aussi leurs soldats tuer,
arrêter, torturer sous couvert de
démocratie et refusent à un détenu
exemplaire qui a assumé avec un courage
rare ses actes, sans chercher à
quémander la compassion ni à remettre en
question les lois en vigueur d’être
libéré bien après avoir purgé la
totalité de sa peine. Quel est donc aux yeux de ces grandes
démocraties que sont la France et les
Etats-Unis, le statut de l’ex-détenu
mais encore prisonnier Georges Ibrahim
Abdallah ? Manuel Valls ne prend même
pas la peine de répondre à cette
question. Pour lui, les choses sont
claires : les Etats-Unis ont décidé et
lui se contente d’exécuter. Vive la
souveraineté, en plus de la démocratie
et de la liberté.
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