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Opinion
Une défense en trois
volets qui embarrasse le TSL
Soraya Hélou
Sayed Hassan Nasrallah
Lundi 13 décembre 2010
Et de trois! Avec la dernière conférence de presse du chef du
bloc parlementaire de la résistance hajj Mohammed Raad avec
l’ancien membre du Conseil Constitutionnel Sélim Jreïssaty, le
Hezbollah a bouclé sa campagne en trois temps pour montrer les
failles du TSL et de l’enquête internationale et du TSL. Cette
campagne magistrale avait commencé par un premier discours du
secrétaire général sayed Hassan Nasrallah dans laquelle il avait
donné les grandes lignes de son action qui ne sera pas basée sur
des slogans et des condamnations mais sur des éléments concrets.
Comme à son habitude, il a tenu parole. Sayed Nasrallah a
commencé par adresser des messages clairs à ses partenaires au
sein de la nation, notamment le leader du PSP et le Premier
ministre, pour leur préciser que le TSL et l’acte d’accusation
annoncés sont une affaire grave qui met en cause l’avenir du
Liban. Dans une conférence de presse unique en son genre au
Liban, le sayed est ensuite entré dans le vif du sujet,
dévoilant à l’opinion publique un faisceau d’indices montrant
une éventuelle implication israélienne dans l’assassinat de
l’ancien Premier ministre Rafic Hariri. Documents inédits à
l’appui, il a montré comment les avions israéliens avaient
l’habitude de surveiller les déplacements de cheikh Rafic,
comment un de leurs espions se trouvait sur place la veille de
l’assassinat, comment encore les avions Awacs surveillaient le
Liban le jour de l’attentat et enfin, comment grâce aux aveux de
nombreux espions arrêtés par les services libanais, Israël avait
l’habitude d’introduire au Liban des équipes de commandos ainsi
que des valises noires contenant des explosifs. Croyant pouvoir
réduire la portée de ces données, certaines voix au sein du 14
mars se sont empressées de contester les éléments de preuve
apportés par sayed Nasrallah. Mais ce sont les Israéliens
eux-mêmes qui confirmé l’authenticité des images aériennes
divulguées par le secrétaire général du Hezbollah, assurant
qu’elles ont bel et bien été prises par des drones israéliens,
tout en étant choqués par la capacité du Hezbollah de capter et
de déchiffrer ces images. Sayed Nasrallah a ainsi ouvert en
grand une piste israélienne dans l’assassinat de Premier
ministre Rafic Hariri.
Dans le second volet de la campagne, c’est le président de la
commission parlementaire des télécommunications le député Hassan
Fadlallah qui a donné une conférence de presse conjointe avec le
ministre des Télécoms Charbel Nahas et les experts du ministère.
L’objectif était de montrer grâce à des données scientifiques
comment les Israéliens contrôlent le secteur des télécoms au
Liban. Appuyant leurs dires de documents concrets, les
participants à cette conférence de presse ont non seulement
prouvé que les Israéliens écoutent l’ensemble des communications
libanaises, mais ont aussi la capacité de manipuler les
communications et de semer des puces dans les téléphones
portables, selon une technologie ultra-sophistiquée. De la
sorte, le Hezbollah a discrédité le principal élément de preuve
sur lequel repose, selon les prétendues fuites, l’acte
d’accusation du procureur Bellemare. Là aussi, le 14 mars n’a
pas pris la peine de répondre sur les données scientifiques, se
contentant d’un rejet global du contenu de la conférence de
presse et d’attaques personnelles contre le ministre Charbel
Nahas.
Le troisième volet de la campagne a été encore plus percutant.
Grâce à des arguments fondés sur des textes juridiques et des
études rédigées par le président du TSL, à l’époque où il
n’avait pas encore été désigné pour ce poste, Hajj Mohammed Raad
et le professeur Sélim Jreïssaty ont exposé les lacunes dans la
formation du TSL qui a bafoué les règles constitutionnelles
libanaises (puisque ni le président de la République ni le
Parlement n’ont été consultés pour négocier la convention signée
avec le Conseil de sécurité et approuver les statuts du TSL) ,
ainsi que les irrégularités des amendements de son code de
procédure, notamment dans le système de preuves basé sur
l’acceptation des preuves indirectes et les violations des
droits de la défense à travers l’acceptation des témoignages
écrits et secrets ainsi que le non respect des normes
élémentaires de la justice internationale à travers
l’acceptation du jugement par défaut. Le Pr Jreïssaty a ensuite
lu une étude rédigée par le président du TSL Antonio Cassese
après son expérience dans le tribunal international pour l’ex-Yousgoslavie
dans laquelle il affirme que la justice internationale est un
instrument entre les mains des grandes puissances pour exercer
des pressions sur des Etats, un peu comme les sanctions
économiques. Une fois de plus, il n’y a eu aucune réaction sur
le fond, le 14 mars se contentant d’attaquer le Pr Sélim
Jreïssaty et de s’accrocher au TSL.
Pourtant, les milieux concernés, notamment ceux du TSL, savent
combien les éléments développés par le Hezbollah sont importants
et provoquent une véritable crise de crédibilité pour ce
tribunal. Le Hezbollah a ainsi voulu bâtir sa position sur des
faits concrets irréfutables. C’est d’ailleurs la raison pour
laquelle les ripostes ont été si faibles et pratiquement hors
sujet. Le camp du 14 mars mais aussi les parrains internationaux
du TSL sont embarrassés et cherchent désormais à sauver la face
en affirmant que même si l’acte d’accusation du procureur
Bellemare est remis au juge de la mise en état Daniel Fransen,
ce sera ce dernier qui décidera de le publier ou non. Ils se
sont ainsi accordé un délai supplémentaire pour ouvrir la voie à
un nouveau compromis. Le langage menaçant au sujet de l’acte
d’accusation de Bellemare a bel et bien été abandonné. C’est là
une preuve de plus de la réussite de la campagne menée par le
Hezbollah. Même ses adversaires sont obligés de reconnaître que
ces cibles ont atteint leur objectif. Reste à avoir si un
tribunal qui se veut professionnel et juste peut continuer à
fonctionner après toutes ces révélations.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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