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Opinion

Lorsque l'Histoire s'emballe...
Soraya Hélou

Dimanche 13 février 2011

L’incroyable est devenu réalité. En moins de temps qu’il n’en a fallu aux Tunisiens pour se débarrasser de leur dictateur, le monstre aux pieds d’argile égyptien, le pharaon de papier Hosni Moubarak que l’on croyait inamovible a cédé devant la volonté du peuple après trente ans de règne sans partage sur son pays.
Pour l’Egypte, pour le monde arabe et musulman et même pour la communauté internationale, le moment est historique. Ces 80 millions d’Egyptiens que l’Occident considérait comme des va-nu-pieds, acceptant toutes les humiliations et tous les diktats, réduits à l’état de simples créatures uniquement soucieuses de leur survie, ont montré au monde entier qu’ils savaient réclamer leurs droits de la manière la plus civilisée possible et qu’ils exigeaient le respect et le droit à la dignité. Les manifestants égyptiens ont pris de court le monde entier et ils ont obligé les grandes chancelleries du monde à revoir leur politique dans la région et leur vision des populations arabes. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à se rappeler le cafouillage dans les positions du président américain Barak Obama qui se contredisaient d’un jour à l’autre, montrant qu’il ne savait plus s’il fallait continuer d’appuyer le dictateur, le lâcher pour son vice-président qui rassurait les Israéliens ou modifier radicalement l’approche et rattraper la situation en redevenant la puissance qui appuie les droits de l’homme et la démocratie.
S’il est encore trop tôt pour définir les conséquences de la révolution démocratique en Egypte sur l’ensemble de la région et sur les politiques occidentales ainsi que sur Israël, on peut d’ores et déjà affirmer que les Egyptiens (ainsi d’ailleurs que les Tunisiens) ont donné une belle leçon à l’Occident. Lui qui se targue de défendre les valeurs démocratiques n’a jamais réellement lutter pour les promouvoir dans le monde, notamment arabe, considérant avec un mépris total que la démocratie c’est bon pour lui, mais pas pour ce qu’il considère comme le Tiers monde. Les populations des pays dits en voie de développement n’ont qu’à se contenter de dictateurs corrompus qui s’assoient sur une chaise et ne la quittent plus que morts pour ensuite la laisser à leurs enfants, du moment que ceux-ci protègent les intérêts de la communauté internationale à sa tête les Etats-Unis. De Marcos aux Philippines au Shah en Iran, en passant par Ben Ali en Tunisie et Moubarak en Egypte, les administrations américaines n’ont cessé d’appuyer les dictateurs, faisant fi des aspirations des populations. Et voilà que le sort se retourne contre le magicien.
Les peuples ont choisi de s’exprimer et l’administration américaine a dû s’incliner, ne sachant comment tenter de limiter les pertes. Avec un cynisme effarant, l’administration américaine cherche désormais à se démarquer de Moubarak et de Ben Ali, comme elle l’a fait avec leurs prédécesseurs déchus, pour établir des liens avec les nouvelles équipes au pouvoir et protéger ses intérêts.
Si l’on jette un regard sur la situation régionale, on constate qu’en quelques décennies, les Etats-Unis ont perdu l’Iran, perdu de leur influence en Turquie, au Liban, en Irak, en Tunisie et maintenant en Egypte. Bien sûr, nul ne se fait trop d’illusions, les Etats-Unis chercheront à récupérer la donne, quitte à jeter du lest aux protestataires, mais il est certain que leur influence et leur puissance a reculé dans la région. Tous les régimes arabes cherchent désormais à écouter leurs peuples, quittes à prendre leurs distances avec les Etats-Unis et l’Occident en général.
C’est que l’Egypte, c’est tout de même un gros morceau. Si le régime de Hosni Moubarak qui tenait le pays d’une main de fer depuis trente ans a pu tomber, c’est qu’aucun dirigeant de la région n’est plus à l’abri, d’autant qu’en définitive, la communauté internationale n’est pas prête à se mouiller pour défendre ses alliés ou ceux qui l’ont servie fidèlement au détriment des intérêts de leur populations.
Le changement en Egypte, même si ses contours sont encore imprécis, a donc pour première conséquence de susciter un sentiment quasi général de panique chez tous les dirigeants qui n’écoutent pas la voix de leurs peuples, se croyant à l’abri dans le giron américain. Ils vont devoir désormais initier des réformes et le phénomène a déjà commencé dans de nombreux pays. Deuxième conséquence, l’inquiétude des dirigeants israéliens (exprimée dans toutes leurs déclarations récentes), qui craignent que l’équilibre si difficilement mis en place depuis l’accord de Camp David en 1978 qui a neutralisé l’Egypte ne soit remis en question. Bien entendu, les nouveaux maîtres de l’Egypte se sont empressés de déclarer qu’ils ne respecteront les accords régionaux et internationaux, mais quelque chose a changé dans le climat général en Egypte, d’autant que la population n’a jamais vraiment fait la paix avec les Israéliens. Si le nouveau régime n’est sans doute pas prêt à déclarer la guerre à Israël, il pourrait toutefois modifier sa politique de durcissement à l’égard de Gaza. Ce qui augmenterait encore l’inquiétude des Israéliens et renforcerait le Hamas, au détriment d’une Autorité palestinienne de plus en plus discréditée. Pour ne pas perdre totalement les Palestiniens, l’Occident devra probablement sacrifier Mahmoud Abbas dont le mandat a expiré depuis longtemps et qui ne tient encore que grâce à l’appui des Américains, des Israéliens et de l’Union européenne.
Ce ne sont là que les premiers changements. Il y en aura d’autres car les Egyptiens ont changé la face de la région et depuis vendredi, l’Histoire s’est emballée.

Article publié sur Résistance islamique au Liban

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Source : Fadwa Nassar


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