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Opinion
Liban 2010, une
année sur le fil du rasoir
Soraya Hélou
Lundi 3 janvier 2011
Avec le début de 2011, c’est une nouvelle page qui s’ouvre au
Liban, avec toutefois les mêmes acteurs et la même trame que
ceux de 2010. Tout au long de l’année passée, qui avait commencé
sur le coup de la visite du Premier ministre Saad Hariri à Damas
et qui semblait ainsi porteuse d’espoirs, les Libanais n’ont
fait que compter les déceptions.
En 2010, tout ce qui aurait pu être le début d’un progrès a été
constamment entravé par des courants hostiles qui n’ont cessé de
paralyser le pays et de neutraliser ce qui aurait pu favoriser
une évolution positive de la situation.
2010 a pourtant eu son lot de moments forts, comme les élections
municipales, le sommet syro-saoudo-libanais à Baabda, la visite
de l’émir du Qatar au Liban et en particulier au Sud, suivie de
celle du Président iranien Ahmadinajad au Liban et au Sud en
particulier, ainsi que celle du Premier ministre turc Erdogan au
Liban et au Akkar en particulier, les visites successives de
nombreux responsables libanais en France, dont les présidents
Sleiman, Berry et Hariri, ainsi que le général Michel Aoun et la
visite importante du Premier ministre Saad Hariri en Iran...
En 2010, le Liban a été ainsi une véritable plaque tournante,
recevant des visiteurs et envoyant des émissaires aux quatre
coins de la planète et dans les capitales dites de décision,
mais la division interne est restée la même et le clivage
politique s’est aggravé, tournant essentiellement autour d’un
thème: l’acte d’accusation du TSL qui depuis le début de l’année
avait été annoncé pour le courant de 2010 et n’a cessé d’être
reporté. Désormais, on l’attend pour 2011 et cette nouvelle
année risque de ressembler fort à celle qui la précédée, avec
toutefois des cartes plus claires et un jeu à découvert.
En effet, si l’on peut parler d’un aspect positif en 2010, c’est
bien celui d’avoir découvert les cartes cachées sous la volonté
de connaître la vérité sur l’assassinat du Premier ministre
Rafic Hariri et sous le TSL. Grâce à l’opposition, il est devenu
clair que l’acte d’accusation du TSL était une nouvelle phase du
plan visant la résistance. En impliquant quelques membres du
Hezbollah, il cherchait à provoquer une discorde interne entre
les Libanais, notamment entre les chiites et les sunnites, pour
ensuite paver la voie à une nouvelle agression israélienne
contre le Liban, qui serait cette fois de nature à briser
définitivement le Hezbollah et ceux qui l’appuient. Il a fallu
toute la campagne menée par le Hezbollah et ses alliés tout au
long de l’année écoulée, pour que ce plan devienne clair non
seulement aux yeux des Libanais, mais aussi à ceux de nombreux
Arabes.
A cause de l’acte d’accusation, devenu une épée de Damoclès
brandie au dessus de la tête des Libanais et plus
particulièrement de la résistance, les Libanais ont ainsi passé
une année 2010 sur la corde raide, au fil du rasoir, oscillant
constamment entre la division totale et les incidents sanglants
(comme ce fut le cas à Tripoli et à Borj Abi Haïdar) et les
tentatives de calmer le jeu et de revenir à un dialogue positif.
Entre-temps, la résistance, aidée par les institutions
officielles, comme les services de sécurité et le ministère des
Télécommunications a poursuivi sa campagne pour démonter le
réseau israélien au Liban, à travers les espions et les
infiltrations technologiques par le biais du secteur des
Télécommunications. De grandes découvertes ont ainsi été
réalisées après l’arrestation de Charbel Kazzi, haut
fonctionnaire de la compagnie de téléphonie mobile Alpha et bien
d’autres agents israéliens ont été arrêtés, permettant ainsi de
démonter les installations israéliennes pour contrôler ce
secteur.
En mettant ces données à la disposition de l’opinion publique,
le Hezbollah a ouvert la voie à l’examen d’une nouvelle piste
dans l’assassinat de Rafic Hariri, celle d’une éventuelle
implication israélienne. Il a ainsi montré la présence d’espions
israéliens sur les lieux du crime peu avant que celui-ci se
produise, ainsi que le survol de drones israéliens pour
surveiller les déplacements du Premier ministre assassiné.
En même temps, l’opposition mettait la pression sur le camp du
14 mars pour le transfert du dossier des faux témoins devant la
Cour de justice, estimant qu’en jugeant ceux-ci, on peut
parvenir aux véritables assassins, ceux qui ont voulu détourner
l’enquête vers une piste souhaitant visiblement couvrir les
criminels.
Mais à chaque fois que l’opposition marquait des points et
dévoilait un plan d’une logique implacable, étayé d’éléments de
preuves et de présomptions, le camp du 14 mars multipliait les
déclarations pour contester les nouvelles données et s’accrocher
au TSL et à « sa vérité ». L’année 2010 a eu le mérite de
montrer à quel point le camp du 14 mars n’L’année 2010 a eu le
mérite de montrer à quel point le camp du 14 mars n’a pas la
latitude de prendre la moindre initiative et il est presque
entièrement sous la coupe de la communauté internationale qui
dicte ses décisions. Les deux visites du chef des Forces
libanaises Samir Geagea en Egypte et en Arabie saoudite (où il
n’a toutefois pas été reçu par le roi Abdallah), ont conforté
cette impression. On se souvient aussi de la visite surprise et
éclair du secrétaire d’Etat américain adjoint Jeffrey Feltman à
Beyrouth un dimanche pour tenter de faire pression sur le
président de la République et sur le leader Walid Joumblatt.
Mais la grande nouveauté de 2010 a été le choix de Walid
Joumblatt de rallier clairement le camp de la résistance. Le
changement avait été amorcé en 2009, mais en 2010, il s’est
confirmé et il a modifié le paysage politique interne.
Aujourd’hui, la situation a le mérite d’être claire :
l’opposition refuse toute accusation portée contre le Hezbollah
ou certains de ses membres. Joumblatt s’est rallié à sa cause et
il ne reste plus au camp du 14 mars soit à suivre ce chemin et à
ressouder ainsi les rangs internes, soit à continuer à
s’accrocher à une justice internationale ouvertement
instrumentalisée par les Etats-Unis et Israël, transformant
ainsi le pays en scène de lutte entre les intérêts régionaux et
internationaux. C’est le grand défi de 2011.
Encore un mot sur 2010. Heureusement, le malheur continue à
unifier les Libanais, toutes tendances et confessions
confondues. Au début de l’année, le crash de l’avion d’Ethiopian
airlines qui a fait des victimes de toutes les régions et
communautés libanaises a été l’occasion d’un sursaut de
solidarité nationale. Alors que l’Etat, lui, a comme d’habitude,
montré les limites de son action…
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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