Silence complice
Gaza :
« Sortir le drapeau blanc ne suffira pas »
Silvia Cattori
Bande de Gaza - Janvier 2008
(IMEMC)
18
janvier 2008 Pourquoi, durant
ces longs mois où l’on voit la population de Gaza s’enfoncer
dans l’horreur, et ses malades et blessés mourir dans leur
sang, faute de médicaments, personne ne se mobilise-t-il vraiment
de manière à sauver ce qui peut encore l’être ? Pourquoi
nos pays n’appellent-ils pas à la raison le premier responsable
de cette catastrophe humanitaire sans précédent : l’Etat
d’Israël ?
Gaza est injustement et illégalement
emprisonnée par Israël, soumise aux tirs meurtriers de ses
missiles et réduite à la faim.
Dans quelle prison a-t-on jamais
vu les geôliers couper l’eau, couper l’électricité, priver
les prisonniers de nourriture, interdire à ceux qui souffrent de
blessures et de graves maladies, d’aller se faire soigner hors
de la prison ?
Nous sommes nombreux à être
saisis de vertige face à tant d’indifférence et de cruauté.
Et indignés de constater que nos gouvernements européens n’ont
aucune compassion à l’égard de ce peuple emprisonné, alors
qu’il est dans l’incapacité de se défendre.
Israël assassine chaque jour des
Palestiniens – résistants et simples habitants y compris femmes
et enfants - avec une extraordinaire sauvagerie.
Nos autorités sont parfaitement
informées par leurs représentants diplomatiques des exactions
commises par l’armée israélienne et de la gravité de la
situation ! Pourquoi demeurent-elles silencieuses alors que
de nombreuses personnalités se sont exprimées pour alerter
l’opinion. ? Ont-elles peur d’Israël ?
Plus le temps passe, plus la santé
de la population, enfermée dans ce ghetto qu’est devenu Gaza,
est menacée et, surtout, la vie de ses enfants –qui constituent
la moitié de la population- soumis à la malnutrition prolongée,
risque d’être compromise de façon irréversible.
L’étranglement économique de
Gaza a été décidé par les Etats-Unis et l’Union européenne,
sous la pression d’Israël, et avec l’assentiment de ces
Palestiniens corrompus que les alliés d’Israël qualifient de « modérés » :
Mahmoud Abbas et Salam Fayyad. Alors qu’ils sont les
collaborateurs indignes de l’occupant qui opprime si cruellement
leur peuple.
« Modérés »
ou « collaborateurs » ?
Nos chroniqueurs les appellent
complaisamment « modérés » parce
qu’ils travaillent la main dans la main avec Israël pour
liquider, non seulement les cadres du mouvement Hamas, mais également
tout Palestinien ordinaire qui refuse d’abandonner les principes
et les droits de son peuple.
Nous sommes là face à une
catastrophe humanitaire organisée ; une catastrophe décidée
dans les plus hautes instances.
La « communauté
internationale », à laquelle chacun de nous appartient,
doit répondre de « crime d’indifférence » face à
l’abandon de ce peuple menacé par les crimes de guerre
incessants de l’armée israélienne.
Cette catastrophe est rendue
possible et peut perdurer grâce à la complicité des médias qui
ne nous montrent pas l’étendue de l’oppression israélienne
à Gaza ; et, sur ce plan, la chaîne de télévision
publique de la Suisse romande, mon pays, apparaît encore plus
complice de ces punitions collectives abominables, que d’autres.
La situation est gravissime. Cela
ne date pas d’aujourd’hui. Mais la vie des gens, déjà
terrible, a été rendue encore plus terrible dès septembre 2007,
quand Israël a fermé toutes les entrées et sorties de Gaza,
interdisant les rares camions qui, jusqu’alors, pouvaient encore
transporter un peu de farine, de riz, et quelques médicaments.
Pourquoi n’entendons-nous jamais
les « French Doctors » et nos élus protester, obliger
Israël à desserrer l’étau qui étrangle et affame 1, 5
millions de personnes ?
Chaque jour qui passe aggrave une
situation déjà catastrophique.
Voici ce que nous disait déjà,
en novembre 2007, une mère palestinienne.
- Je ne sais pas
ou on va ! Les Israéliens nous affament, empêchent les
produits de nos paysans de sortir. Nous sommes enfermés. Tout est
très cher. La majorité des gens est sans travail et souffre du
manque d’argent. C’est le malheur. Il n’y a plus rien ;
certains produits ont disparu des rayons. Et maintenant les Israéliens
font entrer leurs fruits, légumes, produits laitiers qu’ils
nous vendent à des prix exorbitants.
Et
les pays arabes, ai-je demandé, ils n’arrivent pas à vous
aider ?
-Les pays arabes
collaborent avec Abou Mazen (Mahmoud Abbas) et Israël. Mazen ne
nous donne rien. Il ne donne qu’à ceux qui sont membres de son
parti. Il encourage Israël à nous maintenir enfermés pour nous
affamer. Il attend que nous soyons mis à genoux. Les Israéliens
ont annoncé qu’ils préparent une grande opération militaire
contre Gaza. Le pire viendra dans les jours prochains.
Quand
vous entendez Bush et Sarkozy mobiliser la communauté
internationale au sujet du Darfour que ressentez-vous ?
-J’éprouve une
immense douleur, surtout en pensant aux enfants et aux malades qui
meurent ici faute de soins suffisants. Quand j’ai entendu
Moussa, (le chef de la Ligue arabe ndt) dire qu’il va envoyer
250 000 dollars pour aider le Darfour, j’ai pleuré. Nous qui
sommes ses frères et sœurs, et alors que la situation ici est
vraiment affreuse, pourquoi nous ignore-t-il ? Ici, rien ne
rentre, rien ne sort. Les pauvres ne peuvent pas se nourrir
normalement. Tout est à plus du triple du prix normal et rares
sont les gens qui ont un salaire. L’UNWRA distribue des coupons
tous les deux mois. La portion du mois dernier n’a pas été
distribuée.
Le
mouvement Hamas ne vous aide-t-il pas ?
-Ils n’ont rien.
Je pense que, même si les autorités du Hamas se disaient
vaincues, même si elles sortaient le drapeau blanc et suppliaient
le monde de nous aider, même là, rien ne changerait : Israël
ne cessera jamais de nous martyriser.
Sortir le drapeau blanc ne suffira
pas. Les Israéliens vont encore et encore continuer d’exiger de
nous autre chose. Les gens du gouvernement Hamas sont privés de
toute aide. Ils ne peuvent rien faire, eux aussi sont victimes de
notre emprisonnement.
Même l’aide financière versée
par l’Iran en 2006 pour des raisons humanitaires [1]
et par d’autres pays, pour soulager nos souffrances, a été séquestrée
par l’Egypte à la demande d’Israël. Israël nous maintient
suspendus à une corde !
Il
suffirait que les grandes puissances exigent d’Israël de relâcher
la corde sur laquelle il tire pour que Gaza puisse respirer. Il
suffirait de couper cette corde !
[1]
L’Iran a versé en avril 2006 50 millions de dollars, suite à
la décision américano-européenne de suspendre toute aide au
autorités élues du Hamas
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