Opinion
Obama se plie en
quatre devant Netanyahu
Samer R.
Zoughaib
Samedi 23 mars 2013
«Barak Obama a admis sa défaite dans sa
tentative d’intimider, de manipuler ou
de faire pression sur Israël». Ces
propos ne sont pas ceux du Hezbollah
mais de Barry Rubin, une des principales
figures pro-israéliennes américaines,
qui a commenté sur sa page Facebook le
voyage présidentiel en des termes
moqueurs.
Et il n'est pas le seul. Janine Zacharia,
ancienne responsable du bureau du
Washington Post à al-Qods occupée
(Jérusalem), estime que «le voyage de
Barack Obama en Israël—à la fois son
timing et son scénario—n’a aucun sens».
Le célèbre Tom Friedman, du New York
Times, est encore plus dur. «J’ai du mal
à me souvenir d’un voyage de président
américain soulevant aussi peu
d’attentes. Obama pourrait être le
premier président à visiter Israël en
touriste», écrit-il.
Alors, quand le Hezbollah estime que
Barack Obama «s'est présenté en Israël
comme un simple fonctionnaire de
l'entité sioniste et non pas comme le
plus haut responsable d'un Etat
indépendant que sont les Etats-Unis», il
n'est pas très loin de ce que pensent
ses propres compatriotes ainsi que de
nombreux experts et journalistes
occidentaux. Car les motivations et les
objectifs de cette visite sont
incompréhensibles et ne justifient pas
le déplacement du président américain.
Surtout que le Premier ministre
israélien, Benyamin Netanyahu, n'a pas
manqué de l'humilier ce deux dernières
années, allant même jusqu'à soutenir son
rival Mitt Romney durant l'élection
présidentielle. C'est tout juste s'il ne
lui dictait pas ouvertement la politique
étrangère de Washington, en le pressant
d'attaquer l'Iran, c'est-à-dire de mener
une guerre pour le compte d'«Israël».
Logiquement, c'était au Premier ministre
israélien de déployer tous les efforts
pour se faire pardonner ses
indélicatesses, ses propos peu
diplomatiques, ainsi que son intrusion
dans la bataille de la présidentielle
américaine. Mais c'est finalement Barack
Obama qui fait le premier pas et prend
un vol de douze heures pour entreprendre
une visite sans objectifs clairs, sinon
celui de s'aligner sur les positions
israéliennes dans les principaux
dossiers régionaux: la Syrie, le
Hezbollah et l'Iran.
Aucune
initiative
«Obama veut que les Arabes acceptent
un Etat strictement juif dans la région
et entament une normalisation complète
avec lui alors qu'il n'a pas évoqué une
seule des demandes légitimes des
Palestiniens comme le retour des
réfugiés, le statut de la ville de
Jérusalem ou l'arrêt de la
colonisation». Le Hezbollah ne croyait
pas si bien dire dans le communiqué
qu'il a publié jeudi. En effet, le
président américain n'était porteur
d'aucune initiative ou idée pour faire
avancer le dossier des négociations
israélo-palestiniennes. «La Maison
Blanche a annoncé que le président ne
sortirait pas de son chapeau une
initiative susceptible de relancer les
négociations (...) parce
que les Israéliens eux-mêmes ont relégué
le dossier à l’arrière-plan», écrit
Philippe Boulet-Gercourt du Nouvel
Observateur.
Les Palestiniens lui ont d'ailleurs bien
rendu cette indifférence en manifestant
activement contre la visite, et les
roquettes tirées contre le sud des
territoires palestiniens occupés par
«Israël» à partir de la bande de Gaza
sont venues lui rappeler que la
résistance armée reste l'option
privilégiée de ce peuple.
Concernant le Hezbollah, Obama a affirmé
dans un discours que «chaque pays qui
reconnaît la valeur de la justice doit
désigner le Hezbollah pour ce qu'il est:
une organisation terroriste». Des propos
destinés «à plaire à l'entité ennemie»,
réplique le Hezbollah, Quoi qu'il en
soit, le président américain n'a pas
encore réussi à convaincre l'Union
européenne d'inscrire la Résistance sur
sa liste des organisations terroristes.
Le principal objectif de ce voyage est
de réparer la relation entre Obama et
Netanyahu. Il s'agit d'une visite de
«restauration», un voyage pour
«réorienter la relation» entre les deux
parties, explique Robert Danin, du
Council on Foreign Relations. Et pour
cela, Obama doit «parler directement au
peuple israélien» selon son
vice-conseiller à la sécurité nationale
Ben Rhodes. Il doit leur prouver «qu’il
ne préfère pas les Arabes», écrit Janine
Zacharia.
Le mea
culpa d'Obama
Nous sommes donc devant un président
américain qui reconnait son «erreur» et
semble prêt à tout pour se la faire
pardonner. Il veut «écouter les projets
du nouveau gouvernement israélien».
Ceux-ci sont connus: le ministre de la
Guerre Moshé Yaalon veut attaquer l’Iran
et le ministre du Logement Uri Ariel
veut implanter de nouvelles colonies.
Deux dossiers sur lesquels les deux
parties n'étaient pas sur la même
longueur d'onde. Mais Obama n'est pas
venu pour les dissuader de poursuivre
leur projet. Bien au contraire, mercredi
soir, il fera une nouvelle concession
sur le dossier du nucléaire iranien en
déclarant, en allusion aux menaces
israéliennes d'attaquer l'Iran: «Je ne
m’attends pas a ce que le Premier
ministre prenne une décision concernant
la sécurité de
son pays en s’en remettant à un autre
pays». Pour les experts, il s'agirait du
feu vert qu’«Israël» attendait:
Washington ne s’opposera pas à des
frappes sur les installations nucléaires
iraniennes.
Pas un mot sur la colonisation des
territoires palestiniens, qui se
poursuit malgré les remontrances
américaine de l'été denier. Mais les
temps ont changé et Obama aussi. Les
colonies continuent de s'étendre et dans
le nouveau gouvernement israélien, tous
les ministères stratégiques sont occupés
par des hommes favorables à la
colonisation.
Dernier cadeau d'Obama à Netanyahu avant
de s'en aller, il a convaincu la Turquie
de renouer ses relations avec l’entité
sioniste.
«Netanyahu sera considéré comme le
vainqueur de sa bataille avec Obama,
récompensé pour avoir défié un président
américain —ou s’y être fermement
opposé», estime Janine Zacharia. Elle ne
croit pas si bien dire.
Source: moqawama.org
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