Opinion
Hollande ouvre les
portes du levant à Al-Qaïda
Samer R.
Zoughaib
Samedi 16 mars 2013
En annonçant son
intention de fournir des armes aux
rebelles syriens, le président François
Hollande ouvre les portes du Levant à
Al-Qaïda, qui, après s'être implantée en
Syrie, commence à se structurer au
Liban.
La décision du chef de l'Etat français
ne fait pas l'unanimité en France et en
Europe, est dénoncée par la Russie et
critiquée par les Nations unies. Pour le
vice-président du Front national (FN),
Florian Philippot, il s'agit d'une
"folie". Pour sa part, le président
d'honneur du FN, Jean-Marie Le Pen, y
voit la main d'"Israël". L'UMP prône la
prudence, alors que la gauche française
garde un silence complice.
Les Français, eux, se sont surtout
exprimés sur la Toile, en commentant la
décision de leur président sur les sites
des journaux, les forums sociaux et les
blogs. La plupart des réactions son
défavorables, la jugeant
"incompréhensible", "irrationnelle",
voire "dangereuse". Les internautes
relèvent la politique des deux poids
deux mesures de Paris, qui prétend
combattre les extrémistes au Mali alors
qu'il les soutient en Syrie.
François Hollande a tenté de rassurer
les Français en leur annonçant qu'il
avait reçu des "assurances" que les
armes "arriveront entre de bonnes
mains". Des propos d'une frappante
naïveté, car personne n'est en mesure de
fournir de telles garanties, surtout que
le Front quaïdiste al-Nosra est le mieux
organisé et le plus structuré sur le
terrain, il évolue indépendamment de
l'"Armée syrienne libre" (ASL), et
contrôle de vastes régions dans l'Est et
le Nord de la Syrie. A Deir Ezzor et
Raqa, par exemple, cette organisation
extrémiste a instauré un Conseil chérié
pour gérer la vie quotidienne et créé
une "police des mœurs", au grand dam de
la population qui manifeste
régulièrement contre ses exactions,
comme cela s'est passé cette semaine
pendant quatre jours d'affilée à
Mayadine (Deir Ezzor) et se produit
souvent à Alep.
En Arabie saoudite, en fin de semaine
dernière, le secrétaire américain à la
Justice, Eric Holder, a déclaré
qu'Al-Qaïda contrôlait une grande partie
de l'"Armée syrienne libre". De son
côté, le coordinateur européen de la
lutte contre le terrorisme, Gilles de
Kerchove, a exprimé les inquiétudes de
l’UE concernant les "jihadistes
européens" qui combattent en Syrie et
pourraient "représenter une menace"
lorsqu’ils rentreront dans leur pays.
Al Qaïda
au Liban
En envoyant des armes aux rebelles
syriens, la France contribue donc d'une
manière certaine au renforcement des
capacités d'Al-Qaïda, qui n'a aucune
difficulté à s'emparer des arsenaux des
autres groupes armés, lorsque ceux-ci ne
les lui vendent pas directement.
D'ailleurs, le Front al-Nosra se sent
tellement à l'aise sur les plans des
effectifs et de l'armement qu'il a
commencé à envoyer depuis plusieurs mois
des cadres expérimentés au Liban pour y
monter une structure au Liban-Nord, dans
la Békaa et dans le camp palestinien d'Aïn
el-Heloué. La montée en puissance de la
mouvance takfiriste a fait l'objet de
nombreux rapports envoyés par des
diplomates occidentaux à leurs
capitales. L'une de ces notes
diplomatiques souligne que "l'influence
des groupes islamistes extrémistes a
nettement augmenté au Liban depuis le
début des incidents en Syrie et l'afflux
des réfugiés syriens". Le rapport
indique que les "takfiristes
s'infiltrent au
Liban dans le flot des réfugiés,
notamment au Liban-Nord, dans la Békaa,
dans certains quartiers de Beyrouth, à
Saïda et dans des villages de la région
de Arkoub, au Liban-Sud."
La revue américaine Frontpage Magazine
avait annoncé, début mars, que "des
centaines de membres d'Al-Qaïda affluent
au Liban, en provenance de Syrie, pour y
exporter la guerre et combattre le
Hezbollah". "Aux yeux des membres d'al-Nosra,
le Liban fait partie intégrante des
plans qu'il faut mettre en application
en Syrie", écrit la revue. "Al-Nosra
cherche en ce moment à obtenir une
fusion pure et nette de toutes les
milices syriennes et libanaises",
rapporte Frontpage Magazine avant
d'ajouter: "La milice libanaise Dargham
coopère très étroitement avec al-Nosra,
et c'est de cette coopération qu'est née
la branche libanaise de l'organisation".
Des sources de sécurité libanaises
révèlent que les affrontements qui ont
opposé en début de semaine des membres
du Fateh et un groupe extrémiste
salafiste à Aïn el-Heloué, à l'Est de
Saïda, sont directement liés aux
tentatives du Front al-Nosra de
s'implanter dans ce camp. Selon ces
sources, al-Nosra s'efforce d'unir sous
sa bannière des membres de Fateh
al-islam, Osbat al-Ansar, les Brigades
Abdallah Azzam, al-Haraka al-islamiya
al-Moujahida et Jund el-Cham. Fateh
el-islam et Jund al-Cham s'étaient
illustrés en combattant l’Armée
libanaise dans le quartier de Taamir, en
bordure de Aïn el-Heloué, en 2007, et à
Nahr el-Bared au Liban-Nord la même
année. Ce conflit avait fait 170 morts
dans les rangs de l'armée et des
centaines d'autres parmi les extrémistes
et les civils.
La tâche de créer al-Nosra-Liban serait
confiée, selon des sources bien
informées, à l'extrémiste saoudien Majed
Majed, plus connu sous le nom d’Abou
Qutada. Il serait en relation étroite
avec Abou Salim Taha, l'ancien
porte-parole de Fateh al-Islam
emprisonné à Roumié. Le bloc B de cette
prison, où sont détenus les islamistes,
aurait été transformé en véritable
émirat en contact permanent avec des
mouvances extrémistes à Saïda, Tripoli
et Ersal, dans la Békaa.
Source : moqawama.org
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