Soutenir la lutte des prisonniers
détenus dans les geôles sionistes
« Nés libres, nous
le resterons »
Rim al-Khatib
Mercredi 20
2013 Mars
2013 - N° 9
I - Abolir la
détention « administrative » La détention « administrative » est
un crime de l’occupation. Des
milliers de Palestiniens subissent
cette forme de torture morale et
physique, parce que les occupants
craignent la révolte populaire. Des
vies sont brisées parce que
l’occupant ne peut contrôler une
population héroïque qui ne cesse de
réclamer, depuis plus d’un siècle,
sa liberté. Abolir cette forme
d’arrestation arbitraire est devenu
une priorité pour le peuple
palestinien qui lutte pour sa
liberté et sa dignité. Le résistant Ayman Sharawneh a été
enfin libéré le 17 mars. Il a
accepté d’être éloigné vers la bande
de Gaza en contrepartie de sa
libération et de la suppresion de
son « dossier ». En grève de la faim
depuis le mois d’août dernier, il a
perdu 80% de sa capacité visuelle,
selon l’avocat du Club des
Prisonniers. Il se trouvait à
l’hôpital Soroka, dans la ville
occupée de Beer-Saba’ (Naqab),
lorsque des négociations entre le
Shabak et lui, via l’administration
pénitentiaire, a eu lieu. Le Shabak
a maintes fois essayé de faire
pression sur lui pour « revoir » et
non pas « supprimer » son dossier,
mais Ayman a tenu bon. La libération
de Ayman Sharawneh, bien qu’il soit
éloigné vers Gaza pour dix ans, est
une grande victoire pour les
prisonniers en lutte, et d’abord
pour Ayman Sharawneh. . Elle a
prouvé que les sionistes craignent
l’extension du mouvement et essaient
de négocier. Il y a quelques mois,
Ayman avait reçu l’assurance qu’il
serait libéré. Il avait arrêté la
grève de la faim, mais les autorités
de l’occupation ont violé leurs
promesses et l’ont maintenu en
prison, comptant le condamner à
achever la peine pour laquelle il
avait été condamnée avant sa
libération (28 ans), en octobre
2011, dans le cadre de l’accord
d’échange. Sheikh Khodr Adnane qui a
salué la libération de Ayman a
déclaré que le sourire de sa mère
est à elle seule une victoire contre
l’occupant, ajoutant que
l’éloignement vers Gaza sera levé,
tôt ou tard. C’est aussi l’avis de
Ayman Sharwaneh lui-même qui a
déclaré que son éloignement vers
Gaza est un crime, mais qu’il devait
l’accepter. Quelques heures après sa libération,
l’occupation a arrêté son frère
Jihad, dans la ville occupée
d’al-Khalil, par pure vengeance et
dépit d’avoir été obligée de libérer
Ayman. Samer Issawi poursuit la grève de la
faim, approchant des 240 jours. Il a
une nouvelle fois refusé d’être
éloigné vers Gaza, et a écrit une
longue lettre où il explique son
refus : « tout en reconnaissant que
la bande de Gaza fait partie de la
patrie et que ses habitants sont mon
peuple, j’affirme que j’irai à Gaza
quand bon me semble, car c’est une
partie de mon pays, et que j’ai le
droit de circuler dans mon pays
comme je l’entends, mais je refuse
d’y être éloigné (de force) car ceci
rappelle l’expulsion forcée des
Palestiniens en 1948 et 1967.
Aujourd’hui, nous luttons pour la
libération de la terre et le retour
des réfugiés et déportés… la manière
méthodique par laquelle Israël
déporte les Palestiniens de leur
terre pour mettre à leur place des
mercenaires est un crime en soi. Je
refuse la déportation, quel que soit
le lieu. L’occupant vise à vider la
ville d’al-Quds de sa population, la
déportation est devenue un principe
pour lui. Tout prisonnier ou autre
palestinien qui subit des pressions
est déporté pour vider la ville
d’al-Quds de sa population. Je préfère la mort à l’éloignement
de la ville d’al-Quds, elle est mon
âme et ma vie. Si j’en suis arraché,
c’est mon âme qu’on arrache, il n’y
a pas de vie après al-Quds et al-Aqsa.
Loin d’al-Quds, aucune terre n’est
assez grande pour me convenir. Je
retournerai uniquement dans al-Quds
et nulle part ailleurs… Il ne s’agit
pas d’une question personnelle, mais
d’une question nationale, d’une
conviction et du principe auquel est
attaché tout Palestinien qui aime sa
patrie…. » Deux martyrs sont tombés,
en défense de la dignité des
prisonniers et des Palestiniens :
Mahmoud El-Titi, étudiant, ancien
prisonnier libéré, fondateur du «
mouvement des Palestiniens pour la
dignité » en Cisjordanie. Du camp de
réfugiés d’al-Fawwar, près de la
ville d’al-Khalil, étudiant en
sciences des médias, il avait mis
son savoir au service des
prisonniers. Le mardi 12 mars, les
soldats de l’occupation ont tiré :
Mahmoud El-Titi est tombé. Quelques
jours auparavant, les forces
sécuritaires de l’AP de Ramallah
l’avaient convoqué. Il avait été
leur prisonnier il y a plusieurs
années, avant d’être détenu dans les
prisons de l’occupation. Le second martyr, Muayyed Ghazawneh,
35 ans, du bourg al-Ram, à l’entrée
de la ville d’al-Qods, qui fut
atteint d’une complication cardiaque
suite aux tirs de l’armée sioniste
contre les manifestants, devant la
prison de Ofer. Il est décédé le
vendredi 15 mars. De violentes
manifestations ont eu lieu lors de
ses funérailles à al-Quds, les
jeunes ayant décidé de lancer des
pierres sur les soldats au barrage
de Qalandia. Le résistant Younes al-Hroub, qui
mène la grève de la faim depuis plus
de 25 jours, réclamant sa libération
et l’abolition de la détention
administrative, a été emmené à
l’hôpital Soroka, à cause de la
détérioration de son état de santé.
Les trois prisonniers appartenant au
mouvement du Jihad islamique et qui
refusent leur détention «
administrative », Zakariya El-Hih,
Mohammad Najjar et Ibrahim Ibrahim ,
ont affirmé à l’avocat du Club des
Prisonniers que les autorités
carcérales exercent d’énormes
pressions sur eux pour les empêcher
de poursuivre, et qu’elles les ont
menacés de les alimenter par la
force. Zakaria al-Hih est passé de
l’état de détenu « administratif » à
prisonnier condamné, les autorités
de l’occupation ayant inventé un
motif pour le détenir. Des nouvelles
non encore vérifées font état de
l’arrêt de la grève de la faim de
Mohammad Najjar et Ibrahim Ibrahim. L’occupation a refusé l’appel
concernant la détention
administrative du député maqdisi
Ahmad Attoun, pour 6 mois. Le
jugement a été confirmé. Le député
Ahmad Attoun a d’abord été enlevé du
siège du CICR dans al-Quds, où il
protestait contre les menaces
d’expulsion à l’encontre de la
direction politique maqdisie.
Expulsé vers Ramallah, il été arrêté
et condamné à 6 mois de détention «
administrative ». Vendredi 15 mars, plusieurs
manifestations ont été organisées à
al-Khalil, en soutien aux
prisonniers en lutte, Ahmad Najjar
et Zakaria Hih. Elles furent
durement réprimées par les forces de
l’occupation. Thaer Halahla,
prisonnier libérée qui a mené la
grève de la faim, a critiqué les
forces sécuritaires de l’AP qui
empêchent toute riposte aux attaques
des sionistes et qui poursuivent les
résistants. L’occupant tiendra-t-il parole dans
les cas de Tareq Kaadan et Jaafar
Izzidine, qui ont mené la grève de
la faim puis arrêté, suite à la
promesse du juge de l’occupation que
leur détention « administrative » ne
serait pas renouvelée, après le 22
mai ? Bien que l’avocat avait
réclamé que la date soit revue afin
de réduire la durée de la détention,
le juge avait fixé le terme de trois
mois, non renouvelable. Mais aucune
séance du tribunal n’a encore
confirmé cette promesse, laissant
les deux résistants détenus dans une
situation imprécise. Deux fois de
suite, le tribunal a reporté ses
séances. 2 – Statistiques Suite au martyre de Arafat Jaradat
le 23 février, les autorités de
l’occupation ont arrêté 310
Palestiniens en Cisjordanie occupée,
al-Quds y compris. Dans la seule
ville d’al-Khalil, l’occupation a
arrêté 95 Palestiniens, de tous
âges, par crainte du déclenchement
d’une révolte généralisée contre
l’occupation. Dans la ville d’al-Quds,
82 personnes ont été arrêtées. Par
ailleurs, 70 enfants ont été
arrêtés, certains âgés à peine de 9
ans. Ils ont été soit relâchés après
le paiement d’une amende, soit mis
en détention à domicile. Le résistant maqdisi Mahmoud Nofal
Mohammad Daajneh (65 ans) entame sa
21ème année de prison. Il
est prisonnier depuis le 16 mars
1993, et a été condamné à la
perpétuité plus dix ans. Marié, père
de dix enfants, et grand-père de 50
petit-fils. Il est le plus âgé des
prisonniers maqdisis. 14 prisonniers palestiniens sont
atteints de cancer. Ils ne suivent
aucun traitement approprié. Les
organismes de défense des
prisonniers interpellent les
associations humanitaires dans le
monde de soulever la question des
prisonniers malades dans les geôles
sionistes. Parmi les cas les plus
graves, celui de Maysara Abu Hamdiyé,
qui risque la mort à tout instant,
et celui du résistant Mu’tassam
Radad, 27 ans. Les autorités
carcérales et les médecins sionistes
utilisent Maysara Abu Hamdiyé pour
leurs expériences médicales. Deux
fois de suite, des médicaments non
conformes lui ont été administrés.
Ce n’est pas la première fois que
des informations circulent sur
l’utilisation des prisonniers comme
cobayes pour les industries
pharmaceutiques de l’Etat colonial.
3 – Arrestations et condamnations L’occupation a lancé une campagne
d’arrestation des cadres politiques
de plusieurs mouvements (Fateh,
Jihad islamique, Hamas) et des
journalistes, par crainte de
l’extension de la révolte du peuple
palestinien en Cisjordanie, y
compris al-Quds. Plusieurs
prisonniers libérés ont également
été arrêté, dont Issa Awad, Mohammad
Harb, Mahmoud Hamdi Shabaneh
(Hamas). Nawal Saadi, du camp de Jénine, dont
le mari Bassam Saadi a été libéré il
y a plus d’un mois, est toujours en
arrestation, l’occupant reportant
sans cesse la séance du tribunal qui
devrait confirmer ou annuler sa
détention.
4 – Portrait d’un détenu «
administratif » Le prisonnier libéré Mazen Jamal
Natché (41 ans) est de la ville
d’al-Khalil. Il vient d’être libéré
après 127 mois de détention «
administrative (soit plus de dix
ans), et dont il fut le doyen. Il a
été interviewé par le centre Ahrar.
Il dit avoir été arrêté pour la
première fois en 1991 alors qu’il
était encore lycéen. Il fut
prisonnier pour un mois. Ensuite, il
fut arrêté le 18 octobre 1994, et
condamné à 8 mois de prison. En
1997, il fut arrêté et mis en
détention « administrative » pour 9
mois. Et depuis 2004, il n’est pas
resté hors de prison plus d’une
année entière. Le 29 mars 2004, après le martyre de sheikh Ahmad Yassine, il fut à
nouveau arrêté pour 9 mois, puis en
2005, pour 44 mois, sans qu’aucune
charge contre lui n’ait été
prononcée, mais seulement un rapport
secret des services de
renseignements qui le juge «
dangereux ». Puis la dernière
arrestation fut le 10/7/2009, où il
fut détenu pendant 41 mois, toujours
sans charge. Il a été transféré dans
la plupart des prisons sionistes. Il
considère que toutes ces années de
détention ont brisé son parcours de
vie, sans qu’il y ait une raison
valable à cela. Il fut éloigné de sa
famille et de ses enfants, et il n’a
pas pu poursuivre ses études. La dernière fois où il a été arrêté,
il rédigait un mémoire de maîtrise à
l’université Abu-Dis d’al-Quds, et
son arrestation a mis fin à
l’obtention de son diplôme. De plus,
sa vie familiale a été très
perturbée, puisqu’il n’a pas été aux
côtés de ses trois enfants pendant
toutes ces années. A cause de la torture subie et des
mauvais traitements infligés par les
autorités carcérales, il souffre à
présent de plusieurs maladies, et il
est obligé de prendre divers remèdes
et suivre des traitements constants.
Il dit que le transfert d’une prison
à l’autre au moyen de ce que les
prisonniers appelent « bosta » est
une des choses les plus pénibles que
les prisonniers subissent, car il
s’agit d’une « machine de torture »
qui étouffe les prisonniers lors des
transferts, et notamment les
prisonniers « administratifs » qui
sont en transfert constant.
5 – Solidarité Plusieurs manifestations et
rassemblement se déroulent
quotidiennement en Palestine occupée
et dans le monde, pour soutenir la
lutte des prisonniers palestiniens.
Cependant, dans les pays arabes, le
soutien reste épisodique. Les prisonniers ont déclenché le 19
mars une grève de la faim pour
réclamer la fin de l’isolement de Darrar al-Sissi. Les autorités
carcérales onr riposté en menaçant
de supprimer les visites familiales
à cause de ce mouvement. Elles ont
déjà supprimé les visites familiales
pendant trois semaines, à cause des
« fêtes juives ». Le député palestinien Mohammad
Baraké, qui siège à la Knesset
sioniste, a évoqué l’arrestation,
puis la grève de la faim de Samer
Issawi, devant la Knesset, appelant
à sa libération immédiate. Il a
dénoncé les motifs fallacieux de son
arrestation et s’est adressé au «
brin de conscience » des députés
pour le faire libérer. Des dizaines de Palestiniens ont
manifesté devant le consulat
américain dans al-Quds réclamant la
libération de Samer Issawi, le 19
mars. C’est tous les jours que les
maqdisis se mobilisent, en présence
de Shirine Issawi, qui a déclaré que
les Palestiniens se mobilisent pour
la libération de tous les
prisonniers, et notamment de ceux
qui luttent en menant la grève de la
faim.
L’ambassadeur palestinien auprès des
Nations-Unies, Riad Mansour, a
réclamé l’intérêt de cet organisme
international pour la question des
prisonniers palestiniens détenus
dans les prisons sionistes et
notamment pour le résistant Samer Issawi, en grève de la faim depuis
plus de 230 jours. L’Union européenne a décidé
d’envoyer une « commission d’enquête
» sur le martyre du prisonnier
Arafat Jaradat dans les prisons de
l’occupation. Issa Qaraqe’ ministre
palestinien pour les affaires des
prisonniers et libérés, a salué ce
geste, disant qu’il s’agit d’une «
victoire de la justice humaine et
des droits de l’homme ». Ce ministre
a dû sans doute oublier le sort des
précédentes commissions d’enquête à
propos du massacre de Jénine, ou de
la guerre criminelle contre Gaza en
2008-2009. L’Autorité Palestinienne de Ramallah
a arrêté le journaliste Tareq
Sarkaji, à Nablus, le 11 mars.
Depuis son retour de Jordanie en
novembre 2012, les services
sécuritaires de l’AP l’ont maintes
fois convoqué avant son arrestation.
Elle poursuit l’arrestation des
prisonniers libérés, par ordre et en
collaboration avec l’occupation,
craignant elle aussi l’extension du
mouvement de révolte dans les
territoires occupés.
Janvier 2013 - N° 1
Janvier 2013 - N° 2
Janvier 2013 - N° 3
Janvier 2013 - N°
4
Janvier 2013 - N°
5
Janvier 2013 - N°
6
Janvier 2013 - N°
7
Janvier 2013 - N°
8
Le sommaire de Rim al-Khatib
Le dossier des prisonniers palestiniens
Les dernières mises à jour
|