Tunisie
Les trois
mensonges de Hamadi Jebali
Ridha Kéfi
Jeudi 26 avril 2012
«Les journalistes devraient se
réconcilier avec la révolution», a
déclaré Hamadi Jebali, qui présentait le
programme de son gouvernement ce matin à
l’Assemblée constituante. Un triple
mensonge qui déshonore son auteur…
Par
Ridha Kéfi
Cette petite phrase est une nouvelle
(grosse) pierre jetée dans la mare des
relations déjà largement conflictuelles
entre le gouvernement conduit par le
parti islamiste Ennahdha et les
journalistes, en tout cas la majorité
d’entre eux qui refusent de se
prosterner aux pieds du nouveau régime
et de lui servir la soupe.
Le triple
mensonge de Jebali
Le chef du gouvernement, si on a bien
compris la véritable teneur de ses mots,
dit à peu près ceci: «Les journalistes
sont opposés à la révolution», cette
révolution dont lui et son parti
estiment être aujourd’hui l’incarnation.
Et c’est là, comme on le montrera
ci-dessous, un triple mensonge.
D’abord, parce qu’un grand nombre de
journalistes tunisiens ont souffert le
martyre sous l’ancien régime et ont
contribué largement à sa chute. Cette
phrase est une insulte à leur courage et
un déni des sacrifices qu’ils ont
consentis.
Ensuite, parce que le parti Ennahdha
et les islamistes en général, bien
qu’ils aient été réprimés par l’ancien
régime, emprisonnés ou exilés, n’ont eu
aucun rôle dans la révolution proprement
dite. Il suffit de revoir les photos et
les vidéos immortalisant les événements
du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2011,
pour se rendre compte de leur… absence.
Ils n’étaient nulle part, ni à Sidi
Bouzid, ni à Kasserine, ni à Menzel
Bouzaiane, ni à Thala, ni à Sfax, ni à
Tunis. Ils ont récupéré la mise
plusieurs mois après en utilisant les
moyens de la démagogie religieuse, des
promesses fallacieuses et, disent
certains, de l’argent.
Le big deal:
impunité contre allégeance
Trois: c’est le gouvernement dominé
par Ennahdha qui est en train de trahir
la révolution. N’est-il pas en train de
passer un deal avec les symboles de
l’ancien régime dans les secteurs les
plus pourris (police, médias,
administration, magistrature, etc.) en
vertu duquel ils bénéficieraient de
l’impunité contre leur allégeance envers
Ennahdha.
Est-ce un hasard que Hamadi Jebali et
ses hommes : 1- s’allient, aujourd’hui,
à certains anciens propagandistes de Ben
Ali; 2- refusent de divulguer les noms
des journalistes ripoux qui faisaient
des rapports réguliers sur leurs
confrères à la police politique et
émargeaient sur la tristement célèbre
Agence tunisienne de communication
extérieure (Atce) et 3- tournent le dos
aux journalistes patriotes qui ont lutté
contre l’ancien régime et appellent
aujourd’hui à un vrai assainissement du
secteur?
Non, bien sûr. «Le fil du mensonge
est court», comme dit un proverbe arabe,
et les manœuvres du gouvernement et du
parti Ennahdha pour mettre sous leur
coupe les journalistes ne tarderont pas
à faire pschitt, à commencer par la
pseudo-consultation nationale sur le
cadre légal du secteur de l’information,
programmée vendredi et samedi, au siège
de l’ex-Chambre des Conseillers, au
Bardo, qui ne servira à rien, parce
qu’elle ne sera qu’un nouvel écran de
fumée, un leurre, une manœuvre sans
lendemain…
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Publié le 27 avril 2012 avec l'aimable
autorisation de Kapitalis
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