Samedi 10 octobre 2009
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Ce que je pense de l’attribution
du Prix Nobel à Obama ? C’est très simple : tout tourne autour
de la question Israël/ Palestine, et c’est une très bonne chose.
Il s’agit d’un effort, de la part des Scandinaves, pour donner à
Obama suffisamment de capital politique afin qu’il soit en
mesure d’exercer des pressions sur Israël.
Est-ce prématuré ? On s’en tape :
les membres du jury du Nobel sont des gens qui tentent d’exercer
une influence sur l’Histoire ; j’espère qu’ils y réussiront.
Obama adhère, en secret, à ce que Walt & Mearsheimer, Brezinzki
et Carter disent ; mais il n’est pas politiquement en mesure de
le dire ouvertement, car le lobby sioniste l’a enchaîné au
radiateur.
La résonance politique de
l’attribution de ce prix sur un événement lié à Israël/Palestine
est apparue dans deux réponses aux médias, hier. Tout d’abord,
Andrea Mitchell (juive, épouse d’Alan Greenspan, qui avait
déclaré que la guerre en Irak était entièrement une affaire de
pétrole, ce qui est, à dire le moins, fallacieux) a déclaré, au
cours du bulletin de la nuit (Nightly News) de la chaîne
télévisée NBC, que « bôf, le Nobel a déjà été attribué à des
personnalités controversées, par le passé, dont Jimmy Carter »…
C’est là une déclaration
absolument scandaleuse et diffamatoire. Cela m’amène à me
demander si cette Mitchell ne serait pas, par hasard, une
crypto-sioniste (ouais, bon, je sais : je me pose cette question
sur à peu-près tout le monde…) Jimmy Carter a reçu le Nobel, en
2002, en partie en raison de la plus grande réalisation
américaine en matière de négociations de paix au Moyen-Orient, à
savoir l’accord de Camp David, conclu en 1978. Certes, cet
accord a passé les Palestiniens par pertes et profits et Carter
allait prendre conscience de ce problème, lors d’initiatives
ultérieures. Néanmoins, il s’était agi d’une percée dans la
situation internationale. Dire de Jimmy Carter qu’il était une
« personnalité controversée » ne fait que refléter la boule de
fumier que lance la rage du lobby sioniste sur Carter en raison
de son récent ouvrage soutenant les droits humains des
Palestiniens.
Quant à la seconde déclaration,
c’est celle de David Brooks, au cours de l’émission
All Things Considered
[En fin de compte], sur NPR. Je pense que David Brooks est un
merveilleux éditorialiste. Il est intelligent, accorte et
réfléchi. Il n’en dissimule pas moins la force de ses
accointances juives. Je ne l’avais encore jamais entendu aussi
en colère qu’à cette occasion : il s’est foutu de la tronche d’Obama,
disant qu’il aurait dû rafler les cinq Prix Nobel, c’est-à-dire
tous, cette année, et que ce prix était une « mascarade ».
Suivirent des mots pour dire que tout le monde se fout de ce que
« cinq types, en Norvège », font ou disent au sujet de notre
politique étrangère. Le recours au langage du café du commerce
(« cinq types, en Norvège »), de la part de cet éditorialiste au
style habituellement châtié, était stupéfiant.
Brooks a répété que le prix aurait
dû échoir aux dissidents iraniens. Des dissidents iraniens qui
ont encore bien moins d’acquis à leur curriculum qu’Obama (mais
incontestablement plus de courage, pour beaucoup d’entre eux).
Pourquoi Brooks insiste-t-il
tellement à réinjecter l’Iran dans cette histoire, avec une
telle insistance ? Parce qu’il sait que ce dont il est question,
avec l’attribution du Nobel à Obama, c’est de pressions sur
Israël. Il veut que nous focalisions notre regard sur le
véritable « ennemi » : l’Iran…
Il s’agit, en l’occurrence, du
combat primal dans notre monde politique – un combat primal dont
les médias ne parlent jamais. La course entre McCain et Obama ne
tournait pas autour d’autre chose : l’enjeu était bel et bien si
nous, les Américains, nous allions, ou non, exercer une
pression, quelle qu’en fût l’intensité, sur Israël.
Brooks est totalement « gaga »,
comme il l’a reconnu sans surprise voici de cela quelques mois,
pour Israël, un pays où il s’est rendu plusieurs dizaines de
fois. C’est là, tristement, l’essence de l’engagement
néoconservateur dans notre politique : l’intérêt et les petits
soins pour Israël. Et c’est ça, plus que n’importe quoi d’autre,
que le comité Nobel a officialisé en l’identifiant : Obama a été
candidat en tant qu’anti-guerre, ayant adopté une position
anti-intervention en Irak en 2002 et ayant battu deux candidats
démocrates pro-guerre, soutenus tous deux par les néocons et
leurs cousins, les faucons libéraux.
Ce fut une véritable révolution
dans le monde politique américain, et ce fut la fin des néocons.
Mais cela met du temps à être
intégré par l’opinion, ici, aux Etats-Unis, c’est vrai, parce
que l’Establishment est encore aux mains de gens tels que David
Brooks et Andrea Mitchell.
Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier