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Opinion
Le censuré Mukuna répond à tous ses
censeurs
(article refusé par la «Libre Belgique»)
Jeudi 6 mai 2010
Faut-il encore s’étonner de voir La Libre Belgique
accueillir les diatribes et pressions de Claude
Demelenne visant à censurer la projection de mon film «
Est-il permis de débattre avec Dieudonné ? » ? Faut-il
s’étonner que cet activiste et son réseau pro-israélien
obtiennent des autorités de l’ULB le « report » sine die
de cette projection, initialement prévue ce 27 avril ?
Malheureusement, non. Ces phénomènes rétrogrades
participent de notre époque qui érige l’amalgame pour
seul raisonnement, l’anathème pour seule réflexion
politique et porte au pinacle un pseudo-journalisme,
incapable de la moindre vérification comme du minimum
d’honnêteté intellectuelle.
Dans son article non signé du 26 avril, La Libre a estimé que
l’annonce de la projection de mon film faisait «polémique».
Soit. Mais pour quelle raison ce quotidien n’a-t-il pas jugé
déontologique d’interroger tous les acteurs de ladite polémique
? Pourquoi l’auteur de l’article reprend-t-il uniquement le
communiqué de presse de Demelenne sans interroger les
organisateurs du Cercle du Libre Examen (Librex) ou moi-même ?
Pourquoi, le lendemain, ce journal relaye-t-il la prose
diffamatoire à mon encontre de la députée régionale Viviane
Teitelbaum (MR) sans juger utile de recueillir ma version ?
Enfin, qui, à La Libre, est en mesure de décrire le contenu du
film et d’en produire une critique sérieuse ?
Autant de questions dérisoires aux yeux de celles et ceux qui
s’accommodent ou encouragent les inégalités de traitement, le «
deux poids deux mesures » et le terrorisme intellectuel. Dans
mon film, parmi d’autres thèmes, l’humoriste Dieudonné débat de
ces questions avec les écrivains Jean Bofane et Antoine
Tshitungu, le chercheur en Economie de la discrimination,
Souhail Chichah (ULB), le cinéaste Jan Bucquoy, l’ex-journaliste
de la RTBF, José Dessart et le linguiste, Dan Van Raemdonck
(ULB). Soucieux de la liberté d’expression et du débat
contradictoire, ces véritables démocrates ont eu le courage et
la cohérence d’accepter mon invitation à débattre avec
Dieudonné. Hors diabolisation et pressions politico-médiatiques,
ceux-ci ont échangé accords, désaccords, critiques et analyses.
Une diversité de points de vue qui fait la richesse et l’intérêt
du film. Cela fait-il de ces six personnalités des « racistes »
comme le sous-entend Claude Demelenne ?
Légitimé par les médias dans son rôle de nouvel inquisiteur, le
pseudo-journaliste ose qualifier mon film de « propagande » en
faveur de Dieudonné. C’est décidément l’hôpital qui se fout de
la charité ! Appelant à réagir politiquement comme un «Sarkozy
de gauche»(1), hier hagiographe d’Elio Di Rupo et du PS (2),
aujourd’hui griot du MR (3) et co-auteur d’un livre avec le
sénateur Alain Destexhe (MR) (4), invité sur les plateaux télés
pour marteler ses stigmatisations islamophobes et anti-arabes,
Claude Demelenne en connaît un rayon niveau propagande.
Ce 27 avril, il diffusait in extenso à sa mailing-list les
amalgames insultants de Viviane Teitelbaum (MR). Celle-ci
faisant preuve d’une capacité surréaliste dans la confusion : «
On offre une tribune à quelqu’un qui au fond est l’équivalent de
l’attaché de presse de Jean-Marie Le Pen ou de Filip Dewinter.
Mukuna, c’est la voix de Dieudonné » (5) ... En introduction de
son courriel propagandiste, Demelenne, lui, écrivait ces mots :
« Depuis le début de cette affaire, le consensus de tous les
démocrates pour établir un cordon sanitaire autour de Dieudonné
et de ses partisans est réconfortant. Des personnalités venant
d'horizons divers ont oeuvré efficacement pour empêcher la
banalisation de l’idéologie de Dieudonné ».
N’ayant aucune leçon de démocratie et d’antiracisme à recevoir
de la part d’un censeur et d’une députée bruxelloise qui
supportent le colonialisme et la violation du droit
international, je tiens à rappeler certaines choses concernant
mon travail. En 2004, j’ai signé un livre d’entretiens avec
l’humoriste engagé ; en 2006, un essai sur le traitement
médiatique franco-belge de « l’affaire Dieudonné » et en 2009,
filmé un débat contradictoire entre Dieudonné et six
intellectuels et culturels belges. Des productions indépendantes
dont l’angle d’attaque comme le fil rouge sont frappés du sceau
de la déontologie journalistique. Raison principale pour
laquelle Claude Demelenne et ses soutiens politiques n’en disent
mot, tentent de me faire passer pour un «fanatique» de Dieudonné
et sont parvenus, aujourd’hui, à me censurer.
Au sein de la sphère politico-médiatique francophone,
existe-t-il encore des personnes capables de juger sur pièce ce
travail, faire la part des choses et exprimer publiquement leur
opinion ? Devrais-je m’excuser d’avoir fait mon métier en
profondeur au sujet d’un artiste engagé qui défraye la chronique
depuis sept ans ? Devrais-je me sentir coupable si la plupart de
mes confrères des médias traditionnels ne veulent ou ne peuvent
recenser et critiquer honnêtement ce travail ?
A cet égard, je m’interroge : pour quelle raison Robert Ménard
et Philippe Gavi n’essuient-ils pas le courroux haineux de
Claude Demelenne ? L’ex-président de Reporters sans frontières
et l’un des fondateurs du quotidien Libération ont signé un
livre d’entretiens avec Dieudonné et Bruno Gaccio (6). Ouvrage
sorti début mars qui bénéficie d’une certaine promotion
médiatique (RMC, BFMTV, France 3, France 4, France 5). Mais pour
Ménard et Gavi, Demelenne range rapidement son stylo et ne
dénonce pas « ceux qui banalisent l’antisémitisme et l’idéologie
nauséabonde de Dieudonné ». Serait-il moins risqué d’insulter un
journaliste belge d’origine congolaise que mes deux confrères
français bénéficiant de réseaux médiatiques ?
Régulièrement injurié et diffamé par Claude Demelenne, j’ai
confié à mon avocat le dépôt d’une plainte en justice. Si je
respecte et défends sa liberté d’expression, je ne peux tolérer
plus longtemps ses tentatives obsessionnelles visant à salir ma
réputation ...
A l’esprit me revient le rapport 2009 de la Ligue des droits de
l’homme qui constatait une nette régression de la liberté
d’expression en Belgique. Condamnant, notamment, la volonté de
la commune de Saint-Josse d’interdire le spectacle de Dieudonné,
la Ligue concluait : « Il nous revient de rester attentif à
préserver l’espace nécessaire à la liberté d’expression ». Un
espace dont les journalistes se doivent d’être les premiers
défenseurs et non les collaborateurs actifs ou passifs de sa
destruction.
Olivier Mukuna
Journaliste indépendant
(1) Le Soir, 29 aout 2009 ;
http://archives.lesoir.be/faut-il-avoir-peur-du-voile-islamique-_t-20090829-00PNFT.html
(2) Le Monde, 15 septembre 2005 ;
http://nouveaups92.canalblog.com/archives/2005/09/06/811044.html
(3) La Libre, 28 janvier 2010
http://www.lalibre.be/debats/opinions/article/558688/propos-iconoclastes-sur-le-mr.html
(4) « Lettre aux progressistes qui flirtent avec l'islam réac »,
Claude Demelenne et Alain Destexhe, Editions du Cerisier, 2009.
(5) La Libre, 27 avril 2010 (uniquement en version papier) ;
http://www.vitelu.be/?p=617
(6) « Bruno Gaccio / Dieudonné - Peut-on tout dire ? »,
entretiens réalisés par Philippe Gavi et Robert Ménard, Editions
Mordicus, 2010.
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