Opinion
Attentats en
Turquie :
la vengeance ou une guerre de
provocation
Nikita
Sorokine
Photo: EPA
Mercredi 15 mai
2013 Les versions des buts et des
commanditaires de l'attentat en
Turquie ne sont point variées.
Tandis que les conséquences des
explosions à Reyhanli peuvent
représenter une menace à l'ensemble
du continent.
Les explosions dans
la ville turque située à la
frontière avec la Syrie ont été
organisées le 11 mai sur l'ordre de
Damas et ont visé les réfugiés
syriens. Telle est la version
énoncée par le chef du gouvernement
turc, Recep Tayyip Erdogan. Damas
trouve, au contraire, que les
attentats ont été menés par des
services secrets turcs en vue de
provoquer, en fin de compte,
l'invasion du territoire de Syrie
par l'armée de Turquie.
Le premier ministre
Erdogan a déclaré que son pays ne
cédera pas à la provocation, tandis
que le vice-premier ministre syrien
Qadri Jamil a mis en doute, en
public, le fait que la Turquie était
prête à une grande guerre : « Je ne
pense pas que la Turquie est en
mesure de mener une guerre, ils sont
en proie à une guerre intérieure
depuis 30 ans ».
L'expert de
l'Institut d'orientalisme appliqué
et d'africanisme Saïd Gafourov
estime qu'au premier chef il
faudrait analyser la version la plus
véridique de ces attentats :
Il
paraît qu'il s'agit des problèmes
turcs internes. Plus encore, des
conflits intercommunautaires turcs:
aussi bien interethniques
qu'interconfessionnels. Surtout si
l'on tient compte du fait qu'à
Alexandrette, à la frontière
turco-syrienne, la moitié de la
population sont des Arabes, il y a
aussi beaucoup de Kurdes et des
Turkmènes. Il y est des problèmes
entre les tribus, mais aussi entre
les alaouites et le gouvernement
sunnite. Erdogan qui parlait au
début de son droit à toute réaction,
ayant en vue la Syrie, a
cardinalement changé ses propos
depuis. Il est tout à fait évident
que les services secrets l'ont
informé que les Syriens n'y étaient
pour rien. Je crains que des
attentats puissent suivre en
représailles. Alors la situation en
Turquie pourra être aussi
déstabilisée qu'en Irak et au
Pakistan.
Pour ce qui est du
prétexte à l'invasion de la Syrie
par les troupes turques, Ankara n'en
a pas besoin, estime Saïd Gafourov.
Les Turcs ne se hasarderont pas à
déclencher une guerre sans avoir le
soutien inconditionnel de l'OTAN. Ce
soutien leur est nécessaire étant
donné la situation
militaro-politique tendue à
l'intérieur du pays. Pourtant le
secrétaire général de l'Alliance
atlantique, Anders Fogh Rasmussen, a
dit que l'OTAN n'entreprendrait
aucune action contre la Syrie sans
avoir les sanctions du Conseil de
sécurité de l'ONU. Les militaires
turcs sont suffisamment sérieux et
raisonnables pour ne pas admettre
l'ingérence en Syrie d'une armée qui
peut recevoir une insurrection dans
ses arrières.
Entre-temps la
Turquie et ses services secrets
continuent de participer activement
à la guerre civile syrienne du côté
de l'opposition. C'est là la cause
authentique des explosions dans la
ville turque de Reyhanli, est
convaincu l'expert militaire Viktor
Baranets :
Les attentats d'une telle ampleur et
même plus puissants sur le
territoire de Turquie s'imposaient
depuis longtemps. Cela concerne dans
la même mesure le territoire de tout
autre pays appuyant l'opposition
syrienne par les armes, les
finances, la force vive, voire même
par le soutien médiatique. A mon
avis, pour la Syrie c'est l'unique
moyen de montrer à la Turquie qu'il
ne faut pas s'ingérer dans les
affaires intérieures de Syrie. Je
pense que c'est un acte de vengeance
à la Turquie pour son attitude
malveillante envers la situation
chez son voisin.
Viktor Baranets
rappelle que l'Iran nucléaire est un
des partisans les plus fervents du
régime syrien en place. Les Iraniens
comprennent parfaitement que si
l'OTAN foule aux pieds la Syrie,
elle fera la même chose avec l'Iran.
Etant donné la puissance militaire
de l'alliance, la République
islamique n'aura une autre issue que
de recourir, à un moment décisif, à
des frappes nucléaires. Cela
provoquera, sans aucun doute, des
tirs nucléaires de la part d'Israël
et les développements ultérieurs
peuvent être imprévisibles. Une
guerre régionale pourra prendre les
dimensions continentales.
Il ne s'agit,
heureusement, que des versions et
des conjectures. Mais il importe de
noter que ce sont des éléments d'une
grande guerre médiatique dans
laquelle les virages les plus
inattendus sont possibles.
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