RIA Novosti
Dans l'attente de Barack Obama
Nikita Petrov
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Mercredi 24 décembre 2008 Plusieurs hautes personnalités
américaines se sont rendues dans la capitale russe dans la
deuxième quinzaine de décembre : entre autres, l'ancien
Secrétaire d'Etat américain Henry Kissinger qui a été reçu par
le président russe Dmitri Medvedev dans sa résidence, une
délégation de la chambre des représentants conduite par Ellen
Tauscher, Richard Lugar, influent membre républicain du Comité
des affaires internationales du Sénat américain. Ce dernier a
mené des négociations avec des personnalités compétentes russes
sur le contrôle des armements et la non-prolifération des armes
nucléaires.
Toutes les visites ont été très importantes. Henry Kissinger,
Ellen Tauscher et surtout Richard Lugar ont joué un rôle de
scouts. Ils ont préparé l'ordre du jour de la future rencontre
entre Dmitri Medvedev et Barack Obama et cherché les points
communs qui permettraient de porter la coopération
russo-américaine à un niveau nouveau et, par la même occasion,
d'essayer d'éviter des contradictions et des conflits qui se
répercuteraient immanquablement sur ces rapports, sans devenir
prédominants.
Richard Lugar est connu en Russie comme l'un des spécialistes
américains les plus compétents dans le domaine du contrôle des
armements. A son initiative et avec le soutien du membre du
congrès Sam Nunn, le programme "Nunn-Lugar Cooperative Threat
Reduction Program" fut créé au milieu des années 90 du siècle
dernier. Selon ce programme, le Pentagone alloua des sommes en
vue d'aider les militaires russes à liquider les systèmes et les
armes de destruction massive, notamment les sous-marins
atomiques retirés du service ; pour le stockage inoffensif des
réacteurs nucléaires ; le retraitement des déchets nucléaires
solides ; la reconversion des missiles stratégiques non
opérationnels et la décontamination de leur combustible ; pour
l'élimination des stocks d'armes chimiques.
Ce programme resta en vigueur de 1995 à 1999 et fut prorogé
jusqu'à 2006. En fait, il fut très utile. Par exemple, les
systèmes de stockage inoffensif d'armes nucléaires et de
combustible nucléaire des sous-marins avaient été
considérablement renforcés grâce à l'argent des contribuables
américains : au moins 500 millions de dollars. Les sommes
arrivées d'outre-océan contribuèrent beaucoup à la reconversion
des sous-marins atomiques et des armes chimiques, ainsi qu'à
d'autres processus de désarmement. En 2005, le sénateur Richard
Lugar amena en Russie le sénateur Barack Obama, alors peu connu
en Russie, et lui fit connaître le processus de reconversion des
missiles à combustible solide organisé à Perm aux frais
américains. A propos, un incident désagréable eut lieu. Les
services secrets locaux retardèrent le départ de leur avion de
cette ville, en accusant les sénateurs, ou peu s'en faut,
d'avoir violé les frontières du pays et d'espionnage. Mais
l'incident fut clos.
Bien que le sénateur Richard Lugar soit, depuis de nombreuses
années, un membre très actif du parti républicain des
Etats-Unis, il avait aidé toujours son jeune collègue Barack
Obama par ses conseils. Les spécialistes estiment que les
connaissances et l'expérience de Richard Lugar seront
certainement mises à profit par la nouvelle administration.
Les experts qui se sont réunis au Centre Carnegie de Moscou
ont écouté avec un vif intérêt les commentaires du sénateur sur
l'attitude du président américain nouvellement élu à l'égard de
la Russie et sur la possibilité d'une percée dans le domaine du
contrôle des armements stratégiques sous la présidence de Barack
Obama. D'autant que le Traité sur la réduction des armements
stratégiques offensifs (Start-1) expire le 5 décembre de l'année
prochaine et toutes les négociations bilatérales sur son
remplacement par un autre accord, plus simple et efficace, se
sont avérées infructueuses.
"Que faut-il attendre d'Obama? Un accord sur le Start-1,
serait-t-il conclu? Le prochain président américain,
tiendrait-il compte de l'inquiétude de la Russie quant au
déploiement de la troisième zone de positionnement américaine de
défense antimissile en Pologne et en République tchèque?", ont
demandé les experts au sénateur. Ses réponses n'étaient pas
exhaustives. La nouvelle administration ne fait qu'élaborer ses
propositions et une certaine période doit passer pour qu'elles
deviennent un guide d'action.
Pour l'instant, Barack Obama n'a pas adopté non plus une
position nette sur l'avenir de la défense antimissile
stratégique européenne. Il a maintes fois déclaré qu'il voudrait
être persuadé de son efficacité. En attendant, il s'abstient de
prendre des décisions. Qui plus est, la crise économique,
financière, même alimentaire, qui se fait sentir de plus en plus
aux Etats-Unis peut se répercuter considérablement sur la
situation. Le président nouvellement élu veut concentrer son
attention avant tout sur ces problèmes.
Le sénateur a rappelé la situation concernant l'élaboration
du programme de réduction commune de la menace. Les législateurs
américains n'avaient pas voulu le financer, a-t-il dit, en
estimant que les Russes devraient détruire à leurs frais leurs
armes superflues de destruction massive. Pourquoi le faire aux
frais des Américains? Comme l'a fait remarquer Richard Lugar, il
a dû déployer des efforts considérables avec son collègue Sam
Nunn pour les persuader que l'octroi par les Etats-Unis d'une
aide aux Russes pour qu'ils puissent éliminer leur missiles et
leurs sous-marins était avantageux pour les Américains.
L'élimination de ces armes ne ferait que renforcer l'Amérique.
L'allusion a été prise au sérieux. Les experts ont compris
que les Etats-Unis ne pourraient conclure des ententes
juridiquement contraignantes avec la Russie sur les problèmes
des armements stratégiques offensifs et de la défense
antimissile que si cela est avantageux pour eux. Nous devons
penser au moyen d'y parvenir.
Il est vrai, comme il ressort des déclarations des hommes
politiques et des militaires russes, Moscou considère la
sécurité comme une notion et la réalité comme des notions égales
pour la Russie et les Etats-Unis. Dans son discours prononcé à
l'Académie de l'état-major devant les attachés militaires des
Etats étrangers accrédités à Moscou, le général d'armée Nikolaï
Makarov, chef d'état-major général des Forces armées russes, a
avancé plusieurs conditions de la prorogation du Traité Start-1
ou de la conclusion, sur sa base, d'un nouvel accord. Selon lui,
l'accord doit être juridiquement contraignant, c'est-à-dire
ratifié par le congrès et le parlement ; les plafonds des
armements stratégiques doivent être déterminés aussi bien pour
les vecteurs que pour les ogives nucléaires. Toutes les armes
nucléaires ne doivent se trouver que sur le territoire national.
Le système de contrôle est simplifié au maximum. Il est
nécessaire de définir nettement le contenu du terme de "moyens
opérationnellement déployés". De quoi s'agit-il? Uniquement des
missiles installés ou des systèmes stockés dans leurs bases?
Pour l'instant, la réponse n'est pas encore parvenue
d'outre-océan. Mais il est évident qu'il ne sera pas facile de
s'entendre sur le contrôle et la réduction des armements
stratégiques offensifs avec le président Barack Obama.
Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la
stricte responsabilité de l'auteur.
© 2008 RIA Novosti
Publié le 26 décembre 2008
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